Sport/Foot Magazine

Pourquoi Louis van Gaal est en demi-finale (et pas Marc Wilmots)

Généralement, un bon plan mène plus loin dans une compétition que du football hasardeux. Serait-ce la raison pour laquelle les Pays-Bas, et non la Belgique, sont en demi-finales du Mondial 2014 ?

Par Jan Hauspie

Si ‘nous’ sommes sortis tout à coup du Mondial, c’est entièrement de la faute de ces satanés Argentins : c’est la conclusion tirée par Marc Wilmots après une nuit de tourments. On a entendu peu d’autocritiques de la part de l’entraîneur, ni en pleine déception après l’élimination, ni 24 heures plus tard.

Wilmots n’était pas impressionné par les Argentins, à l’exception de Messi. Il a qualifié l’Albiceleste d’équipe ordinaire qui avait craint la sienne et qui, s’il y avait eu des prolongations, aurait succombé aux crampes. Et bien sûr, l’arbitre non plus n’a pas collaboré. La Belgique a perdu 1-0 et c’est la faute de tout et de tout le monde, hormis de Wilmots et de ses Diables Rouges.

Garder ses petites PME à niveau

Un ‘ami’ Facebook de Sport/Foot Magazine faisait remarquer que l’entraîneur avait surtout fait du bon boulot sur le plan micro-mental (garder chaque joueur à niveau comme une petite PME), ainsi que sur le plan macro-mental (maintenir la confiance mutuelle des joueurs et de toute la Belgique dans le produit Diables Rouges), puisque nos internationaux actifs dans les plus grandes compétitions savent déjà jouer au football. D’accord, le people management est devenu une grande qualité pour les coaches modernes et pour autant qu’on puisse en juger depuis la Belgique, sur ce plan-là, Marc Wilmots a fait du bon boulot.

Cependant, un peu d’intrépidité dans la tactique demeure recommandable. À aucun moment dans les matches des Diables on a vu la patte Wilmots : attaquant contre attaquant, ailier droit contre ailier droit, les changements de Wilmots étaient prévisibles et n’ont jamais modifié l’occupation du terrain, hormis contre l’Algérie et l’Argentine lorsqu’il a mis Marouane Fellaini et Daniel Van Buyten à l’avant et opté pour de longs ballons au petit bonheur la chance. Avec un succès variable.

La contre-attaque

Peut-être demeurons-nous plus belges que nous le pensons. Cette génération de Diables Rouges se présente comme des conquérants du monde, alors qu’ils ont joué leur meilleur foot au Brésil en contre-attaquant. Les buts de la victoire contre l’Algérie, la Russie et la Corée du Sud ? Chaque fois en reconversion offensive, l’euphémisme moderne de la contre-attaque. C’est dans la possession du ballon que le bât blesse. Les Diables Rouges ont manqué d’idées.

Ce manque frappait même lors des phases arrêtées, pour lesquelles les joueurs n’ont pas été entraînés. « Cela ne fait pas avancer l’équipe, j’en suis sûr », a dit Marc Wilmots, avec le même aplomb que lorsqu’il avait trouvé qu’un psychologue parmi son staff était de la foutaise. N’avait-il pas suivi un cours de psychologie de très courte durée à Cologne ? Cela pouvait suffire. En disant cela, il avait promu connaisseur du jeu tous ceux qui avait déjà regardé un match de foot pendant plus de cinq minutes. Les journalistes, par exemple.

S’entraîner sur les détails

Wilmots a fait ses déclarations à propos des phases arrêtées très peu de temps après avoir à nouveau souligné son indifférence vis-à-vis des prestations de l’Argentine et du Brésil. Les Brésiliens ne s’étaient-ils pas débarrassés de la Colombie grâce à un corner et un coup franc ? « Il s’agit de détails », a-t-il ajouté. Si c’est vrai, alors c’est simple: il faut travailler à ces détails – les corners par exemple.

Ici, un assistant futé serait tombé à pic. Mais Vital Borkelmans est surtout un type sympa et pas un conseiller tactique et technique dont un coach comme Wilmots, qui fonctionne à l’instinct, a besoin. Deux entraîneurs identiques ne se renforcent pas mutuellement. Il n’est pas rassurant que personne à l’URBSFA n’ait noté ce manque dans le staff très étoffé de Wilmots.

Forcer la chance

Les attentes autour et au sein des Diables Rouges étaient grandes. Parmi les joueurs eux-mêmes, au bercail et dans le reste du monde. Aux Pays-Bas, personne n’a parié un centime sur les chances des Oranje. Pourtant, ce mercredi soir, c’est l’équipe de Louis van Gaal, et non celle des talents de Marc Wilmots, qui disputera la demi-finale contre l’Argentine. Sur les vingt joueurs utilisés par ‘Willy’, il n’y en a qu’un qui joue en Jupiler Pro League belge: Anthony Vanden Borre, un remplaçant. De leur côté, les Pays-Bas figurent désormais parmi les quatre meilleurs du monde avec une demi-équipe composée de joueurs issus de la Eredivisie. Expérience, dites-vous ?

D’après le vieux cliché footballistique usé jusqu’à la corde, on peut forcer la chance. Mais « forcer quelque chose » n’est qu’une formule, il faut faire quelque chose en contrepartie. La chance ne tombe pas du ciel. Van Gaal, lui, l’a forcée, Wilmots non. Il n’a même pas fait d’entraînements de corner, cela en dit long. Les Oranje comme les Diables Rouges connaissent de bons et de moins bons résultats. Mais les Pays-Bas disposent d’un professionnel qui a un plan. Et son équipe réalise ce qu’il désire, contrairement aux Belges.

Le plus jeune entraîneur

Van Gaal a déjà tiré le maximum d’un collectif de footballeurs moyens. C’est un sentiment qu’on n’éprouve pas en Belgique. Les Diables Rouges ont joué un bon match contre la nation la plus naïve du tournoi. Au tour suivant, c’est déjà fini. Wilmots a avancé la jeunesse de sa sélection comme excuse. Ce Mondial était un apprentissage, le meilleur est encore à venir.

Peut-être que cet adage s’applique aussi à lui-même. Âgé de 45 ans, l’entraîneur était le plus jeune de la phase à élimination directe de ce Mondial, et même le troisième plus jeune du tournoi. Louis van Gaal a 62 ans, soit une différence d’expérience de 17 ans…

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