Irréductibles, rajeunissement et équilibre défensif remanié : les 5 leçons de la sélection de Roberto Martinez

Guillaume Gautier
Guillaume Gautier Journaliste

Du nouveau rôle d’Alderweireld à la pléthore de choix offensifs, analyse en cinq temps des 26 Diables qui prendront la direction du Qatar.

Si les surprises ont, comme prévu, été rares, engendrant bien moins de débats qu’une liste de 55 présélectionnés que personne n’aura finalement jamais vue, la liste de 26 noms égrenée par Roberto Martinez à dix jours du coup d’envoi du Mondial qatari n’en présente pas moins quelques enseignements majeurs. La preuve en cinq points.

Première leçon : les neuf irréductibles

Ce jeudi, avant que Roberto Martinez apparaisse face à l’amphithéâtre tubizien, ils étaient encore onze à rêver du grand chelem. D’un troisième Mondial consécutif disputé sous la tunique diabolique, après les voyages au Brésil en 2014 et en Russie quatre ans plus tard. Ils ne sont désormais plus que neuf, Nacer Chadli et Adnan Januzaj ayant loupé le triplé, à incarner les irréductibles de la plus grande génération de l’histoire du football belge : Thibaut Courtois et Simon Mignolet au but, Jan Vertonghen et Toby Alderweireld en défense, Axel Witsel et Kevin De Bruyne au milieu de terrain et Eden Hazard, Romelu Lukaku et Dries Mertens devant. L’ancien Napolitain, loin d’être en verve depuis son transfert au Galatasaray et relativement peu utilisé par Martinez depuis l’EURO, est l’unique « surprise » de ce club des habitués. Sans doute le sélectionneur se sera-t-il souvenu de son rôle majeur joué pour le premier match des Diables, tant au Brésil (auteur du 2-1 contre l’Algérie) qu’en Russie (l’ouverture du score contre le Panama). Une faculté à briller quand certains se crispent qui compte visiblement aux yeux du coach catalan.

Jan Vertonghen et Kevin De Bruyne font partie des irréductibles du sélectionneur national, même si l’un fait plus l’unanimité que l’autre. (Photo by Joris Verwijst/BSR Agency/Getty Images)

Si Courtois et De Bruyne jouent tous les matches de la phase de poules, huit de ces neuf joueurs occuperont les huit premières places au classement des Diables les plus capés de l’histoire. Seul Simon Mignolet, seulement 35 caps, manquerait à l’appel. Le gardien de Bruges facture par contre déjà 125 sélections. Les neuf irréductibles sont d’ailleurs tous centenaires en la matière.

Deuxième leçon : l’heure du rajeunissement

Depuis 2014, elle n’avait fait qu’augmenter, suivant le vieillissement inéluctable de la génération dorée. De 25,5 ans au Brésil, la moyenne d’âge de la sélection diabolique pour les grands tournois avait atteint 28,7 ans lors du dernier EURO, faisant de la Belgique l’une des équipes les plus âgées du grand tournoi continental. Cette fois, c’est avec un groupe de 26 qui affiche 27,8 ans d’âge moyen que les Diables se présenteront sur la scène mondiale.

Zeno Debast devra apporter sa fraîcheur en défense où il a joué les deux derniers matches de Nations League. (Photo by James Williamson – AMA/Getty Images) © belga

La conséquence du départ à la retraite progressif de certains cadres d’hier, mais aussi de l’intégration mesurée de la nouvelle génération : six des 26 sélectionnés par Roberto Martinez n’avaient pas encore disputé le moindre match chez les professionnels lors de la médaille de bronze décrochée en Russie. Quatre ans plus tard, Arthur Theate, Zeno Debast, Amadou Onana, Charles De Ketelaere, Jérémy Doku et Loïs Openda auront la lourde tâche de tenter d’aider leurs glorieux aînés à confirmer leur podium mondial.

Troisième leçon : sept changements en un an et demi

Défaite en quarts de finale du dernier EURO par l’Italie, future championne, la Belgique se voyait à un tournant générationnel au bout de l’été 2021. Seize mois plus tard, la révolution n’a pas été démesurée à Tubize, puisque 73% des joueurs présents lors du dernier grand tournoi seront encore du voyage vers le Qatar. Cela fait tout de même sept changements, presque un séisme pour un Roberto Martinez que les suiveurs aiment tant taxer de conservateur.

Si le départ à la retraite de Thomas Vermaelen a forcé le sélectionneur à amener du sang frais, et que le retour de Koen Casteels n’est qu’un respect de la logique hiérarchique (il avait été opéré durant l’été 2021 et donc laissé sa place à Matz Sels), d’autres choix sont plus marquants. Décevants lors de l’EURO et des sorties internationales suivantes, loin d’être au sommet de leur trajectoire personnelle en club, Dedryck Boyata et Jason Denayer contraignent le sélectionneur à initier partiellement le processus de relève tant attendu en défense. L’ancien Lyonnais présente ainsi la particularité d’avoir disputé deux fois l’EURO, mais jamais la moindre rencontre de Coupe du monde.

Nacer Chadli n’enfilera pas sa cape de sauveur de la nation quatre ans après son but inoubliable contre le Japon. (Photo by Vincent Van Doornick/Isosport/MB Media/Getty Images) © belga

Nacer Chadli, Dennis Praet et Christian Benteke quittent également les 26, qu’intègrent donc Casteels, Theate, Wout Faes, Debast, Onana, Openda et De Ketelaere.

Quatrième leçon : un nouveau Toby pour une nouvelle défense

De plus en plus souvent mise sous pression par ses adversaires, la Belgique avait besoin de pieds fiables au cœur de son trio défensif pour initier sa si précieuse relance. Qui de mieux que Toby Alderweireld et sa longue-vue à la place du pied droit pour endosser un rôle laissé vacant depuis la retraite de Kompany et Vermaelen ? En difficulté à droite à cause d’une mobilité défaillante, l’Anversois reste par contre la meilleure carte belge dans le registre défensif pur. Son repositionnement axial a délocalisé le problème du trio national, longtemps fixé sur l’absence de relève pour Jan Vertonghen à gauche mais partiellement réglé par l’éclosion prometteuse d’Arthur Theate.

Toby Alderweireld glisse dans l’axe pour mieux jouer avec sa passe de quaterback. (Photo by Michael Bulder/NESImages/DeFodi Images via Getty Images)

Alors que dans l’axe, Wout Faes profite autant du déclin de Boyata et Denayer que de son début de saison prometteur à Leicester pour prendre le costume de doublure, les points d’interrogation se sont donc installés sur le côté droit. Roberto Martinez y avait même testé Timothy Castagne, excellent dépanneur dans ce rôle mais trop précieux dans le couloir, avant de se résoudre à confier la succession de Toby à un « nouveau » duo, formé par le polyvalent Leander Dendoncker et le tout juste éclos Zeno Debast, testé et approuvé par le sélectionneur lors du dernier rassemblement avant le Mondial. Puisque Dendoncker était plutôt considéré comme un milieu de terrain lors des échéances précédentes, ce sont donc quatre des six membres du secteur défensif national qui débarqueront au Qatar dans le costume de rookie.

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Cinquième leçon : devant, l’abondance pour pallier l’incertitude

Épluchée ligne par ligne, la sélection parle d’elle-même : six joueurs pour trois postes derrière, neuf milieux de terrains pour quatre places de titulaire, et huit hommes pour trois sièges dans le onze aux avant-postes. Une liste offensive qu’on pourrait même élargir à douze possibilités, puisque Kevin De Bruyne, Yannick Carrasco, Hans Vanaken et Thorgan Hazard ont tous déjà incarné l’une des trois lames du traditionnel trident offensif de Roberto Martinez.

Jadis certitudes, Eden Hazard et Romelu Lukaku restent sur des saisons compliquées en club. Peuvent-ils encore jouer un rôle majeur dans l’épopée diabolique au Qatar ? (Photo by Matteo Ciambelli/NurPhoto via Getty Images)

Il faut dire que les incertitudes sont nombreuses parmi les cartes-maîtresses du sélectionneur. Buteur attitré, Romelu Lukaku était aussi devenu l’une des voies préférentielles du chemin belge en possession depuis les ennuis à répétition d’Eden Hazard. Monstrueux dos au jeu dans l’Inter d’Antonio Conte, Big Rom’ aspirait la pression adverse en gardant les ballons dans le camp adverse dans un registre différent d’Hazard, mais tout aussi précieux pour les Belges. Très incertain, il force à repenser potentiellement une animation qui ne peut plus en demander autant qu’en 2018 à un Eden dont la forme reste un point d’interrogation. Source principale de déséquilibre face à l’Italie au dernier EURO, Jérémy Doku est lui aussi victime de blessures à répétition depuis. Pas de quoi le priver d’une place dans les 26, avec une étiquette espérée de game changer de luxe, mais assez pour prévoir des alternatives en nombre en cas de pépin. C’est donc avec des Michy Batshuayi ou Leandro Trossard amenés à prendre du galon que la Belgique débarquera au Qatar, alors que De Ketelaere et Openda pourraient également devenir des pions majeurs plus vite que prévu.

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