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Bayern Munich : la Wunderteam veut entrer dans l’histoire

Le Bayern Munich a accumulé les records et espère faire de cette saison une année mythique. Cela passe par la double confrontation contre le Barça en demi-finales de la Ligue des Champions (aller: 4-0).

Il pose pour les photographes. Sans un sourire. A ses côtés, le président du conseil d’administration, Karl-Heinz Rummenigge lui fait l’accolade en lui offrant une gerbe de fleurs. Ce jour-là, en ouverture de la rencontre face au Werder Brême, Jupp Heynckes, 67 ans, est fêté pour son millième match professionnel (369 comme joueur et 631 comme entraîneur). Tout est réuni pour que le jubilaire soit satisfait : une longévité exceptionnelle ponctuée par une saison record à la tête du Bayern Munich qui pourrait réaliser un triplé inédit (championnat, coupe d’Allemagne et Ligue des Champions).

Pourtant, Heynckes ne sourit pas, refusant de verser dans l’hypocrisie de façade. Car, entre lui et ses dirigeants, un froid s’est installé suite à la nomination de Pep Guardiola à la tête de l’équipe la saison prochaine. Non pas qu’Heynckes aurait voulu plus de crédit et continuer (il avait annoncé qu’il prenait sa retraite à l’issue de la saison) mais il n’a ni apprécié le timing de l’annonce, ni d’être mis au courant par la presse.

 » Cette fin de règne rappelle celle d’Ottmar Hitzfeld, il y a cinq ans « , affirme Alexis Menuge, établi à Munich depuis 15 ans et correspondant en Allemagne pour L’Equipe.  » Heynckes aurait préféré connaître le nom de son successeur de la bouche de ses dirigeants. Il faut savoir qu’il est très sensible et susceptible.  »

Voilà donc cet entraîneur emblématique, victorieux de la Ligue des Champions en 1998 avec le Real Madrid, obligé de composer avec l’ombre de son successeur. Car, depuis cette annonce, symbolisant le retour du Bayern au sommet de l’élite européenne, les rumeurs ne cessent d’enfler. Pas une semaine ne s’écoule sans qu’un protégé de Guardiola ne soit annoncé en Bavière. Et Heynckes obligé de garder son effectif motivé alors que certains joueurs commencent à se poser des questions sur leur avenir bavarois.

C’est le cas notamment de Mario Gomez qu’une blessure encourue en début de saison a condamné au banc au profit de l’autre super Mario, le Croate Mario Mandzukic, arrivé de Wolfsbourg cet été et qui réalise une première année tonitruante sous les couleurs du Bayern. Relégué sur le banc, alors que les noms de Luis Suarez et Robert Lewandowski ont circulé, voilà Gomez, malgré des statistiques flatteuses (un but tous les deux matches) et auteur de 26 buts la saison passée, qui se demande s’il ne ferait pas mieux d’aller voir ailleurs.

Une saison-miracle

Pourtant, ces bisbrouilles intérieures n’ont pas empêché le noyau de demeurer calme tout au long de la saison, de voguer de succès en succès et de décrocher in fine son 23e sacre.  » Il y a une vraie osmose entre l’entraîneur et son groupe « , explique Menuge.  » Heynckes est parvenu tout au long de la saison à garder mobilisés tous les remplaçants et tout le monde apprécie la manière dont il tient le vestiaire et gère les stars. « 

Cette manière de travailler explique en grande partie la marche triomphante du Bayern, qui est en passe de battre tous les records. Absolument tous.  » Le Bayern s’est relevé très vite des trois traumatismes de la saison passée (titre aux mains de Dortmund, défaite en finale de Coupe et de la Ligue des Champions) « , explique Hardy Hasselbruck, journaliste au Kicker.  » Cela a surpris pas mal d’observateurs d’autant plus que même si le Bayern s’était renforcé avec Dante, Javi Martinez et Mandzukic, il n’avait pas acheté de grandes stars. Tout le monde pensait que Dortmund était plus avancé dans son évolution que le Bayern et c’est l’inverse qui s’est produit.  »

Ces transferts relativement anonymes – même si le Bayern a quand même déboursé 40 millions d’euros pour Javi Martinez, 13 millions pour Mandzukic et 11 millions pour Xherdan Shaqiri – se sont avérés des maîtres-achats et l’équipe mise en place par Heynckes pourrait bien devenir la nouvelle référence de l’histoire de la Bundesliga. D’ici la fin de saison, le Bayern escompte bien battre plusieurs records : le nombre de points (81 points de Dortmund en 2012), le moins de but encaissés (21 par le Bayern en 2008), le nombre de buts marqués (101 buts par le Bayern en 1972), et le nombre de matches sans encaisser de buts (19 par le Werder Brême – le Bayern en est à 18 après 28 journées !). Ceux-ci pourraient s’ajouter à ceux que ce Wunderteam a déjà battus : 57 points après 22 journées, 11 victoires de rang et la précocité du sacre (jamais une équipe n’avait été championne à huit journées de la fin).

Une richesse offensive

Mais qu’est-ce qui rend ce Bayern invincible ? D’abord une richesse offensive. L’absence de Gomez en début de saison a directement été compensée par l’explosion de Mandzukic. Et quand Heynckes fait tourner son noyau, comme contre Brême (6-1), match intercalé entre un match européen à Arsenal et un de Coupe contre Dortmund, les remplaçants se montrent à la hauteur. Même chose contre Hambourg (9-2) où le remplaçant du remplaçant, Claudio Pizarro a inscrit un quadruplé. Même richesse sur les ailes où Arjen Robben a même été supplanté par Thomas Müller dont la polyvalence et la régularité en font un incontournable. Et il y a encore Shaqiri sur le banc…

Il suffit d’ajouter la forme éblouissante de Franck Ribéry et celle de Bastian Schweinsteiger depuis le début de la saison et vous obtenez un rouleau compresseur offensif. Seul l’égoïsme de plus en plus agaçant de Robben, qui devrait quitter la Bavière en été, tranche dans cet élan collectif huilé.

Mais si la marque de fabrique de ce Bayern repose sur son attaque, la clé de voûte en est la défense. C’est sur ce point-là que le Bayern avait perdu le titre les deux dernières saisons. Dante (ex-Charleroi et Standard), acheté quatre millions au Borussia Mönchengladbach a équilibré l’ensemble. Il est devenu le joueur le plus utilisé par Heynckes avec le gardien Manuel Neuer et apporte une qualité de relance qui manquait à cette formation. Certains considèrent encore cette défense comme une faiblesse (Daniel Van Buyten a 35 ans, Jerome Boateng tarde à éclore et Holger Badstuber est blessé) mais les chiffres parlent pour elle : à la mi-mars, elle n’avait encaissé qu’un but à l’extérieur. Unique dans les annales.

Par Stéphane Vande Velde

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