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La stratégie « zéro » des Jumbo-Visma

Débarquer sur les routes belges sans le moindre kilomètre de compétition au compteur est devenu une tendance. Cette saison, Jumbo-Visma l’élargit à toute son équipe. Analyse.

On ne la fait pas à Johan Museeuw. Autrefois patron des routes du nord, le Lion des Flandres rugissait la saison dernière au sujet de ceux qui entament leur saison sur les routes tortueuses du Circuit Het Nieuwsblad : « Je trouve toujours ça dangereux. On peut faire beaucoup de choses à l’entraînement, mais pas recréer la réalité du peloton. Certainement pas celui de l’Omloop. »

Cette année, Museeuw pourra se répéter. Surtout s’il jette un œil sur la sélection des Jumbo-Visma pour ce samedi. Tiesj Benoot, Edoardo Affini, Christophe Laporte, Jan Tratnik, Dylan van Baarle, Mick van Dijke et Nathan Van Hooydonck arrivent en Belgique sans le moindre kilomètre de compétition au compteur. Sans tenir compte de 2021 et de son début de saison tronqué par le Covid et les courses annulées, c’est une grande première collective. Sans pour autant être un coup d’essai chez les jaunes néerlandais. L’an dernier, seuls deux des sept coureurs Jumbo au départ avaient déjà couru plus tôt dans la saison. Vierges de toute course, Benoot et Wout van Aert ne se sont alors pas privés pour dominer la finale, le futur maillot vert du Tour s’envolant dans le Bosberg vers une victoire en solitaire.

On n’avait plus vu ça depuis 1980, et la victoire de Joseph Bruyère sur le Volk pour son premier jour de course de la saison. Pourtant, van Aert était loin d’être une exception l’an dernier, où deux autres membres du top 5 final débutaient leur année sur les pavés belges : le dauphin Sonny Colbrelli et le cinquième Victor Campenaerts. Là aussi, les chiffres étaient uniques. Il n’y a qu’en 2020 que deux coureurs avaient réussi à se faufiler dans le top 10 du Nieuwsblad pour leur premier jour de course.

LA STRATÉGIE DES GUÊPES

Malgré le succès de l’an dernier, rares sont ceux qui imitent la stratégie des Jumbo-Visma. Il y a certes les Belges Campenaerts et Jasper Stuyven, ainsi que le trio Alpecin formé par Jasper Philipsen, Soren Kragh Andersen et Gianni Vermeersch, également en attente de leurs premières bornes en compétition, mais tous les autres ont profité de courses par étapes en Australie, au Moyen-Orient, en Amérique du sud ou dans le sud de l’Europe pour délier les jambes. Une razzia sur les premières semaines de l’année à laquelle la course aux points pour l’important World Ranking n’est probablement pas étrangère.

Quelques points « faciles » en misant sur une forme précoce, Jumbo-Visma n’en a pas besoin. Les Guêpes se concentrent sur les plus grandes courses, encore plus depuis l’adaptation du barème de points qui entre en vigueur cette saison. Wout van Aert ne reprendra qu’aux Strade Bianche après avoir multiplié les cross cet hiver, mais planifie seulement son pic de forme pour la Semaine Sainte, dans l’espoir de triompher au Ronde et/ou à Roubaix. Une politique visiblement collective, puisque Jonas Vingegaard et ses lieutenants n’ont repris la course que ce jeudi sur les routes espagnols du Gran Camino, tandis que Wilco Kelderman ne reprendra qu’à Tirreno et Primoz Roglic au Tour de Catalogne, pour préparer – tardivement – son Giro.

UNE NOUVELLE NORME ?

Selon les coaches de l’équipe néerlandaise, un bon pic de forme se travaille surtout hors des compétitions, lors de stages en altitude où les efforts peuvent être bien plus millimétrés que lors de ces courses par étapes de début de saison aux scénarios aléatoires. Les noms loufoques donnés par les coureurs à ces sorties sur leur Strava contrastent avec l’intensité des entraînements, qui permettent aux hommes en jaune d’être affûtés dès leur retour sur le circuit.

L’approche reste toutefois une exception. Nombreux sont ceux qui continuent à croire aux jours de course précoces pour briller sur les routes belges à la fin du mois de février. Le top 5 des quinze dernières éditions du Circuit Het Nieuwsblad facturait ainsi, en moyenne, 9,63 jours de course au départ. Jusqu’en 2021, on ne trouvait d’ailleurs dans le top 5 de ces éditions que trois coureurs avec moins de cinq jours de compétition dans les jambes : Luca Paolini, quatrième en 2010 (2 jours) ; Soren Kragh Andersen, troisième en 2020 (0 jour) ; et Davide Ballerini, vainqueur en 2021 (4 jours).

L’an dernier, Wout van Aert, Sonny Colbrelli et Victor Campenaerts (premier, deuxième et cinquième) ont normalisé ce qui n’était qu’une exception depuis plus d’une décennie. En 2023, plus personne ne serait surpris que les Jumbo-Visma confirment cette nouvelle tendance dès ce samedi.

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