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Vu à la télé

La crème des consultants fait le diagnostic du moteur du Standard. Des discussions qui amènent Samuel Bastien dans le monde de Witsel, de Mané, de Haaland. Et même de Morioka.

Vu leur carrière, ils savent de quoi ils parlent. Chaque week-end, ils écument les stades et donnent leurs avis techniques sur les as de notre championnat. On a choisi des consultants télé régulièrement présents aux matches du Standard pour décortiquer le jeu, la personnalité et la progression de Samuel Bastien.

Philippe Albert voit qu’on a zappé Razvan Marin

 » Si le Standard a laissé partir Razvan Marin en fin de saison passée, c’est parce qu’il y avait un gros chèque de l’Ajax mais aussi parce qu’ils savaient qu’ils avaient son remplaçant sous la main. Pour Bastien, ça a été compliqué pendant une saison entière, mais quand tu as un Marin et un Gojko Cimirot au niveau où ils étaient, qu’est-ce qu’il pouvait exiger ? Aujourd’hui, je constate qu’on ne parle plus de Marin, et ça, c’est un fameux tour de force. Il a fait oublier le meilleur joueur de l’année passée ! Il peut même devenir meilleur que Marin.

Bastien peut devenir meilleur que Marin.  » Philippe Albert

Dès le début du championnat, il a reçu la mission de remplacer Marin, et peu de gens s’attendaient à ce qu’il le fasse aussi vite et aussi bien. C’est un milieu moderne, il bosse beaucoup, il récupère énormément de ballons, il sent bien les coups, il est au top physiquement, il est présent offensivement. Mais au niveau offensif surtout, il a encore une belle marge de progression. Avec ses qualités, il devrait mettre de huit à douze buts par saison. Parce qu’il a une bonne frappe.

C’est aussi un gars qui ne se cache pas. Dans le match à Charleroi, alors que le Standard n’était pas dedans, il a pris ses responsabilités, il a été un des seuls joueurs à tenter quelque chose. Il a essayé de trouver des espaces. C’est dans sa mentalité : même quand ça ne va pas bien, il essaie de se projeter vers l’avant.

Le Standard est d’office plus cohérent et plus solide quand il est sur le terrain. Il était absent récemment contre Waasland-Beveren, Gand et Courtrai, et il n’y a eu que des défaites. Ce n’est sans doute pas un hasard. Samuel Bastien, c’est le moteur du milieu. Dès qu’il tousse, c’est toute l’équipe qui tousse. Il est devenu incontournable. Maintenant, de là à suivre ceux qui l’envoient déjà vers l’équipe nationale…

Le problème ici, c’est qu’on va souvent vite en besogne. Bastien pour prendre la place de quel Diable ? Axel Witsel est encore là pour quatre ou cinq ans. Youri Tielemans et Leander Dendoncker ont déjà montré qu’ils étaient plus que des simples remplaçants. Il faudra les déloger, et par rapport à Bastien, ça fait plusieurs saisons qu’ils prouvent leur valeur. Roberto Martinez a l’habitude de nous faire des surprises, mais pour le moment, ça me paraît assez compliqué.  »

Vu à la télé
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Marc Degryse voit du Ruud Vormer en lui

 » Il est le prototype du box-to-box, il me fait penser à Ruud Vormer. Il joue plus ou moins dans la même position, avec le même rôle, il a la même mentalité de battant, il travaille dur, il donne des assists et il marque de temps en temps. Son but à Bruges me vient directement à l’esprit. C’était un match difficile pour le Standard, dans une ambiance hostile, il ne s’est pas laissé démonter. Il a marqué plusieurs buts qui ont rapporté des points, contre Genk, dans les arrêts de jeu à Eupen. Il montre qu’il sait faire autre chose que récupérer des ballons. Il a un gros moteur et une belle technique de frappe.

Il a reçu la confiance de Cimirot, qui avait appris le métier avec Marin. Le Standard a un beau trio dans le milieu du jeu. Cimirot a plus un rôle de contrôleur, d’aspirateur devant la défense. Bastien se positionne un rien plus haut, en 8. Et Selim Amallah peut devenir un 10 complet. Si ces trois joueurs sont à leur meilleur niveau pendant les play-offs, ça va être une clé pour le Standard. Ils ont toutes les qualités individuelles pour se compléter à la perfection.

Je ne le connaissais pas quand il est arrivé au Standard, je ne le suivais pas quand il était en Italie. Il aurait pu sombrer là-bas, il s’est retrouvé dans un petit club à un moment où Anderlecht ne croyait pas en lui. Il a rebondi en Serie B avec Avellino puis il a fait son trou en Serie A avec Vérone. Il fallait qu’il ait du caractère pour réussir ça. Beaucoup de joueurs auraient laissé tomber les bras. En plus, l’Italie n’est pas le meilleur pays pour se remettre en confiance. Il a continué à apprendre le métier et il a acquis là-bas des très bonnes bases tactiques qu’il exploite aujourd’hui.

Point de vue engagement, il n’a jamais foiré.  » Marc Degryse

Je ne sais pas si, au Standard, on le considère comme un patron du noyau. Mais je vois qu’il prend des initiatives, qu’il discute avec ses coéquipiers, avec les arbitres. Point de vue engagement, on ne l’a jamais pris en défaut cette saison. Il a un bon profil pour s’installer comme leader, parce qu’il est en plus à une position idéale sur le terrain pour diriger. Il peut avoir en permanence un contact visuel et verbal aussi bien avec les défenseurs qu’avec les attaquants. S’il confirme, il pourra repartir un jour à l’étranger. Et là, il ne devra plus accepter une solution de secours. Partir quand tu es banni à Anderlecht ou recevoir une chance dans un grand championnat quand tu t’es imposé dans un club comme le Standard, c’est complètement différent.  »

Philippe Albert
Philippe Albert© BELGAIMAGE

Thomas Chatelle décèle en lui le futur capi du Standard

 » La saison passée, Samuel Bastien m’a plus d’une fois laissé sur ma faim. Il a sans doute eu un déclic mental pendant l’été, quand il a compris qu’il y avait une place pour lui dans l’équipe de départ s’il se montrait à la hauteur. Le Bastien que je vois cette saison n’a plus grand-chose à voir avec celui de l’année dernière. Sa transformation est flagrante. Ne plus avoir Marin sur son passage, ça a boosté sa confiance. C’est maintenant un gars qui dégouline d’assurance alors que ça ne sautait vraiment pas aux yeux il y a un an. Ça se remarque notamment dans ses prises d’initiatives. Ce qui me frappe aussi, c’est son jeu en infiltrations, sa façon de surgir depuis la deuxième ligne, la verticalité dans ses courses, sa facilité pour frapper en dehors des 16 mètres. Dans certains matches, il a crevé l’écran avec ça. Et pour moi, son match référence, il l’a joué à Bruges.

Il courait le risque de rester un éternel espoir, ce risque a entre-temps disparu. Par rapport à Marin, il a peut-être un peu moins de finesse technique mais il a plus de capacités athlétiques, plus de masse musculaire, et c’est un avantage sur cette portion du terrain. L’équilibre de l’équipe, c’est d’abord son association avec Cimirot. Je les compare au duo Marco Ilaimaharitra / Ryota Morioka. Il y a le même type de complémentarité. Quand un défenseur, un milieu défensif ou un attaquant réussit à gérer plusieurs binômes différents, ça veut dire qu’il a une intelligence au-dessus de la moyenne et la faculté de s’adapter. C’est le cas de Cimirot. Il a su gérer Marin, il fait maintenant la même chose avec Bastien. Son jeu aussi a énormément évolué depuis un an et demi, il a gagné en maturité et en présence. Ce n’est pas un leader qui va haranguer ses coéquipiers mais ce n’est pas grave parce que Bastien sait le faire à sa place. On voit ça de plus en plus depuis quelques mois. Pour ça, j’ai été déçu à Charleroi, je croyais qu’il allait prendre les choses en mains, qu’il allait insuffler de la révolte. En tout cas, je le vois devenir un bon capitaine pour le Standard.  »

Marc Degryse
Marc Degryse© BELGAIMAGE

Alex Teklak constate que Gojko Cimirot se sacrifie pour lui

 » C’est difficile de parler de Bastien sans aborder Cimirot. Autant Cimirot faisait du bien à Marin, autant il permet à Bastien d’être bon. Il reste un peu plus en retrait alors qu’il a sans doute autant d’envie de se projeter vers l’avant que Bastien. Mais non, il se sacrifie, comme il se sacrifiait pour Marin. Si c’est lui qui fait ça, c’est sans doute parce que c’est le seul joueur du noyau, avec des caractéristiques de médian défensif, qui est suffisamment expérimenté et discipliné pour le faire. Il permettait à Marin d’être présent aux abords du rectangle, et aujourd’hui, il laisse le même type de liberté à Bastien, même si ça passe plus par des frappes à distance. Sans la blessure de Merveille Bokadi, ils auraient été à trois pour ces deux places. Mais je pense que même si Bokadi avait été opérationnel, Bastien se serait imposé. Il est passé d’un rôle de troisième, quand Marin était là, à un statut de co-premier avec Cimirot.

Il permet au Standard d’étouffer l’adversaire.  » Alex Teklak

Il presse beaucoup en avançant. Parfois, ça rate et il faut alors quelqu’un derrière pour rattraper la sauce, et Cimirot est là, il couvre. Bastien est fort explosif sur les premiers mètres, il permet au Standard d’étouffer l’adversaire, surtout dans les matches à domicile. L’atmosphère de Sclessin entraîne naturellement les joueurs qui ont son profil, il est omniprésent dans le pressing. Et il commet très peu de fautes, en tout cas peu de fautes grossières. Il met beaucoup d’énergie dans ses interventions mais il prend très peu de cartes jaunes. Il arrive très bien à contrôler sa fougue.

La tactique n’est peut-être pas son dada mais il a dû bouffer des séances vidéo en Italie et ça lui a permis de revenir en Belgique avec une grosse culture. Et puis je pense que certains événements de sa carrière l’ont bien fait mûrir. Le Standard n’a plus voulu de lui quand il était jeune, puis c’est Anderlecht qui n’a pas cru en lui quand il était devenu adulte. Il a calmement fini sa post-formation en Italie et il est revenu beaucoup plus fort. C’est sans doute à cause de quelques moments difficiles qu’il a une maturité plus précoce que beaucoup d’autres joueurs. On voit directement que c’est un joueur assez réfléchi, il ne fait pas n’importe quoi, ce n’est pas un petit sot. Tu ne le retrouves pas nécessairement dans les phases à problèmes, dans les emballements. Avant qu’il s’impose au Standard, je l’avais vu dans plusieurs matches en Espoirs, il dégageait déjà une grosse impression de calme.

Thomas Chatelle
Thomas Chatelle© BELGAIMAGE

Ce n’est pas un joueur que tu remarques au premier coup d’oeil. Pas un gars sur lequel tu miserais tout de suite. Parce qu’on est toujours un peu aveuglé par le côté spectaculaire des footballeurs. Mais ce n’est pas ça, le plus important. On s’en fout ! Ce qu’il faut, c’est un joueur efficace et capable de supporter la pression. Bastien, tu le fais jouer puis tu te rends compte à quel point il est utile. Repérer un Tielemans, c’est facile. Repérer un Marin, un Cimirot ou un Bastien, c’est moins simple. Parce que ces gars-là ne vont pas forcément taper dans l’oeil. Bastien est un joueur de devoir, et ce n’est pas péjoratif. Ce sont rarement les plus beaux qui réussissent une belle carrière. « 

Benoit Thans
Benoit Thans© BELGAIMAGE

Benoit Thans a essayé de le caser dans la galaxie Red Bull

 » J’ai travaillé pendant huit ans avec Ralf Rangnick pour Red Bull, j’avais fait sa connaissance quand j’étais à la fédération, au moment où il avait postulé pour devenir entraîneur des Diables Rouges. Je faisais du repérage en Belgique, en France et aux Pays-Bas, le but était de trouver des joueurs pour trois clubs qui appartiennent à Red Bull : Salzbourg, Leipzig et New York. Il y avait des scouts partout, c’est par cette filière-là que Sadio Mané, Erling Haaland et Naby Keïta se sont retrouvés à Salzbourg.

Avec Rangnick, on est allés voir des matches d’Anderlecht en Youth League. Il y avait plusieurs joueurs de cette équipe qui nous intéressaient : Andy Kawaya, Aaron Leya-Iseka, Nathan De Medina, Dodi Lukebakio. Et aussi Samuel Bastien. C’est surtout lui qui nous a tapé dans l’oeil et on a décidé de le suivre intensivement. On l’a revu à Nyon pour la demi-finale de Youth League, on a pris contact avec ses parents et son agent. On voulait le caser à Salzbourg, où il aurait pu terminer sa formation dans une académie exceptionnelle. Il était censé entrer dans l’équipe dès que Keïta serait parti. Finalement, ça ne s’est pas arrangé, en partie parce que c’était un peu compliqué avec Anderlecht.

Il a éclaté avec un peu de retard. Je ne suis pas étonné. Il a les qualités du footballeur moderne, il est très complet, il a de la verticalité, beaucoup de mouvement sans ballon, il est capable de faire la différence tout seul et de trouver des solutions collectives à d’autres moments. Il va vite, il s’engage dans les duels, il a une bonne frappe. Entre ses matches en Youth League et aujourd’hui, il a progressé de la même façon dans tous les domaines. C’est un futur international. Et il repartira à l’étranger.  »

Alex Teklak
Alex Teklak© BELGAIMAGE

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