Venu de nulle part

Comment ce jeune gardien a-t-il fait pour se retrouver dans les cages de Saint-Trond alors qu’il était réserve à Tongres ?

Pour qu’un jeune intègre l’équipe Première, il doit souvent compter sur un concours de circonstances. C’est encore plus vrai pour un gardien. A Sunderland, SimonMignolet a débuté en Premier League grâce à la blessure de CraigGordon. Au Germinal Beerschot, ThomasKaminski n’était que le deuxième gardien lorsque TomePacovski s’est fracturé la jambe au Parc Astrid. A Saint-Trond, LaurentHenkinet a carrément vu les deux gardiens qui le précédaient dans la hiérarchie, MarkVolders et SvenVanderJeugt, se blesser tour à tour.

La saison dernière, Henkinet n’était pourtant que le deuxième gardien à Tongres, en D3. Le voilà premier gardien à Saint-Trond, en D1. Et son contrat de six mois, comme semi-pro, a été prolongé dès septembre jusqu’en juin 2014.

 » On avait mis la main sur un diamant brut « , explique l’entraîneur des Canaris, Guido Brepoels.  » A Lokeren, où l’on a été battu 3-0, Laurent était passé au travers lors d’une sortie et cela nous avait coûté le premier but. Mais cela ne l’a pas perturbé pour le restant du match. Quelques minutes plus tard, il n’a pas hésité à sortir à nouveau, sur le même genre de ballon. Cela, c’est le signe d’un grand.  »

Le grand public a découvert Henkinet il y a trois semaines lors du match à Sclessin, face au Standard, le club dont il est supporter et où il avait passé trois tests infructueux dans sa jeunesse. Grâce à des arrêts déterminants, il avait retardé l’échéance le plus longtemps possible, avant de s’avouer vaincu sur un dernier coup de tête de GohiBiCyriac, sur corner.

Détecté lors du match de la relégation

Né le 14 septembre 1992, Henkinet termine sa rhéto au collège Saint-Louis de Waremme, en sciences sociales, avec un statut de sportif d’élite qui lui permet de louper certains cours. Il compte bien poursuivre ses études la saison prochaine, mais en ignore encore l’orientation. Il habite chez sa maman, à Berloz, où il a taquiné ses premiers ballons dès l’âge de quatre ans. Après avoir transité par Waremme et Geer, il a rejoint Tongres alors qu’il n’avait que 12 ans.

 » Je l’ai entraîné depuis ses 13 ans « , se souvient DanielCuypers, l’entraîneur des gardiens du club limbourgeois.  » Ses capacités sautaient aux yeux et il n’a cessé de progresser. Il y a deux ans, lorsque SamFranssen est parti à Genk ( NDLR : il a entre-temps déjà quitté le Racing, pour raisons professionnelles, et joue désormais en 1re Provinciale), Laurent fut alors élevé au rang de deuxième gardien. Il l’était toujours la saison dernière, derrière StijnVincent, mais on savait qu’on pourrait lui faire confiance si le titulaire se blessait. L’été dernier, Saint-Trond s’est informé à son sujet. Le président PierreBijloos m’a demandé mon avis et je lui ai répondu : – Laurentestungardiendetalent, silapossibilitédefranchiruncapseprésentepourlui, nousn’avonspasledroitdeluimettredesbâtonsdanslesroues !  »

C’est lors d’un match Tongres-Léopoldsburg, décisif pour le maintien en D3 (que les sociétaires de la cité d’ Ambiorix ont… perdu) qu’Henkinet a séduit les émissaires trudonnaires, dont Brepoels :  » Déjà à l’échauffement, il m’avait impressionné. Très concentré, très calme, il affichait beaucoup d’assurance. Et durant le match, malgré la défaite, il avait livré une excellente prestation. JosBekx, notre entraîneur des gardiens, a aussi été directement convaincu de ses qualités.  »

 » Sa principale qualité réside dans ses réflexes étonnants « , affirme Cuypers.  » Il dégage aussi un calme impressionnant. Intérieurement, il lui arrive probablement d’être nerveux comme tout le monde, mais sur le terrain, il ne laisse rien transparaître. Ce qu’il doit encore améliorer, c’est sa relance au pied. Mais il n’a encore que 18 ans, ne l’oublions pas. C’est très jeune pour un gardien, seuls des grands comme MichelPreud’homme ont débuté en D1 à cet âge-là, dans des circonstances similaires d’ailleurs.  »

Une famille de trois garçons

Laurent a deux frères : l’aîné, Nicolas (21 ans), joue actuellement à Oreye, en 1re Provinciale liégeoise, comme joueur de champ ; le cadet, Thomas (16 ans), a joué au football mais a abandonné. Le père, Pierre, est chimiste et n’a jamais été footballeur.  » J’étais un peu réticent à l’idée de voir Laurent se lancer dans le football. Je l’encourageais à faire du sport, mais surtout pour la santé, comme hobby. Comme tout parent, je souhaitais qu’il se consacre d’abord à ses études, mais le football était une véritable passion pour Laurent et je m’en serais voulu de l’en priver. Les différents entraîneurs qu’il a eus dans les équipes de jeunes me disaient tous qu’il avait du talent. Lorsqu’il est parti à Tongres, il a bien sûr fallu jouer au taxi, mais on s’est arrangé, avec les grands-parents maternels et surtout sa maman qui croyait beaucoup plus que moi en ses chances de réussite, pour le conduire à tour de rôle. L’investissement en valait la peine. Je suis fier de lui mais pas surpris. Je reçois beaucoup de louanges à son sujet. J’ai entendu que les défenseurs trudonnaires aimaient bien jouer avec Laurent dans leur dos, car il ne leur met pas la pression. Le fait qu’il se débrouille en néerlandais, alors qu’il est Wallon, est aussi très apprécié. Le chemin est encore long, mais il a déjà fait un grand pas.  »

PAR DANIEL DEVOS

 » Sa principale qualité réside dans ses réflexes étonnants. « 

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