Tout c’qui faut

Pierre Danvoye
Pierre Danvoye Pierre Danvoye est journaliste pour Sport/Foot Magazine.

Cinq avis autorisés sur le seul joueur de l’histoire du football belge à avoir porté les maillots des quatre clubs hennuyers.

Le premier derby hennuyer, c’est û déjà û pour ce week-end : Mons-Mouscron. Des retrouvailles pour Marco Casto. Et il y en aura bien d’autres cette saison pour le néo-Dragon qui a été formé à La Louvière avant de se révéler à Charleroi puis de confirmer au Canonnier. A l’approche de son 300e match de D1, Casto est passé au scanner par cinq personnes qui le connaissent bien, voire très bien.

Les valeurs humaines, par Olivier Suray

 » Il y a longtemps que Marco n’est plus un copain mais carrément un ami. Nous nous côtoyons depuis plus de 15 ans et nous ne nous sommes jamais disputés. Pas même vaguement chamaillés. Nous partons en vacances et faisons plein de choses ensemble. Avec Marco, Alex Teklak, Philippe Albert et Roch Gérard, nous formons une petite bande terriblement soudée. Pourquoi ? Parce que nous partageons plusieurs traits de caractère : nous aimons faire la fête, nous détestons les gens qui parlent dans notre dos et font leurs petits coups en douce, nous sommes francs et directs, nous ne savons pas fermer notre gueule. D’accord, ce n’est pas toujours une qualité dans le milieu du football, mais je préfère dire ce que je pense plutôt que de passer dans le camp des faux culs ! Nous sommes aussi très sensibles dès qu’il est question d’amitié, d’enfants ou d’autres choses encore. Ce n’est pas parce qu’on a un sale caractère qu’on ne peut pas être sensible.

On dit de Marco qu’il est fouteur de merde sur les bords ? Il fonctionne au second degré, c’est différent. Comme moi, il estime que la vie est trop courte pour qu’on prenne tout au sérieux. On ne vit qu’une fois, quand même ! Marco est aussi impulsif, il démarre au quart de tour. Cela peut agacer les gens qui ne le connaissent pas et, à Mons, certains n’y sont pas encore habitués « .

L’expérience, par Liviu Ciobotariu

 » Casto a énormément d’expérience et cela saute aux yeux. Il sent le foot et ce qu’il faut faire quand une situation délicate se présente. C’est en défense que l’expérience est la plus importante. On peut s’en passer plus facilement dans l’entrejeu ou à l’attaque. Quand on joue derrière, on doit pouvoir se placer correctement et anticiper. Casto le fait très bien. Nous sommes souvent appelés à collaborer, vu que je joue dans l’axe défensif, un rien décalé sur la gauche. Vu ma grande taille, je monte régulièrement sur les phases arrêtées. Dans ces cas-là, Casto prend ma place. Et je prends la sienne quand il monte sur des phases de jeu. Cette collaboration se passe très bien. Nous ne devons même pas beaucoup parler pour qu’elle soit efficace.

Il me fait penser à Thaddée Gorniak, qui joue sur l’autre flanc de la défense. Ils ont tous les deux l’art de monter quand une ouverture se crée devant eux. Le gros avantage de Casto par rapport à Gorniak, c’est le nombre de matches qu’il a déjà disputés en D1 (295 avant cette saison). Gorniak n’a découvert ce niveau qu’il y a un an alors que Casto a plus de dix saisons de première division dans les jambes. Gorniak a encore tendance à paniquer quand il reçoit un ballon chaud. Il panique, il est stressé et il peut alors faire n’importe quoi, comme dégager dans la tribune. Casto, lui, ne le fera que si la situation de jeu est vraiment grave. Dans la grande majorité des cas, il essayera de trouver une solution footballistique : il protégera son ballon, optera pour un dribble ou une petite passe « .

La fougue, par Marc Grosjean

 » C’est vrai qu’il est plutôt fougueux (il rit)… Avec Mons, en amicaux, il a été exclu à la fois contre Lille et face au Brussels. Contre Lille, il a été exclu pour avoir voulu séparer deux joueurs qui allaient en venir aux mains, et contre le Brussels, il y avait d’abord eu une faute sur lui. J’ai une explication très simple à ses excès : Casto est bourré de bonnes intentions et il veut montrer à tout moment qu’il peut apporter énormément de choses à son équipe. Alors, il en fait trop et commet des fautes qui lui valent des cartes jaunes ou rouges. Il a toujours l’impression qu’il ne s’engage pas assez. Il vise sans arrêt la perfection, il veut faire l’unanimité, il place la barre très haut. Peut-être parce que certaines personnes l’avaient enterré à la fin de son séjour à Mouscron et qu’il veut absolument prouver qu’il est toujours là. J’ai déjà dû le rassurer en lui disant qu’on le connaissait, qu’il ne devait plus chercher à prouver sa valeur à Mons. Je n’attends pas plus, de lui, que ce qu’il a déjà montré avec Charleroi et Mouscron. S’il se hisse, chez nous, au même niveau, ce sera déjà très bien.

Casto se pardonne difficilement un mauvais centre, une passe ratée ou une interception manquée. Dans ces cas-là, il râle sur lui-même. Il ne voudra sans doute jamais accepter que les petites erreurs font aussi partie du jeu. Et on dirait qu’il cherche à être impliqué dans toutes les actions. Il essaye de se multiplier un peu partout sur le terrain et il commet des fautes. Mais je pense qu’il a déjà progressé sur ce plan-là depuis qu’il est arrivé à Mons. Pour le moment, il paraît parfaitement bien dans sa peau. Je lui parle beaucoup parce qu’il a besoin de sentir la pleine confiance de son environnement « .

Le pied gauche, par Georges Leekens

 » A Charleroi, je l’ai coaché un an. Il avait déjà un excellent pied gauche. Un mélange de talent naturel mais aussi de travail intense. Je le revois multiplier les frappes avec Roch Gérard. Casto tirait au but du gauche, et Gérard du droit. Casto n’a pas un droit exceptionnel, mais ce n’est pas un problème à mes yeux : il vaut mieux avoir un bon pied que deux moyens. Souvenez-vous de Rensenbrink : lui aussi n’avait qu’un pied valable. A Charleroi, Casto était à l’écoute du moindre conseil susceptible d’améliorer ses shoots. Il mettait aussi tout son feeling dans ses tirs et dans ses centres. Pour n’importe quelle équipe, c’est une aubaine de posséder un joueur pareil pour botter les coups francs. Casto est capable d’expédier une balle exactement à l’endroit où il l’a décidé. C’est presque du travail millimétré. Quand vous disposez d’un Casto et d’un autre bon tireur de coups francs, vous êtes redoutables sur chaque coup franc bien placé parce que les solutions sont nombreuses. Le gardien adverse ne sait jamais à quoi s’en tenir.

Casto a marqué une bonne trentaine de buts en plus de dix saisons en D1. Est-ce un bon ou un mauvais total ? Tout dépend de la façon dont on analyse les choses. A plusieurs périodes, il a été désigné comme tireur de coups francs de son équipe. A côté de cela, il a le plus souvent joué au back gauche, et on a rarement l’occasion d’être dangereux quand on évolue à ce poste. Il a été médian, mais c’était en tout début de carrière. Globalement, et compte tenu de la concurrence à laquelle il a dû faire face, je trouve que ses 32 buts représentent un bon total « .

Le Hainaut, par Jean-Paul Spaute

 » Si Casto n’a jamais franchi les frontières du Hainaut, cela ne m’étonne pas. C’est un casanier, un gars qui adore rester dans son terroir. Je suis sûr et certain qu’il avait assez de talent pour tenter une aventure à l’étranger. Sur un plan purement footballistique, il avait toutes les cartes en mains. Avait-il, par contre, assez de maturité pour s’imposer dans un environnement tout à fait différent ? C’est moins sûr. Il a toujours eu l’esprit d’un gamin. Le nombre de cartes jaunes et rouges qu’il continue à prendre veut dire beaucoup. Je le rencontre évidemment beaucoup moins souvent que quand nous étions tous les deux à Charleroi où je l’ai amené quand j’y étais président et qu’il avait 16 ans, mais j’ai vraiment l’impression que sa personnalité est toujours la même qu’il y a une quinzaine d’années. Il continue à faire sa petite connerie de temps en temps (il rit) mais c’est difficile de le lui reprocher.

Aurait-il dû tenter de s’expatrier quand il a décidé de quitter le Sporting ? La question ne s’est même pas posée à partir du moment où Mouscron lui a fait une proposition qu’il ne pouvait pas refuser. Je suis mitigé quand j’analyse le parcours qu’il a fait entre-temps. Je pense qu’il aurait pu mieux faire s’il avait été plus souvent été aligné dans l’entrejeu. Quand il jouait avec les jeunes de La Louvière, j’étais sous le charme de sa technique, de ses talents de distributeur et de sa vision du jeu. Ces qualités, il n’a fait que les perfectionner. Mais, en jouant derrière, il ne peut pas les exploiter suffisamment. Ses gestes défensifs manquent parfois de précision. En évoluant un cran plus haut, il aurait davantage mis ses atouts en valeur « .

 » Sale caractère mais sensible  » (Suray)

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