Si j’étais Vandereycken

En les faisant répondre à trois questions, on a demandé à onze ex- Diables Rouges vedettes ce qu’ils feraient à la place du coach actuel.

Il y a quelque années déjà, Gérard Lenormand s’adressait à la presse en chantant :  » Journaliste, pour ta première page, j’ai un titre formidable : la balade des gens heureux « . La vedette française s’imagina aussi en Président de la République avec Mickey Premier ministre, Simplet à la Culture, Tintin à la Police, Picsou aux Finances, Zorro à la Justice, Minnie à la Danse. En tout cas, avec lui, jamais plus un enfant n’aurait de pensées tristes. N’a-t-il pas un couplet pour gommer les réflexions sombres ou mélancoliques que suscitent les Diables Rouges ? Pluto dans la cage, Donald en défense, l’inventeur Géo à la construction, Dupond et Dupont sur les ailes, le capitaine Haddock à la barre, Rick Hochet à la finition.

Si j’étais Vandereycken : c’est le moment de faire jouer l’imagination à fond. La qualification pour l’Euro 2008 est rangée dans les greniers aux espoirs déçus depuis belle lurette. Mais, dans quel contexte faut-il inscrire le prochain Belgique-Serbie ? Cette rencontre doit-elle le point de départ d’une nouvelle levée ? N’est-il pas temps de se concentrer sur les Jeux Olympiques 2008 de Pékin et la campagne de qualification du Mondial 2010 ? Tout le monde se pose ces questions. La fourche des Diables Rouges ne fait plus peur à personne. C’est le regard embué que d’anciens Diables Rouges de haut vol assistent à la dissolution de tout ce qu’ils avaient construit au fil des décennies. Et s’ils pouvaient préparer Belgique-Serbie ?

Philippe Albert

Né le 10 août 1967 – Arrière – 41 sélections avec les Diables Rouges de 1987 à 1996 (Charleroi, FC Malines, Anderlecht, Newcastle)

Quels joueurs seraient dans votre sélection ?

J’ai été impressionné par la bonne tenue des Espoirs au cours de la phase finale de l’Euro 2007 qui a eu lieu en Hollande. C’est de la bonne matière et j’accentuerais leur présence en équipe nationale. Mais je n’oublierais pas de les entourer car il y un gros écart entre les A et les Espoirs. En fait, c’est simple : les meilleurs doivent jouer. N’oublions pas, cependant, que la Belgique pique du nez et devient un nain du football mondial. J’alignerais François Sterchele contre les Serbes mais, et je le dis comme je le pense, tout ce cinéma autour de lui me fait quand même un peu rigoler. Il y a 15 ans, cet attaquant n’aurait jamais occupé le haut du pavé en D1. A cette époque, il y avait d’autres calibres que lui. D’ailleurs, les joueurs actuels d’Anderlecht, du Standard ou de Bruges n’auraient jamais été retenus dans ces équipes du temps de leur splendeur. Et je ne fais pas d’exception : aucun. Actuellement, je ne vois pas de Jan Ceulemans, Enzo Scifo, Michel Preud’homme, Luc Nilis, Marc Wilmots, etc. Sterchele n’a encore rien prouvé sur la scène internationale. Malgré tout, les jeunes doivent avoir la priorité… et il faudra être patient.

Quel serait votre style de jeu ?

La messe est dite pour la qualification : l’Euro 2008 se déroulera sans nous. Moi, le ranking FIFA, je m’en fous. Nous sommes dans le trou, on ne peut pas chuter plus bas. Il faut offrir du plaisir aux spectateurs afin de retrouver leur confiance. Je préfère un 3-4 ou un 4-2 passionnant qu’un 0-0 aussi inutile qu’intéressant. Il faut attaquer et cela peut se faire en 4-4-2, en 5-3-2 ou en 4-3-3. La génération actuelle manque de leaders et même de culture tactique. Je ne souviens d’époques où nous varions les coups. Paul Van Himst a été très offensif en 5-3-2. Le talent ne sert à rien quand on a des difficultés à l’utiliser dans un concept donné : les Belges ne sont plus des maîtres tacticiens.

Que ne feriez-vous certainement pas ?

Il ne faudrait surtout pas se cacher car les Serbes comprendraient vite que la Belgique a le trouillomètre à zéro. Quand on porte le maillot de l’équipe nationale, on ne doit craindre personne : enfin, avant, il en allait ainsi…

Jan Ceulemans

Né le 28 février 1957 – Attaquant – 96 sélections de 1977 à 1991 (Lierse, Club Bruges)

Quels joueurs seraient dans votre sélection ?

Je continuerais à faire confiance aux joueurs actuels. L’équipe est déjà suffisamment jeune : à l’exception de Timmy Simons et de Daniel Van Buyten, ils ont tous moins de 25 ans. On ne peut pas rajeunir l’équipe indéfiniment : les meilleurs Espoirs ont déjà reçu leur chance chez les Diables Rouges. Il faut maintenant leur laisser le temps de mûrir et espérer que l’on récupérera les blessés. Lorsque tout le monde redeviendra disponible, on retrouvera plus de possibilités. Des joueurs comme Thomas Buffel et Vincent Kompany ont manqué à l’équipe.

Quel serait votre style de jeu ?

Cela dépend de l’adversaire. Je crois que tous les entraîneurs ont envie de jouer offensivement, mais si l’adversaire est plus fort que vous et vous enfonce dans votre moitié de terrain, on ne peut faire que défendre. La Belgique a obtenu ses meilleurs résultats en se basant sur une bonne défense et avec, devant, l’un ou l’autre attaquant capable de faire la différence. Il faut continuer à se baser sur ces valeurs traditionnelles.

Que ne feriez-vous certainement pas ?

Il ne faut surtout pas céder à la panique, c’est la plus grosse erreur que l’on pourrait commettre. Actuellement, on a tendance à faire porter au sélectionneur toute la responsabilité des échecs. Je trouve ces critiques à l’égard de René Vandereycken injustifiées. Lorsqu’on aura récupéré les blessés, on retrouvera une équipe capable de batailler pour une qualification. Il faut aussi éviter de sélectionner des joueurs qui sont réservistes à l’étranger. A force d’user leurs culottes sur le banc, ils perdent le rythme. Un Wesley Sonck en pleine possession de ses moyens doit toujours être sélectionné, mais combien de matches a-t-il joué à l’Ajax et à Mönchengladbach ? Le même raisonnement vaut pour Emile Mpenza. Maintenant, a-t-il encore envie de jouer pour les Diables Rouges ? C’est une autre question.

Nico Claesen

Né le 1er octobre 1962 – Attaquant – 36 sélections de 1983 à 1989 (FC Sérésien, Stuttgart, Standard, Tottenham, Antwerp)

Quels joueurs seraient dans votre sélection ?

J’opterais pour des joueurs susceptibles d’assurer une certaine continuité. Et donc, d’assurer une base à l’équipe nationale pour les trois ou quatre prochaines années. Il est important d’avoir une colonne vertébrale solide. Une bonne équipe doit reposer sur des bases solides, il faut donc construire depuis l’arrière. Dans les buts, j’ai toujours été un partisan de Frédéric Herpoel, un gardien à qui l’on n’a pas assez fait confiance. Défensivement, une paire Van Buyten-Simons me semble offrir les meilleures garanties. Je placerais plutôt Kompany dans l’entrejeu, il est trop laxiste pour jouer derrière.

Quel serait votre style de jeu ?

Jouer haut ou jouer bas ? Cela dépend de la valeur de l’adversaire. Si l’on affronte l’Italie ou l’Allemagne, il est logique que l’on prenne certaines précautions défensives et que le bloc se positionne plus bas sur le terrain. Mais, à domicile contre la Serbie, j’opterais pour un pressing plus haut. J’essaierais aussi d’utiliser au maximum les flancs. A gauche, j’opterais volontiers pour Tom Soetaers, toujours capable de déborder et d’adresser de bons centres. L’occupation du flanc droit est plus problématique, je ne vois pas d’emblée l’homme providentiel. Peut-être laisserais-je le flanc droit libre. Après tout, François Sterchele a souvent tendance à se déporter vers la droite.

Que ne feriez-vous certainement pas ?

Ce qu’il faut à tout prix éviter, c’est douter. Il faut, au contraire, garder la confiance, et faire en sorte que cette confiance se répercute à tous les niveaux : chez les joueurs, mais aussi au sein de la presse et des partenaires. Après tout, on n’a plus rien à perdre, et donc tout à gagner. Un élément comme Emile Mpenza est, précisément, susceptible de semer le doute. Viendra, viendra pas ? Jouera, jouera pas ? Ces atermoiements ne redorent pas le blason de l’équipe nationale. S’il n’est plus motivé, qu’il s’abstienne. Je ne le sélectionnerais plus.

Georges Grün

Né le 25 janvier 1962 – Arrière – 77 sélections de 1984 à 1995 (Anderlecht, Parme)

Quels joueurs seraient dans votre sélection ?

Je suis pour la poursuite de la politique de rajeunissement des cadres de l’équipe nationale. Je ne dis pas qu’il faut tout changer. Bien que, pourquoi pas ? Ceux qui ne seront plus dans le coup dans quatre ou cinq ans doivent être accompagnés vers la porte de sortie. A mon avis, les joueurs d’un certain standing et évoluant à l’étranger se méfient de ce qu’ils ont à perdre avec cette équipe nationale qui ne gagne plus. Chaque défaite entame leur crédit et ils préfèrent ne pas prendre trop de risques et se consacrer à leur club. Cette équipe belge n’a pas d’âme et c’est aux jeunes de reconstruire un esprit. Je ne suis pas un chaud partisan d’ Anthony Vanden Borre mais il a été très intéressant avec les Espoirs aux Pays-Bas. A mon avis, ce joueur a des potentialités. Sterchele serait aussi une de mes figures de proue. Il a du jus, de la volonté, du mental et, toutes proportions gardées, il me fait penser à Filippo Inzaghi. C’est le meilleur attaquant belge pour le moment. Les Diables Rouges ne peuvent pas se passer de lui. C’est déjà une richesse mais ce que je veux retrouver avant tout, c’est la fierté, la gagne, l’esprit genre  » pour gagner, il faudra me passer sur le corps « . Il faut agir vite car le pessimisme a tout gangrené.

Quel serait votre style de jeu ?

Je résumerai simplement mon point de vue : il faut d’abord miser sur deux attaquants. J’en ai soupé de cette équipe où les avants se muent tout de suite en médians, ne songent qu’à neutraliser leur adversaire direct. Chacun à sa place ! Quand un attaquant quitte son poste, le ballon revient plus vite et c’est bonjour la pression. Sans attaque digne de ce nom, ce n’est pas la peine. Un homme seul ne peut rien accomplir en pointe. Bien attaquer, c’est… défendre car on éloigne le danger.

Que ne feriez-vous certainement pas ?

Je ne bâtirais pas une ligne Maginot devant les Serbes. Si on les laisse s’installer devant notre gardien de but, cela n’ira pas. Or, les Diables Rouges ont besoin d’un bon résultat pour éloigner le pessimisme.

Georges Heylens

Né le 6 août 1941 – Arrière – 67 sélections de 1961 à 1973 (Anderlecht)

Quels joueurs seraient dans votre sélection ?

Quand on n’entretient pas bien son jardin, il est envahi par les herbes folles. Il faut alors faire de la place pour que les jeunes plantes respirent, voient la lumière et grandissent. La Belgique n’a plus rien à perdre. Elle doit miser sur ses jeunes et j’en alignerais le plus possible pour plusieurs raisons : avoir le feu sacré contre la Serbie, préparer les Jeux Olympiques, déjà envisager la campagne de qualification du prochain Mondial. Je bâtirais une colonne vertébrale LoganBailly-Simons- MarouaneFellainiStevenDefour-Sterchele- KevinMirallas. Fellaini est le seul véritable box to box et c’est un porte-avions. Mais il a besoin de relais, de techniciens autour de lui. Il faut ensuite entourer cet axe avec Van Buyten, Kompany, Karel Geraerts, etc.

Quel serait votre style de jeu ?

Je prônerais un 4-4-2 bien huilé avec une solide assise défensive mais surtout pas un quatre arrière composé uniquement de défenseurs centraux. Je l’ai déjà vu en équipe nationale et c’est une hérésie car un stopper n’est pas un back. Ce sont des spécialités très différentes l’une de l’autre. A deux sur les flancs, on multiplie ses atouts défensifs et surtout offensifs. Quand je coachais Lille, il m’est arrivé de surprendre Marseille sur son terrain car j’avais du monde au milieu et devant. Je ne voulais pas que mes arrières reculent trop bas. Il fallait que le centre de la bataille se situe dans leur camp. C’est plus une question de volonté et de philosophie que de talent. Attendre devant ses 16 mètres en espérant placer un contre, c’est dépassé et insuffisant.

Que ne feriez-vous certainement pas ?

J’éviterais de trop mettre la pression sur les joueurs. Ils ont besoin de dialogue, de compréhension et de liberté. Robert Waseige avait bien compris cela quand cela quand il prit la succession de Georges Leekens. L’équipe belge était en crise mais, quelques jours plus tard, elle a épaté tout le monde à Rotterdam en y signant un magnifique 5-5. Et comment avaient joué les Belges ? Tellement offensivement que les Hollandais en furent babas. Il faut tenter le même coup contre les Serbes. Ce sont des artistes et, moi, je les presserais dans leur camp. Est-ce que Vandereycken est assez audacieux pour tenter cela ? Non, hélas, et on aurait dû le remplacer. On ne peut pas gagner un match sans attaquer : la Belgique est bien placée pour le savoir.

Walter Meeuws

Né le 11 juillet 1951 – Arrière – 46 sélections de 1977 à 1984 (Beerschot, Club Bruges, Standard)

Quels joueurs seraient dans votre sélection ?

Le moment est peut-être venu d’introduire du sang frais. Les circonstances s’y prêtent, puisque les prochains matches se joueront pour l’honneur. Il faut aussi sélectionner les hommes en forme. Devant, je jouerais la carte Sterchele. Mais je l’alignerais en pointe, pas sur le flanc gauche. Avec MoussaDembele qui tourne autour de lui. Le retour de Kompany devrait faire du bien à la défense. Mais il serait temps d’offrir une chance à Bailly dans les buts. En pointe, Mirallas mériterait aussi une chance. Il est devenu titulaire à Lille, et un joueur de Ligue 1 peut prétendre à l’équipe nationale. Si SébastienPocognoli est titulaire à l’AZ, on pourrait aussi le lancer.

Quel serait votre style de jeu ?

Il faut se reposer sur une bonne organisation, mais aussi veiller à une reconversion offensive rapide. En tout cas, lorsqu’on rencontre des équipes comme le Kazakhstan, l’Azerbaïdjan ou l’Arménie, il faut jouer à fond pour la victoire. Il ne me semble pas que cela a toujours été le cas, notamment lorsqu’on a affronté le Kazakhstan à domicile. Personnellement, je verrais d’un bon £il l’adoption d’un visage plus offensif.

Que ne feriez-vous certainement pas ?

Je n’attendrais pas trop longtemps avant de procéder à un rajeunissement de l’équipe. On ne se qualifiera tout de même pas pour l’Euro 2008, alors pourquoi s’entêter ? L’important est que l’équipe soit prête en septembre 2008, lorsqu’on abordera les qualifications pour la Coupe du Monde 2010. Les six matches à venir sont l’occasion idéale pour aguerrir la nouvelle génération, mettre un système en place et peaufiner les automatismes.

Jean Nicolay

Né le 27 décembre 1937 – Gardien de but – 39 sélections de 1959 à 1967 (Standard)

Quels joueurs seraient dans votre sélection ?

Il y a deux postes auxquels j’accorderai une grande importance : gardien de but et médian défensif. Tout le monde le dit : la Belgique a toujours été une terre de portiers. C’était une  » spécialité régionale  » qui nous a permis de poser la première pierre de belles équipes nationales. Stijn Stijnen ne prolonge pas cette tradition. Il n’a pas le niveau et je le vois commettre des bourdes et des approximations techniques à chaque match de son club ou de l’équipe nationale. A quoi sert-il de signer des miracles après une gaffe ? C’est la question que je le pose à propos du Brugeois. Je ferais confiance à Bailly, jeune mais prometteur. Au centre de la pelouse, il faut structurer la ligne médiane autour de Fellaini. Moi, il me fait penser à Louis Pilot qui durant les années ’60 et ’70 fut le brise-lames du Standard. Quand on a un mec comme celui-là, il est plus facile d’être… offensif.

Quel serait votre style de jeu ?

La Belgique n’a pas le choix et doit redorer son blason. Cela passe par une victoire. Le public sait que c’est plié pour l’Euro 2008. Alors, il exige une victoire, une attitude, la preuve que le groupe progresse. Pour le moment, je ne vois pas d’organisation, de ligne de conduite. Il faudra jouer haut, imposer notre présence (donc pression) dans le camp adverse. Les Serbes sont des techniciens qui jouent en plusieurs touches de balle. Ils seront étonnés de voir que les Diables Rouges viennent les chercher dans leur partie de terrain. Il faut évoluer en 4-3-3 car c’est la seule façon d’être offensif sur toute la largeur du terrain. Le 4-4-2 n’est pas mal mais les deux attaquants sont souvent trop centraux, les couloirs viennent de plus loin et l’adversaire dispose de plus de temps pour les contenir.

Que ne feriez-vous certainement pas ?

La Serbie a des artistes. Mais je n’en ferais pas une maladie. Il faut jouer en pensant à nous, pas à eux. Reculer, c’est déjà un peu… perdre. On ne doit pas douter des jeunes. C’est notre avenir et je ne sais pas si Vandereycken pense surtout aux jeunes : Jean-François de Sart oui.

Michel Renquin

Né le 3 novembre 1953 – Arrière – 55 sélections de 1976 à 1986 (Standard, Anderlecht, Servette Genève)

Quels joueurs seraient dans votre sélection ?

On ne peut pas passer à côté du phénomène Sterchele. Il peut déclencher quelque chose, mettre le feu. A mon avis, c’est la mentalité qui cloche en équipe nationale. Il faut de la foi et du positif coulés dans un système qui doit correspondre aux qualités de l’effectif. L’attaquant brugeois n’a pas besoin de mille occasions pour déposer un ballon dans les filets. Avec lui, pas de jérémiades et de comportements d’enfant gâté. Deux autres joueurs sont animés par la même mentalité : Fellaini et Geraerts. C’est avec des gars comme eux qu’on peut aller à la guerre. Il faut rajeunir l’effectif. Jean-François de Sart abat du bon boulot. On paye pour le moment 50 ans d’immobilisme. A mon époque, il y a des générations spontanées de bons joueurs. Quand je suis passé de Wibrin au Standard, je ne m’étais jamais entraîné. La Belgique a vécu sur ces récoltes miraculeuses. On n’a rien fait pour les jeunes durant des décennies. En Suisse, j’ai participé à la mise en place d’une nouvelle politique de jeunes. Il y avait un plan à long terme et les jeunes dont je m’occupais ont presque tous percés.

Quel serait votre style de jeu ?

Je serais offensif. Avec Emile, on ne l’était plus. Il était absent, on bricolait en l’attendant. Il y a longtemps qu’on aurait dû faire une croix sur lui. Je l’aurais oublié à vie car il n’a pas l’esprit Diable Rouge. Toutes les occupations de terrain peuvent être offensives si on orchestre bien les mouvements. J’en reviens à l’essentiel : il faut que la mentalité du groupe soit à la hauteur.

Que ne feriez-vous certainement pas ?

Il ne faut pas jouer avec la peur de perdre. L’équipe doit être confiante et prendre du plaisir. Je ne parlerais plus de l’Euro 2008. C’est négatif. Non, il faut placer le match contre la Serbie dans un autre contexte : celui de la préparation des Jeux Olympiques et du prochain Mondial. On ne doit plus tartiner avec l’Euro 2008 : il y a longtemps que c’est fini. Un succès et des progrès, voilà ce que j’attends.

Paul Van Himst

Né le 2 octobre 1943 – Attaquant/Médian – 81 sélections de 1960 à 1974 (Anderlecht)

Quels joueurs seraient dans votre sélection ?

Je crois qu’il faut malgré tout garder une base de quatre ou cinq anciens qui ont l’expérience. Je songe à Van Buyten, à Simons et même à Kompany que j’inclus parmi les joueurs expérimentés bien qu’il soit encore très jeune. Avec cette base-là, on peut se permettre de lancer des jeunes. L’Euro des -21 ans a démontré qu’il y avait du talent en Belgique. Nicolas Lombaerts a les moyens de percer, surtout s’il s’impose à Saint-Pétersbourg. TomDe Mul, au contact de la Liga, devrait aussi s’épanouir. J’en oublie, beaucoup de jeunes joueurs ont du potentiel. Il y a en tout cas suffisamment de talent pour redémarrer. Si cela prend, le moteur pourrait rapidement carburer.

Quel serait votre style de jeu ?

Le système de jeu, à mes yeux, passe au second plan. Je ne dis pas que la tactique est sans importance, car on doit effectivement pouvoir se reposer sur une bonne organisation, mais le football est aussi un jeu d’inspiration, où il faut laisser le talent s’exprimer. La classe naturelle finit toujours par faire la différence. Il faut, un moment, desserrer le frein à main et offrir aux joueurs la possibilité de donner libre cours à leur tempérament.

Que ne feriez-vous certainement pas ?

L’erreur à ne pas commettre serait de vivre en permanence avec le stress. L’obligation d’obtenir un résultat ne devrait plus avoir sa raison d’être, puisqu’on est de toute façon éliminé. Jouons donc libérés, n’enfermons pas les joueurs dans des schémas tactiques trop rigides et laissons-les s’exprimer. Défaisons-nous de ces appréhensions qui ont toujours tendance à nous tenailler. Allons-y franchement, osons, en sachant que c’est aussi en commettant des erreurs que l’on apprend.

Wilfried Van Moer

Né le 1 mars 1945 – Médian – 57 sélections de 1966 à 1982 (Antwerp, Standard, Beringen, Beveren)

Quels joueurs seraient dans votre sélection ?

Il y a beaucoup de jeunes talents en Belgique, on en a encore eu la preuve lors du dernier Championnat d’Europe Espoirs. Ils méritent de recevoir leur chance chez les Diables Rouges. Certains l’ont déjà eue, comme Defour et Fellaini, mais je songe aussi à Axel Witsel, à Mirallas et à Lombaerts. Il faudra témoigner de patience à leur égard. On ne peut pas attendre directement monts et merveilles de leur part. Le problème, c’est qu’il n’y a plus suffisamment de joueurs d’expérience pour les entourer. On ne trouve plus, actuellement, des leaders comme l’étaient Wilmots ou Gert Verheyen, capables d’emmener ces jeunes dans leur sillage.

Quel serait votre style de jeu ?

Les options tactiques, je les laisse à Vandereycken. C’est à lui qu’il appartient de décider comment il faut jouer, en fonction des joueurs dont il dispose, de la qualité de l’adversaire, des objectifs à atteindre : faut-il gagner ou pas ? En principe, il faut toujours jouer pour gagner, mais ce n’est pas aussi simple. Certains trouvent que l’équipe nationale se montre trop défensive, mais ne comptez pas sur moi pour émettre une critique à cet égard.

Que ne feriez-vous certainement pas ?

La faute à ne pas commettre, serait de vouloir précipiter les événements et de viser le trop court terme. Je le répète : la patience est le maître mot. Mais je conçois que c’est difficile à réaliser : il faut toujours obtenir des résultats, car chaque grand tournoi manqué est une catastrophe financière pour la fédération. Concilier la maturation des jeunes talents avec l’obligation d’obtenir des résultats : là est toute la difficulté.

Gert Verheyen

Né le 20 septembre 1970 – Attaquant/Médian – 57 sélections de 1994 à 2002 (Club Bruges)

Quels joueurs seraient dans votre sélection ?

Je trouve que, lors des derniers matches, l’équipe nationale était déjà très jeune. On doit, certes, laisser la porte ouverte à de nouveaux talents, mais les jeunes les plus talentueux ont déjà été sélectionnés. Ce n’est pas tout d’avoir des qualités techniques, il faut aussi avoir la maturité suffisante. Des joueurs comme Fellaini et Defour sont déjà très mûrs pour leur âge, ils ont mérité leur sélection. Néanmoins, ils doivent aussi être entourés par des joueurs d’expérience.

Quel serait votre style de jeu ?

Il faut jouer chaque match pour le gagner. Mais cela peut se faire en 4-4-2, un 4-3-3 ou un 4-5-1 : c’est l’intention qui compte. Jouer défensivement ou offensivement ? En football, ce n’est pas blanc ou noir. Il y a les deux : il faut attaquer quand on peut, défendre quand on doit. Il faut surtout gagner des duels. Le football est devenu très physique : même au Kazakhstan, ils ont des joueurs physiquement affûtés.

Que ne feriez-vous certainement pas ?

Faire passer en bloc l’équipe Espoirs vers l’équipe A, c’est une chose que j’éviterais. On ne doit pas introduire, d’un coup, dix ou quinze nouveaux joueurs. Le rajeunissement doit se faire progressivement, il faut garder une base et ne pas tout chambouler. On ne peut pas aller à la guerre avec une équipe qui a 20 ans de moyenne d’âge.

par pierre bilic et daniel devos – photos : reporters

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