RED DEVIL ?

En deux bouts de matches officiels, Adnan Januzaj a rendu fou la Premier League. A seulement 18 ans, le Red Devil pourrait bientôt devenir Diable Rouge. A moins que l’Albanie…

19 mai dernier, West Bromwich accueille Manchester United pour un match qui restera dans les annales comme la dernière apparition de Sir Alex Ferguson à la tête de son club fétiche. A quelques mètres du manager écossais, un jeune gamin de 18 ans prend place, lui, pour la première fois sur le petit banc des Red Devils : Adnan Januzaj.

Bruxellois d’origine albanaise, Adnan fait ses débuts au Brussels avant de taper dans l’oeil des recruteurs du Sporting Anderlecht qu’il rejoint à l’âge de 10 ans. D’emblée, les responsables mauves se rendent compte qu’ils tiennent là une véritable pépite comme en témoigne Jean Kindermans, directeur du centre de formation de Neerpede au micro de Vivacité :  » C’était un petit bonhomme très frêle avec de toutes petites jambes mais qui avait déjà à ce moment-là un pied gauche phénoménal, une couverture de balle, un passing… On l’a toujours surclassé, fait jouer une catégorie plus haut que son âge. C’est un garçon qui n’est jamais par terre, qui est solide sur ses jambes et son premier contrôle, sa couverture de balle lui permettait de toujours se retrouver dans une situation de confort pour engager la frappe, la passe ou le dribble.  »

Des qualités qui n’échappent pas aux scouts des plus grands cercles européens qui, très rapidement, lui font la cour. Malgré la promesse des dirigeants mauves de lui faire intégrer le noyau A dès la saison 2012-2013, le clan Januzaj opte finalement pour Manchester United qui dépense près de deux fois le montant de l’indemnité de formation prévu (345.000 euros) en mars 2011, soit un mois après que le Belgo-Albanais ait fêté ses 16 ans. Un choix audacieux qui n’a pas toujours porté chance aux jeunes Belges partis trop tôt. Pourtant, dans ce cas-ci, le passage outre-Manche s’assimile jusqu’à présent à une pleine réussite : le gaucher étale rapidement sa classe sur les terrains anglais dans l’équipe U18 de Paul McGuiness. S’il est freiné par une blessure la saison dernière et ne dispute que 18 matches de championnat dans l’équipe réserve de Warren Joyce, il est néanmoins un joueur-clé de l’équipe championne U21. Tantôt meneur de jeu, tantôt ailier gauche, il se charge de tous les coups de pied arrêtés et à l’issue de la saison est élu meilleur espoir mancunien de l’année devant un autre Belge, Marnick Vermijl.

Dans les petits papiers de Moyes

Tout cela n’échappe bien évidemment pas à David Moyes, arrivé d’Everton, pour remplacer la légende Ferguson. Le technicien écossais l’intègre immédiatement au noyau A et l’emmène dans ses bagages lors de la lucrative tournée en Asie. Pas impressionné pour un sou, Januzaj en met plein la vue aux suiveurs anglais et inscrit même son premier but lors d’un match à Hong Kong face à Kitchee.  » Vu l’absence de transfert à cette période, les jeunes repris par Moyes étaient la principale attraction de la pré-saison « , estime Nooruddean Choudry, journaliste au Daily Mail.  » Januzaj a été éblouissant. Autant Wilfried Zaha ou Jesse Lingard semblaient vouloir attirer le regard à chaque possession de balle, autant il semblait sûr de ce qu’il faisait. Pas de l’arrogance, juste le genre de joueur confiant qui sait ce qu’il vaut. Il s’impose naturellement, sans trop en faire et s’il me fait penser à Johan Cruijff au niveau du look, je le comparerais à Brian Laudrup au niveau de l’élégance. C’est vraiment un mec qui est beau à voir jouer « .

Début août, il fête sa première apparition en match officiel lors du Community Shield face à Wigan. Entré à 10 minutes de la fin de la rencontre à la place de Dany Welbeck dans un stade de Wembley plein comme un oeuf, il inscrit à 18 ans, une première ligne à son palmarès.

Mais le début de championnat de ManU est compliqué : après une victoire à Swansea, les Red Devils ne font mieux qu’un 0-0 contre Chelsea puis s’inclinent même face à Liverpool. Pas l’idéal pour lancer un jeune dans la bataille et Januzaj doit donc patienter jusqu’à la quatrième journée contre Crystal Palace pour faire ses grands débuts en Premier League. Et quels débuts !

Débuts en fanfare

Quatre minutes après l’entrée au jeu de Marouane Fellaini, Januzaj devient le douzième Belge à fouler les pelouses de Premier League cette saison. Posté sur le flanc gauche en lieu et place d’Ashley Young, il démontre en 25 minutes toute l’étendue de son talent.  » Il a été plus dangereux que Young durant tout le reste de la rencontre « , juge Ian Herbert, journaliste pour The Independent.  » Son jeu est rafraîchissant. Il dispose d’énormément de facilités techniques et n’a pas peur de prendre ses responsabilités en tirant directement certaines phases arrêtées. Il a offert deux passes magistrales qui auraient pu se transformer en but et a provoqué le coup-franc qui a permis à Wayne Rooney de faire 2-0 « . De fait les chiffres ne mentent pas. Januzaj a réussi 90 % de ses 20 passes face à Crystal Palace et la presse anglaise n’a pas manqué de souligner qu’il avait fait sa première apparition en Premier League, 50 ans jour pour jour après celle d’un certain George Best, à qui les plus pressés le comparent déjà.

Si chez nous, notre chroniqueur, Marc Degryse, le compare à Robbie Rensenbrink, ça n’en fait pas pour autant un joueur old school. Jamais avare de compliment, la presse britannique l’a en effet déjà comparé pêle-mêle à David Beckham, Ryan Giggs, Cristiano Ronaldo, Kakà ou encore Mesut Özil.  » Il n’est pas rapide mais il réfléchit trois fois plus vite que les autres « , assure Kindermans.

L’heure des choix

Malgré ce concert de louanges, le Belgo-Albanais va bientôt se retrouver face à des choix cruciaux pour la suite de sa carrière. En fin de contrat à Old Trafford en juin prochain, le prodige n’a toujours pas resigné à ManU malgré des négociations entamées déjà en avril dernier. La possibilité évoquée d’un prêt à Blackburn Rovers, en Championship, ne serait pas du goût de l’entourage du jeune homme qui l’estime d’ores et déjà prêt à grappiller du temps de jeu à Manchester. Une situation délicate qui n’a pas échappé aux voisins de City qui se feraient une joie de faire la nique à United en débauchant son jeune talent. Mais ManU ne veut absolument pas revivre le cas Paul Pogba, parti à la Juventus dans des circonstances similaires. Moyes est optimiste quant aux chances de voir un accord aboutir et les récentes prestations de Januzaj jouent en sa faveur.

Autre dilemme qui attend le clan Januzaj, le choix de la sélection nationale. Jamais jusqu’à présent, le numéro 44 mancunien n’a honoré la moindre sélection pour l’Albanie ou la Belgique, pas même chez les jeunes. Sur les réseaux sociaux, les supporters des deux camps multiplient les campagnes de séduction à son égard mais il se murmure que Januzaj ne ferait son choix définitif qu’une fois titulaire à Manchester. Marc Wilmots compte s’entretenir de la situation avec le joueur prochainement. Espérons que Willy sera convaincant. ?

PAR JULES MONNIER – PHOTO: IMAGEGLOBE

Januzaj a effectué sa première apparition en Premier League, 50 ans jour pour jour après celle d’un certain George Best à qui on le compare déjà.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire