« Problème à la relance »

A sa grande surprise, le gardien serbe a entamé la saison sur le banc. Il est redevenu numéro un au moment où il commençait à s’énerver. Le Club a-t-il un problème de gardiens ? Trois avis.

G eert De Vlieger, un des prédécesseurs de Bojan Jorgacevic (30 ans) au Club :  » Blessé pendant la préparation, il a dû attendre son heure. Il a semblé surpris mais c’est la différence entre Gand et Bruges. A Gand, vous rejouez dès que vous êtes guéri. Au Club, si votre remplaçant a été bon, on ne le renvoie pas sur le banc d’emblée. Si Kujovic a été remplacé, après Copenhague et Malines, ce n’est pas parce qu’il jouait mal mais parce que le Club avait galvaudé son avantage à cinq reprises et ne gagnait pas.

Jorgacevic a-t-il le niveau requis pour un grand club belge ? Oui mais il a un point faible, la relance, un aspect sur lequel se focalise précisément un grand club. Tous les gardiens ne peuvent jouer des deux pieds avec un égal bonheur et ils sont avant tout là pour attraper le ballon mais quand même, de là à ne pas bien gérer des ballons faciles… Cela entame sa confiance. Les défenseurs apprécient de pouvoir passer le ballon à leur gardien. A ce niveau, il y a aussi plus d’espaces à couvrir dans le dos de la défense. Un arrière doit pouvoir se fier à son gardien. Ceci dit, c’est une question d’entraînement et il peut progresser.

Bojan est arrivé tard parmi l’élite, ce qui n’est pas un avantage. Proto n’a pas été immédiatement titularisé à Anderlecht : il a eu besoin de temps. Bojan s’est mis trop de pression. Pourquoi certains bons joueurs du subtop ne réussissent-ils pas un cran au-dessus ? Parce qu’ils ne savent pas gérer cette pression. S’ils ne se l’infligent pas, le monde extérieur s’en charge. Il est normal de s’emparer d’un bon ballon mais tout le monde voit que vous relancez mal. Tout est analysé, grossi.  »

Lettres et ennuis de supporters de Gand

Dejan Vjelkovic, son manager :  » Il s’est gravement blessé à la cheville lors du match de préparation à Courtrai, en juillet, et il a repris trop tôt. Il n’était pas à 100 % contre Getafe. Georges Leekens lui a conseillé de se consacrer à sa revalidation pendant dix jours, le temps d’être guéri – avant Copenhague. Il est revenu dans l’équipe contre le Beerschot et a bien joué. Vincent Mannaert, auquel j’ai téléphoné concernant un autre sujet, vient encore de me dire en passant qu’il était très content de Bojan, sous contrat pour quatre ans encore.

Je suis aussi le manager de Kujovic. Disons que ce sont deux de mes enfants… A mes yeux, c’est clair : Vladan a signé comme deuxième gardien et doit être prêt quand le numéro un est blessé, suspendu ou que l’entraîneur a besoin de lui pour améliorer le niveau de jeu. Il est arrivé avant Bojan mais cela ne change rien : Bojan est le numéro un.

Au début, son passage de Gand au Club l’a perturbé car les deux clubs sont rivaux. Il habitait encore Wetteren et y rencontrait des supporters de Gand. On lui a envoyé des lettres, on l’a ennuyé à la porte de l’école de sa petite fille… Il a maintenant déménagé à la Côte, où il croise surtout des supporters brugeois…

Sa relance ? Qui s’en plaint ? La presse. Pas les entraîneurs, à ma connaissance. Bojan est bon de la tête et des mains mais s’il avait eu un jeu de pieds à l’avenant, il serait devenu médian. Ni Van de Walle ni Munaron ne se sont plaints.  »

L’arrivée de Van de Walle pour le faire progresser

Wim De Coninck, ex-gardien :  » Sa renommée s’appuie toujours sur ses performances à Gand. Il joue derrière une défense qui évolue haut et ce n’est pas son point fort. Pour être vraiment respecté, il doit gagner un grand match. Il est quand même bizarre que le Club ne l’ait pas mis sur sa liste européenne après l’hiver dernier.

Les supporters de Gand l’appréciaient pour ses qualités, même si j’ai eu l’impression que Gand ne le regrettait pas vraiment. Il s’est blessé au genou contre le Beerschot et il lui a fallu du temps pour revenir : il était plutôt à 60 ou 70 % de ses moyens qu’à 100 %, ce qui est ennuyeux pour un panzer, qui s’appuie sur son physique.

Les fans adoraient ses rituels, son écharpe, la façon dont il fêtait un but. Ils ne lui ont pas pardonné de s’être mué aussi vite en Brugeois. Je pense qu’il aurait également préféré un autre club car n’oubliez pas qu’il était alors international et que tous les Serbes évoluent dans des championnats plus relevés. C’était son rêve.

On l’a oublié mais il est arrivé à Gand comme numéro deux. Il a énormément progressé dans l’ombre. C’est un brillant gardien de ligne, fort dans les duels. Sans être un bodybuilder, il est costaud, a de bonnes mains, un bon rapport force-vitesse mais un gros défaut, la relance. Même s’il y a travaillé d’arrache-pied, il n’a pas changé la perception que nous en avons, ce qui doit l’agacer, à la longue. Sa relance des mains est meilleure mais il est parfois mauvais sur les ballons qui roulent, par exemple. On peut travailler ce point chaque jour mais il ne faut pas non plus trop insister, sous peine d’entamer son moral. Il est un peu victime du fait qu’il a toujours un entraîneur des gardiens pour le travail spécifique. Il devrait pouvoir participer au jeu de position, dans un match à huit contre huit. Les meilleurs à la relance sont ceux qui, jeunes, ont longtemps hésité entre le champ et le but. Or, je ne crois pas que Bojan ait hésité longtemps. A voir ses réflexes, sa vitesse… un bon gardien de but. Peu de joueurs entrent en duel contre ce bloc de granit. Il a l’air petit et costaud mais c’est trompeur : il mesure quand même 1m86.

Le remplacement de Verlinden par Van de Walle au poste d’entraîneur des gardiens est sans doute lié à Bojan : est-ce susceptible de le faire progresser ? Van de Walle y parvient avec tous ses gardiens. Il en a déjà entraîné beaucoup et on constate qu’ils livrent de belles saisons. Je pense notamment à Verbauwhede.  »

PETER T’KINT – PHOTOs: IMAGEGLOBE

 » Peu de joueurs entrent en duel contre ce bloc de granit. « 

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