Par Mons & par vaux

En 2002-2003, Mons bouclait sa première saison en D1. Comment a évolué le club pendant cette décennie ?

Il y a dix ans, le RAEC Mons finissait en roue libre sa découverte de la D1. Des étoiles plein les yeux, les supporters montois avaient assisté, dans leur petit stade désuet du Tondreau, à la chute du Standard de Liège, pourtant l’idole de la région montoise, battu 2-1. Ils avaient acclamé la résurrection de Cédric Roussel, sacré cette saison-là meilleur buteur, s’étaient enthousiasmés sur les centres millimétrés de Jean-Pierre Laplaca et avaient poussé les produits du cru nommés Olivier Berquemanne ou Thadée Gorniak.

En dix ans, l’Albert a bien changé. Il a commis quelques erreurs aussi, lui valant notamment deux relégations. Aujourd’hui, ce club qui était parvenu plutôt que prévu en D1, est méconnaissable. Ses débuts euphoriques, suivis ensuite par des événements chaotiques, ont fait place à un ronronnement et une stabilité bienvenue. En dix ans, Mons est devenu une valeur sûre de la D1, même si son budget toujours minime et son stade ne le laissent pas trop percevoir. Sport/Foot Magazine a analysé l’évolution du club sur cette décade.

Les installations

Lors de ses débuts en D1, le stade Tondreau ressemblait davantage à un stade de D3 qu’à une enceinte de D1. La presse occupait la tribune de l’avenue du tir, jugée aujourd’hui obsolète et interdite aux supporters. Quand il pleuvait, cela coulait à travers le toit pour arriver dans les bureaux situés en dessous de cette tribune. Pourtant, ce stade désuet ne manquait pas d’atouts lors de la première saison en D1.

 » La particularité du terrain jouait en notre faveur car les équipes qui venaient à Mons se demandaient où elles débarquaient « , expliquait l’entraîneur de la première saison en D1, Marc Grosjean dans le livre L’irrésistible ascension de l’Albert des journalistes Julien Flament et Jérémie Ulens.  » Le terrain était petit et légèrement pentu, il n’y avait pas de tribunes et certains nous ont pris de haut.  »

Pour s’entraîner, l’Albert filait à Havré, dans les installations provinciales de PHASE sur des terrains trop petits.  » Nous avions vingt minutes de bus pour aller à l’entraînement « , ajoute Cédric Roussel.  » Le midi, nous n’avions pas d’endroit pour manger et il fallait donc aller en ville pour dîner.  »

En dix ans, Mons a construit deux tribunes modernes, la première en 2004 et la seconde quelques années plus tard. Mons s’est également doté de terrains juste derrière le stade (les joueurs peuvent ainsi utiliser des vestiaires sur place) et d’un terrain synthétique.  » Nous avons décidé de réduire le nombre de jeunes de 500 à 270 car nous ne disposions pas assez de terrains pour tout le monde « , explique Alain Lommers.  » Et malgré cela, on doit encore louer certains terrains à l’ADEPS ou envoyer nos jeunes à PHASE pour laisser les terrains derrière le stade se reposer. L’idéal serait de trouver un lieu pour un centre de formation où évolueraient toutes nos équipes de jeunes. Les terrains derrière le stade seraient alors réservés à l’équipe première.  »

Si c’est le jour et la nuit entre 2003 et 2013, l’Albert veut encore aller plus loin et met la pression sur les instances politiques pour finir le stade. Les deux vieilles tribunes tombent en ruine et la sonnette d’alarme a été tirée il y a quelques mois pour au moins effectuer quelques travaux, afin que le RAEC puisse obtenir sa licence. Les pourtours du stade doivent également subir un sérieux lifting. Par contre, les conditions d’entraînement sont enfin dignes d’un club de D1.

 » Avant de monter en D1, le président Dominique Leone avait déjà posé la question du stade en se demandant s’il était adéquat de monter sans nouveau stade « , explique Alain Lommers.  » Avec le recul, on ne peut que lui donner raison. Dix ans plus tard, le stade n’est pas encore terminé et ce dossier s’apparente à un chemin de croix. Lors de chaque saison en D1, nous n’avons pu compter que sur trois des quatre tribunes, soit parce qu’une était en travaux, soit parce qu’une autre était jugée obsolète. On peut se demander, même s’il ne s’agit pas de l’unique raison, si ce manque à gagner n’est pas à l’origine de nos deux descentes. Un budget a enfin été dégagé par la ville de Mons pour l’érection d’une nouvelle tribune, côté avenue du tir, dotée de 3.000 places et de loges. Il faut finaliser les plans, rendre un projet pour bénéficier de subsides de la Région et faire les appels d’offres mais si ce dossier s’accélère, j’espère pouvoir débuter les travaux, fin 2013.  »

Le noyau et l’orientation sportive

En dix ans, il a évidemment bien changé. En 2002-2003, lors de la première saison de l’Albert en D1, Mons présentait un visage très régional avec des Olivier Suray, Thaddée Gorniak, Dieudonné Londo,CédricRousselou Olivier Berquemannemême si la montée avait fait deux victimes (Vincent Thoelen et Dimitri Mercier, 35 ans de présence au RAEC Mons à eux deux et sacrifiés aux portes de la D1).

Par la suite, le passage de Sergio Brio a, une première fois, changé le visage de Mons, devenu un vrai hall de gare, avec toute une série de joueurs issus des divisions inférieures italiennes parmi lesquelles quelques joueurs transalpins comme Roberto Mirri ou Alberto Malusci, amenés par l’éminence grise de Brio, l’agent Giocondo Martorelli. C’est la période la plus noire de l’Albert et les mercatos les plus catastrophiques. Les échecs cuisants se succèdent et conduisent Mons à sa première relégation et à une perte d’identité.

Plus jamais l’Albert ne connaîtra un ancrage régional dans son noyau. Sans doute faut-il vivre avec son temps mais les supporters montois n’ont jamais digéré le passage de Brio. L’affluence a baissé, ne retrouvant plus jamais le niveau de la première saison en D1.

Suivant l’exemple de Charleroi, Mons décide par la suite d’exploiter le filon des divisions inférieures françaises. Arrivent les Wilfried Dalmat, Benjamin Nicaise, Hocine Ragued, Cédric Berthelin ou Frédéric Jay. Tous des réussites.

Néanmoins, le vestiaire est composé de fortes têtes et cela n’empêche pas l’Albert de vivre sa deuxième descente en 2010. L’arrivée de Dimitri Mbuyu en 2009 correspondra au dernier virage du RAEC. Désormais, le club préfère miser sur des éléments qui connaissent très bien le championnat belge et des travailleurs. Arrivent quelques joueurs flamands comme Tom Van Imschoot ou Tim Matthys ainsi que des éléments avides de revanche ou de nouvelles aventures (Pieterjan Monteyne ou Shlomi Arbitman). Cette politique avisée a permis à Mons, jusqu’à présent, de se stabiliser.  » On a procédé à un nettoyage car au moment de notre deuxième relégation, le vestiaire devenait ingérable « , explique le directeur technique de Mons, Dimitri Mbuyu.  » Je prends des joueurs que je connais. J’étudie à fond le profil du joueur et j’essaye de trouver des clubmen, des gens fidèles et qui possèdent des valeurs. C’est primordial dans notre recrutement.  » Le défenseur Grégory Lorenzi correspond à cette étiquette.

Les dirigeants

De débuts chaotiques en stabilité apaisante, voilà comment on pourrait résumer les dix dernières années. Après une première saison euphorique (il faut se souvenir que Leone n’était arrivé à la présidence qu’un an auparavant), les dirigeants montois se sont ridiculisés dans la gestion de la période Brio. Leone, qui s’était déjà séparé du manager Jean-Claude Verbist et de son entraîneur Marc Grosjean entre autres parce qu’ils étaient devenus trop indépendants, a pourtant laissé carte-blanche à Brio, dénué de toute expérience d’entraîneur, et de son agent, Martorelli. Ceux-ci vont jouer avec l’avenir du club. Leone s’en rendra compte trop tard, rappelant le vieux serviteur Geo Van Pyperzeele pour éviter une première culbute.  » Je suis arrivé en septembre 2003 avec une idée bien précise  » se remémore Alain Lommers. Un mois après mon arrivée, je me suis rendu compte que certains secteurs étaient mal gérés et il a fallu licencier quelques personnes. Par la suite, il a fallu trouver d’autres points de repères pour contourner ce milieu du football très bizarre, et ces gens qui rodaient autour du club pour essayer de se faire de l’argent sur son dos. On a évacué ces gens-là petit à petit.  »

Les erreurs semblaient avoir été tirées avec l’arrivée de Riga et la remontée immédiate. Mais après deux saisons calmes, des dissensions allaient encore éclater entre Jean-Pol Colonval et Alain Lommers. La deuxième descente servira véritablement de révélateur à Dominique Leone, qui se fera de plus en plus discret dans les médias (à une époque, ses propos remettaient souvent de l’huile sur le feu au lieu d’éteindre l’incendie) et ne prêtera plus une oreille attentive à la première personne venue.

Depuis lors, tant le staff technique (Enzo Scifo travaille sans faire de vagues) que la direction (avec le triumvirat Leone-Lommers-Mbuyu) où chacun reste à sa place, ont trouvé leur rythme de croisière. Mons s’est apaisé avec le temps et a trouvé une stabilité qui lui permet de bien travailler et de grandir année après année.  » Désormais, on a des gens compétents dans notre structure « , conclut Lommers.  » Je ne peux pas dire qu’on ne fera plus d’erreurs mais depuis quatre ans, on travaille calmement et on a une équipe qui fonctionne, sans se la péter.  »

PAR STÉPHANE VANDE VELDE – PHOTO: IMAGEGLOBE

En 2002, l’eau de pluie s’infiltrait encore dans les bureaux du club.

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