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NBA: à quoi s’attendre pour cette nouvelle saison?

La nouvelle saison de NBA commence mardi prochain. Avec, pour la première fois depuis cinq ans, plus de questions que de réponses. Beaucoup de mouvements ont eu lieu durant l’entre-saison. Présentation en trois thèmes.

Les Warriors ont explosé

C’est le moment que l’on retiendra des Finals NBA de la saison dernière : Kevin Durant, la vedette des Golden State Warriors, s’est déchiré le tendon d’Achille durant le Game Five contre Toronto. Cette blessure a engendré une énorme polémique : Durant était-il revenu trop tôt après une déchirure au mollet survenue plus tôt dan les play-offs ? Sous la pression des Warriors ? Suite à certaines insinuations sur les réseaux sociaux, prétendant qu’il était  » trop soft  » ? Les médecins l’avaient-ils mal conseillé ? Lorsque Durant a dû abandonner ses équipiers, et que Klay Thompson a aussi dû renoncer un match plus tard à cause d’une déchirure aux ligaments croisés, les Warriors ont vu le titre leur filer entre les doigts. Et les Toronto Raptors se sont adjugé la couronne à la surprise générale.

Mais c’est après la finale que Golden State a enregistré sa plus grosse perte : le départ de Kevin Durant vers les Brooklyn Nets. Ce n’était certes pas totalement inattendu, car il était à la recherche d’un nouveau défi, d’un club où il pourrait redevenir la vedette incontestée. Car, malgré ses deux titres de MVP dans les Finals de 2017 et 2018, il ne s’était jamais senti totalement apprécié. Ni par les supporters ni par les médias qui le considéraient comme un opportuniste qui, en 2016, avait pris le train des Warriors en marche. Un TGV dont l’autre super vedette, Steph Curry, était considéré comme le vrai machiniste.

La perte de Durant, la grave blessure au genou de Thompson, le départ d’autres joueurs-clefs comme Andre Iguodala et Shaun Livingston ont bouleversé le paysage de la NBA. Désormais, Golden State, la super équipe sacrée trois fois au cours de cinq finales consécutives, n’est plus le soleil autour duquel les autres franchises gravitent.

Pourtant, les Warriors n’ont pas encore été complètement absorbés par un trou noir. Stephen Curry et l’homme-à-tout-faire Draymond Green forment toujours le coeur et l’âme de Golden State, et Klay Thompson devrait revenir en février/mars. Si ces trois-là retrouvent toutes leurs facultés pour les play-offs, en supposant que les Warriors se qualifient, tout redeviendra possible. Ils avaient déjà décroché le titre en 2015 sans Durant. Certes, l’effectif était alors plus étoffé, car ce sera le principal problème cette saison. Dans le sign-and-trade avec Brooklyn, pour Kevin Durant, Golden State a certes recruté le AllStarD’Angelo Russell, mais on se demande s’il parviendra à trouver sa place aux côtés de Steph Curry, alors qu’il a tendance à monopoliser le ballon comme point guard. Surtout si Thompson revient. Et les autres role players, qui ne sont pas des grands noms, parviendront-ils à élever leur niveau ?

D’un autre côté, Curry, Thompson et Green, fatigués mentalement la saison dernière après quatre années de succès, seront hypermotivés à l’idée de prouver qu’ils n’ont pas besoin de Durant pour gagner. D’autant qu’ils évolueront dans une salle flambant neuve, qui a coûté 1,5 milliard de dollars ( ! ) : les Warriors quittent en effet l’Oracle Arena d’Oakland pour évoluer au Chase Center de San Francisco, la ville voisine beaucoup plus glamour. On s’attend à ce que Steph Curry enfile les trois points avec encore davantage de régularité et qu’il devienne éventuellement le meilleur marqueur de la grande ligue. Mais ce ne sera sans doute pas suffisant pour décrocher un nouveau titre NBA.

Kevin Durant et sa nouvelle franchise, les Brooklyn Nets, devront sans doute eux aussi attendre au moins une saison pour viser le titre national. KD restera d’ailleurs sur le flanc durant toute la campagne à venir, car il doit récupérer de sa déchirure au tendon d’Achille. Et le très contesté Kyrie Irving, qui a quitté Boston pour former la paire avec son ami Durant à Brooklyn, ne pourra pas, à lui seul, faire des Nets un candidat au titre.

La lutte pour LA

En partie à cause de l’implosion de la supernova Golden State, le soleil brille à nouveau au-dessus de Los Angeles, le nouveau centre de gravité de la NBA. LeBron James, qui reste la super-vedette attirant toute l’attention, a quitté l’an passé la cité grise et froide de Cleveland pour rejoindre les glorieux Lakers et la chaude Californie, notamment en raison de la force d’attraction de Hollywood, où il pourra mieux construire son empire du business. Sur ce dernier point, il a réussi, mais sur le plan sportif, la saison des Lakers a débouché sur un flop. Les raisons : un noyau mal équilibré, un LeBron James qui a raté 27 matches sur blessure, pas de play-offs, le départ du présidentMagic Johnson

La nécessité d’attirer une autre vedette pour épauler James s’est donc faite sentir. Le poids des ans commence à peser sur les épaules de ce joueur de 35 ans. Le generalmanagerRob Pelinka a donc conclu un trade pour Anthony Davis de New Orleans. De jeunes joueurs prometteurs comme Lonzo Ball, Josh Hart, Brandon Ingram, des tours de draft : tout cela en échange de Davis . Hypothéquer l’avenir pour gagner aujourd’hui, c’est un peu la formule qui a été privilégiée. Avec The Brow, qui était à la Nouvelle Orleans la superstar la plus sous-estimée de la NBA, mais qui est très polyvalent, à la fois offensivement et défensivement. Et qui, comme centre/power forward, devrait être parfaitement complémentaire avec LeBron James. Surtout parce que le King est prêt à confier les clefs de l’attaque des Lakers à Davis : comme cadeau symbolique, il lui a même offert son numéro 23.

Durant la pre-season, l’entente a en tout cas semblé fonctionner. Dès le premier match d’entraînement, James a tweetté que, pour la première fois depuis longtemps, il se sentait de nouveau comme  » un enfant dans un magasin de bonbons « . Cela préfigure-t-il le Retour du Roi, quatre ans après son dernier titre NBA à Cleveland ? Cela reste à voir, car ici aussi, le même problème qu’aux Warriors se pose : le reste de l’équipe est-il à la hauteur ? C’est, en effet, un assemblage de joueurs lowcost, dont on ne voulait plus ailleurs. Certes, il comporte des shooters, comme Danny Green (arrivé du champion Toronto) qui convient mieux au jeu de James, lequel évoluera plus que jamais comme meneur de jeu cette saison. Et qui devra surtout être épargné par les blessures, car s’il devait être écarté des parquets, la pression sur Davis deviendrait très forte et il n’y était pas habitué à la Nouvelle Orléans.

Kawhi Leonard, MVP des Finals a quitté Toronto pour la Californie et les Clippers.
Kawhi Leonard, MVP des Finals a quitté Toronto pour la Californie et les Clippers.© GETTY

La presse très critique de Los Angeles ne manquera pas de s’en prendre au nouveau coach des Lakers, Frank Vogel, à la moindre contre-performance. En outre, son assistant Jason Kidd (ancien joueur de NBA et bon ami de James…) se tient à l’affût dans l’ombre. À Tinseltown, après sept saisons sans play-offs, on attend un titre ou au moins une place en finale. C’est aussi le cas de LeBron James, car s’il veut un jour détrôner Michael Jordan comme GOAT, le meilleur joueur de tous les temps, il se doit d’offrir un titre aux Lakers.

Un avantage : pour l’instant, les médias de LA devront se partager entre les Lakers et les Clippers. Autrefois, ces derniers étaient le maillon faible de la ville, mais ce n’est plus le cas. Là aussi, deux étoiles brillent : Paul George et Kawhi Leonard. La saison dernière, ce dernier – élu MVP des Finals – a encore été champion avec Toronto, mais après une saison au Canada, il avait envie de retrouver ses racines en Californie. À une condition : que les Clippers concluent un trade pour faire venir George de l’Oklahoma. Pas de problème pour le propriétaire milliardaire Steve Ballmer, qui a fait signer Leonard et George le même jour.

Davantage que le duo Davis/James chez les Lakers, la nouvelle paire des Clippers dispose d’un effectif bien fourni autour d’elle, malgré le départ de Shai Gilgeous-Alexander et de Danilo Gallinari (vers Oklahoma, en échange de Paul George). La saison dernière, les Clippers, dirigés par un coach de haut niveau comme Doc Rivers, avaient déjà poussé Golden State aux six manches au premier tour des play-offs. Lou Williams, Montrezl Harrell, Landry Shamet, Patrick Beverly, complétés par Leonard/George : tous les ingrédients sont réunis pour viser un titre.

Du moins si les deux superstars, souvent contrariées par des blessures dans le passé, en sont cette fois épargnés, car la concurrence est particulièrement féroce dans la Conférence Ouest, avec les Denver Nuggets (bâtis autour du centre serbe Nikola Jokic), les Utah Jazz (qui ont ajouté deux pièces qui manquaient au puzzle avec Mike Conley et Bojan Bogdanovic) et les Houston Rockets, qui étaient ces deux dernières saisons les principaux rivaux de Golden State à l’Ouest – emmenés par le duo James Harden/ Chris Paul. Le meilleur marqueur de la NBA, Harden, a inscrit pas moins de 36 points par match la saison dernière (seuls Wilt Chamberlain et Michael Jordan ont un jour fait mieux dans le passé). Mais les Rockets ont de nouveau explosé en play-offs face aux Warriors. Ça a conduit à des tensions avec Chris Paul, et celui-ci a donc été échangé avec Russell Westbrook, la cheville ouvrière d’Oklahoma City. Comme Harden, c’est une machine à marquer, mais aussi un meneur de jeu très amoureux du ballon. La question de la complémentarité entre ces deux vedettes se pose donc.

Une seule chose semble déjà sûre dans le Wild Wild West : le rookie de la Nouvelle Orléans, Zion Williamson, un monstre sur le plan athlétique, gratifiera les spectateurs de dunks spectaculaires. Depuis la première saison de LeBron James en 2003, aucun néophyte n’est autant attendu que Zion (son nom de famille est déjà superflu). À terme, il doit devenir le nouveau Roi de la NBA.

Le Process des 76ers

Dans la Conférence Est, une autre force de la nature fait des ravages : le Grec Giannis Antetokounmpo, élu MVP l’an passé, en tant que leader du numéro 1 de la saison régulière, les Milwaukee Bucks. En finale de Conférence, ils se sont malheureusement heurtés à Toronto et Kawhi Leonard. Maintenant que celui-ci a déménagé à LA, la voie semble ouverte pour les Bucks et Giannis (lui non plus n’a pas besoin qu’on mentionne son nom de famille).

Si le Grec de 24 ans parvient à améliorer son tir à trois points (seulement 25% de réussite la saison dernière), il sera un danger permanent pour toutes les équipes. Ce sera nécessaire, car les Bucks ont perdu deux shooters avec Malcolm Brogdon et Nikola Mirotic. Les nouveaux venus Kyle Korver, Wesley Matthews et Robin Lopez parviendront-ils à combler le vide ?

À Philadelphie, la Liberty Bell sonne plus fort que jamais. Après le Process – qui a consisté à se laisser battre volontairement pendant des années afin de pouvoir bénéficier d’un meilleur tour de draft dans le but de construire une équipe de haut niveau – les 76ers sont considérés comme le principal candidat à la finale à l’Est. Eux aussi se sont heurés à Toronto durant les derniers play-offs, après un tir de Kawhi Leonard au buzzer qui est entré dans l’histoire. La vedette Joel Embiid est donc avide de revanche : il veut devenir le MVP et le Defensive Player of the Year, et bien sûr, aussi conquérir le titre NBA. L’excentrique Camerounais de 2m13 a suivi un régime et a perdu dix kilos durant l’entre-saison.

Beaucoup dépendra de Ben Simmons, l’autre vedette des 76ers. Comme point guard, il est très polyvalent, mais il garde un gros point faible : son tir à distance. Jusqu’à la semaine dernière, il n’avait encore jamais inscrit un tir à trois points dans un match de NBA. Il y est finalement parvenu dans un match de preseason, après avoir travaillé son shoot durant tout l’été. L’image a fait le tour du monde :  » One of the most iconic moments in NBA-history « . Si l’Australien parvient à atteindre un pourcentage de réussite satisfaisant au tir à distance, ce pourrait être la clef d’un possible titre. Surtout parce que les 76ers ont perdu le shooterJJ Redick (New Orleans) et surtout Jimmy Butler (Miami) durant l’entre-saison. La saison dernière, ce dernier était devenu le go-to-player durant le money time, un rôle qui devra désormais être repris par Embiid et Simmons, aux côtés de Tobias Harris. Ils ont reçu du renfort en la personne du maître-défenseur Josh Richardson (arrivé de Miami en échange de Jimmy Butler) et surtout d’ Al Horford, qui provient de Boston. L’un des rares joueurs qui était parvenus à stopper Embiid et qui sera donc désormais son coéquipier.

Le nouveau Big Five des 76ers sera donc redoutable sur le plan défensif. Si Embiid et consorts pouvaient également sortir certaines armes offensives, le Process pourrait bien porter ses fruits et déboucher sur un titre en juin 2020. Vincent Kompany pourrait s’en inspirer.

MVP de la saison écoulée, Giannis Antetokounmpo entend bien mener les Milwaukee Bucks au sommet.
MVP de la saison écoulée, Giannis Antetokounmpo entend bien mener les Milwaukee Bucks au sommet.© GETTY

NBA vs Chine

L’avant-saison de NBA a été éclipsée par un tweet malheureux du manager des Houston Rockets, Daryl Morey.  » Combattez pour la liberté. Soutenez Hong Kong « , a-t-il tweeté à la veille d’une tournée de son équipe en Chine. Ce tweet est très mal passé, car le sujet des nombreuses manifestations qui ont eu lieu à Hong Kong ces derniers mois est très sensible. Après un tsunami de menaces, Morey a effacé son tweet et expliqué qu’il n’avait pas voulu offenser les amateurs de basket chinois.

Mais le mal était fait. Surtout lorsque le grand patron de la NBA, Adam Silver, a défendu le droit à la liberté d’expression, qui est une valeur bien enracinée en NBA et aux États-Unis. Après avoir d’abord condamné prudemment le tweet de Morey, Silver a reçu son lot de critiques dans son propre pays, de la part des médias, des fans et des hommes politiques (républicains et démocrates réunis). Les Chinois n’ont pas apprécié : les matches de Houston n’ont plus été diffusés à la télévision, et les sponsors chinois des Rockets se sont retirés alors que leur relation était très bonne depuis des années, grâce à l’ancien joueur Yao Ming.

Cette guerre des tweets pourrait bien coûter des millions à la NBA, car la Chine compte plus de fans de NBA (environ 500 millions) que les États-Unis comptent d’habitants (330 millions). Il y a eu plus de Chinois que d’Américains qui ont regardé les Finals de NBA la saison dernière. Un marché gigantesque, donc, d’une valeur de quatre millions de dollars.

Le patron de la NBA, Adam Silver, est donc confronté à un dilemme. D’un côté, il veut défendre le freedom of speech qui est sacré aux États-Unis. Cette liberté d’expression qu’il a lui-même promu auprès des joueurs NBA, en les incitant à faire entendre leur voix sur les problèmes de société. D’un autre côté, il doit aussi défendre les intérêts économiques de la NBA en Chine, sans qu’il puisse être accusé d’hypocrisie. Si la dispute prend des proportions plus grandes encore (à cause de la crise politique entre les États-Unis et la Chine), elle pourrait freiner la croissance de la NBA. Affaire à suivre.

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