Bernard Jeunejean

Marre qu’on enfonce Simons !

J’ignore si l’opinion flamande vitupère autant, mais sa copine francophone n’arrête guère, ahurie d’encore voir Timmy Simons en sélection. La fronde devient unanime pour prétendre que le gars a fait son temps… ce qui ferait de Georges Leekens un entraîneur du passé vu qu’il persiste à l’aligner ! Pas d’accord. Long Couteau tergiverse dans ses choix, il est le roi pour noyer le poisson quand les objectifs ont foiré …mais il est loin d’être le roi des cons pour construire un onze qui maximalisera nos chances de triompher d’un adversaire fortiche a priori !

Par Bernard JEUNEJEAN

Nous sommes durs avec nos demis défensifs, nos hommes de l’ombre, nos préposés au sale boulot : j’en entends même qui flippent à l’idée que (et ce serait un crime de lèse-majesté footballeuse !) Simons puisse un jour battre le record de sélections de Jan Ceulemans ! La belle affaire, le cas est banal : Didier Deschamps fut Bleu bien davantage que Michel Platini, Rainer Bonhof a joué pour la Mannschaft bien plus que Günter Netzer, l’Histoire nous refile des flopées d’exemples ! Et chez nous, Franky Vander Elst (jadis hué honteusement en fin de parcours chez les Diables) précède déjà Paul Van Himst ou Enzo Scifo au palmarès des capés…

Deux arguments s’entremêlent chez les détracteurs de Simons : veulent-ils le bazarder parce qu’il est trop âgé ou démodé ? Trop âgé signifierait que Timmy court aujourd’hui moins et surtout moins vite, qu’il arrache moins de ballons : voire que même son cerveau fonctionne au ralenti… comme le sous-entend Steph Pauwels qui en fait un sénescent de 53 ans et 2 de tension ! Cela reste à prouver. Pas sûr que Simons soit lanterne rouge aux divers tests physiques… et j’en vois de plus jeunes qui n’arrachent pas comme lui, ou qui n’auront jamais sa vieille pointe de vitesse pour aller rechercher un attaquant galopant vers le but ! Certes Timmy, quasi 38 ans en 2014, sera peut-être alors fortement déglingué : mais les qualifs démarrent dans moins d’un an, pas dit qu’éclora d’ici là un mec pouvant rendre les mêmes services !

Car Simons n’est pas démodé : ce que prétendent ceux estimant qu’un demi défensif du troisième millénaire doit d’une part être bien supérieur techniquement, d’autre part jouer vers l’avant. Jouer vers l’avant, faudra m’expliquer en quoi c’est de facto une qualité. Si cela signifie vouloir aussi pénétrer balle au pied, Simons n’est pas le seul à ne pas le vouloir, même Xabi Alonso préfère s’en passer. Si ça veut dire tournicoter en début de relance avec les deux arrières centraux partenaires, il me semble que c’est là une généralité contemporaine. Et si ça implique de chercher rapidement la passe profonde, cette profondeur n’est pas la panacée universelle : elle sera même dénoncée comme stratégie abusant de longs ballons quand la réussite n’est pas au bout !

Steven Defour, Marouane Fellaini, Vadis Odjidja : les plus souvent cités comme capables d’occuper mieux que Timmy ce poste de demi défensif. Caractéristique commune aux trois : plus enthousiasmants que Simons balle au pied, plus beaux à voir, plus visibles parce que plus peloteurs de ballon. C’est là le hic : aucun collectif n’a jamais brillé avec dix joueurs de champ brillants, faut au moins un tâcheron dans le paquet, un homme invisible, un médian qui fait du bien parce qu’il se refuse de peloter comme ses potes : pas un videur systématique (Simons ne l’est nullement) mais un gars d’une sobriété systématique en possession/ballon ! Railler Simons, c’est nier le principe même d’une abnégation nécessaire en phase de reconstruction.

Quant à l’efficacité dans la récupération collective du ballon, aucun des trois précités n’arrive à la cheville du Diestois, ceci sans nier leur capacité individuelle à mettre le pied. Mais Simons est un boucheur de p’tits trous d’élite, une garantie d’être à quatre guibolles contre deux quand l’adversaire envahit l’arc de cercle, ce n’est pas pour rien qu’on a coincé les Français ! Et personne ne regarde mieux que lui ce qui se trame alentour de l’action directe : un £il devant pour voir l’adversaire au ballon, un £il dans le dos pour garder vision sur tout le reste.

Non ? Alors, repassez-vous le but des Roumains voici dix jours, à partir de la perte de balle de Defour : regardez nos déplacements, comptez nos adversaires. Jamais Timmy n’aurait bougé comme ça. Faut le garder jusqu’à ce qu’il se déglingue.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire