Manchester sings the Blues

Un an après avoir perdu le titre, les coéquipiers de Vincent Kompany ont retrouvé leur bien avec un football léché et malgré un relatif désintérêt des médias anglais.

On ne peut souligner le travail de Manuel Pellegrini, l’entraîneur chilien de City, arrivé cet été en droite ligne de Malaga, sans le confronter à son prédécesseur, l’Italien Roberto Mancini. Autant Mancini aimait la confrontation avec ses joueurs, autant Pellegrini tend à l’apaisement et au calme. Autant Mancini avait une approche défensive, autant Pellegrini aime l’attaque.

 » Je pense que ce n’est pas seulement important de remporter le titre. La manière avec laquelle on le gagne est tout aussi importante. Nous avons un style de jeu, nous sommes une équipe attractive, nous marquons beaucoup de buts et nous pensons toujours à en marquer davantage. Sans doute y-a-t-il différentes manières de gagner le championnat. Moi, j’ai choisi celle du football attractif. Le côté esthétique a toujours eu de l’importance à mes yeux « .

Voilà ce que déclarait récemment Pellegrini. Pas étonnant donc que City ait franchi la barre des 100 buts marqués la semaine passée et que certains matches de ce club, qui remporte son deuxième titre en trois saisons, aient abouti à des scores fleuves. Pas étonnant non plus que cette équipe, meilleure défense des deux derniers championnats, ait encaissé 10 buts de plus que Chelsea, et huit de plus que le City de Mancini sacré en 2012, malgré le retour de Vincent Kompany à un haut niveau.

Pourtant, malgré son football offensif, son armada de stars et des statistiques plus qu’intéressantes, la saison de City n’a pas passionné les suiveurs d’une Premier League résumée par la folle première partie de saison d’Arsenal, la remontée fantastique de Liverpool, le football défensif mais payant de José Mourinho et le déclin de Manchester United.

Pourquoi donc ce désintérêt pour un champion qui ne manque pas de sel ? Principalement pour deux raisons. La première tient en bonne partie à la personnalité de Pellegrini. L’entraîneur chilien reste toujours calme, quels que soient les événements. Les journalistes admirent l’homme, sa sagesse et son intelligence, mais trouvent ses conférences de presse  » boring « , d’un ennui mortel. Surtout comparées à celle de son prédécesseur, Roberto Mancini, qui avait toujours des choses à dire sur ses joueurs et fustigeait ses patrons.

Du pain bénit pour les tabloïds anglais.  » Au centre d’entraînement de Carrington, les paparazzis ont accès depuis l’autre côté de la route aux séances d’entraînement « , explique Rory Smith, journaliste au Times.  » La saison passée, ils ramenaient sans cesse des photos de bagarres ou d’énervements. Cette année, ils n’ont rien eu à se mettre sous la dent.  »

La revanche de Pellegrini

Ce qui est paradoxal, c’est que le côté posé et calme de Pellegrini a clairement mené City au titre. Il a pacifié un vestiaire très fragmenté après le passage de Mancini, dont la caractère explosif et l’amour de la confrontation n’en faisaient pas un manager aimé par ses joueurs. Pellegrini a remis en selle des joueurs proches de la sortie. Tout en le maintenant dans son statut de réserviste (troisième homme derrière Kun Agüero et Alvaro Negredo), il a boosté la confiance d’Edin Dzeko, auteur de 26 buts toutes compétitions confondues.

Même chose avec Samir Nasri, qui au niveau statistique, réalise la meilleure saison de sa carrière. Et il a refait de Joe Hart le meilleur gardien de Premier League en gérant de main de maître la situation. Il l’a écarté un mois au début de l’hiver avant de le remettre naturellement dans les cages. Depuis lors, Hart est intraitable. Il fut notamment le héros de la victoire à Everton 2-3. Ce dossier symbolise parfaitement la manière dont Pellegrini a géré City cette saison : avec doigté et calme.

L’autre raison pour laquelle City ne passionne guère, ce sont les doutes qui entourent sa deuxième partie de saison. Après son élimination peu glorieuse en Ligue des Champions et sa défaite à domicile à Chelsea (0-1), les Citizens ont calé quelque peu et manqué de ressort. Au lieu d’inscrire cette équipe dans l’histoire, ces deux rencontres ont dévoilé les faiblesses de l’équipe de Pellegrini. L’élimination en Cup des oeuvres de Wigan avait déjà privé les Citizens du trophée la saison dernière, est également intervenue durant une période où toute l’Angleterre s’enflammait pour Liverpool.

Injuste pour une équipe qui a su exceller à certains moments, comme lors des deux victoires dans le derby de Manchester (4-1 et 0-3), face à Tottenham (6-0 et 5-1) ou Arsenal (6-3). Peu d’équipes peuvent se targuer d’avoir donné autant de leçons en une seule saison. Injuste également pour un entraîneur, arrivé à City avec une étiquette d’ingénieur mais de loser également puisque son palmarès européen ne comptait qu’une seule victoire de Coupe Intertoto, avec Villarreal, alors qu’il avait tout remporté sur le continent sud-américain (champion du Chili, d’Equateur et deux fois champion d’Argentine).

En remportant le titre, Pellegrini a pris une revanche éclatante et a surtout parfaitement rempli la mission qu’on lui avait assignée à son arrivée. A l’époque, le chef exécutif du club, l’Espagnol Ferran Soriano lui avait fixé l’objectif de remporter cinq trophées en cinq ans. Avec deux (le championnat et la League Cup) pour sa première saison, il est en avance sur les plans.

PAR STÉPHANE VANDE VELDE

 » Peu d’équipes peuvent se targuer d’avoir donné autant de leçons de football en une seule et même saison.  »

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