L’Olympic en D2

Les Dogues veulent continuer à être fiers de l’être.

par Stéphane Vande Velde

Le stade de la Neuville se tapit dans l’ombre de la patinoire. Les tribunes résonnent encore des chants de victoire. Le titre vient d’être fêté et en ralliant la D2, l’Olympic retrouve un statut plus digne de ses glorieuses années qui l’avaient vu côtoyer les cimes du football belge (la dernière année en D1 remonte à 1975).

Aujourd’hui, le stade marie la nostalgie et la volonté d’aller de l’avant. Du haut des travées, derrière le but, on peut apercevoir les armatures métalliques du voisin encombrant. La léthargie de l’Olympic a coïncidé avec l’essor du Sporting, distant d’à peine un km. Pourtant, même en divisions inférieures, l’Olympic a gardé ses farouches partisans.

 » Avant, l’Olympic était le club des ouvriers et le Sporting celui des patrons. Certains ralliaient la Neuville, à pied, de Gilly à Châtelet « , explique Luc Hubaux, président de l’école des jeunes, qui a vécu toutes les étapes du club.  » Ce clivage s’est estompé. En militant en D1, le Sporting est devenu la nouvelle référence. Mais celui qui est né Dogue l’est resté ! « .

Au bord de la faillite, le club a retrouvé des couleurs, il y a deux ans.  » Le club était moribond « , continue Hubaux,  » On avait surmonté pas mal de difficultés mais on s’essoufflait. Il fallait insuffler du sang neuf « . L’arrivée d’ Aziz Alibhai, homme d’affaires franco-indien, basé à… Abidjan, a donc redonné l’élan nécessaire. Les dettes ont été apurées et les objectifs sportifs revus à la hausse. Derrière cette réussite, un petit bout de femme. Energique et convaincante, Julie Taddeï, l’ancienne compagne de Jean-Marc Guillou, se voyait confier la gestion quotidienne du club.  » Elle a repris le club avec une main de fer. Soit on s’adaptait, soit on partait. Cela a fait quelques victimes mais cela a réveillé pas mal de personnes « , explique un proche du club. Son avantage : elle ne rechigne pas devant le travail et connaît le milieu du football, ce qui lui a permis de balayer les nombreux préjugés.

Julie Taddeï est fidèle au portrait qu’on brosse d’elle. Elle sait ce qu’elle veut. L’interview a à peine débuté qu’elle se lève, ouvre la porte et d’une voix sévère, intime à ses collaborateurs un peu de calme.  » Sinon, on ne s’entend pas « , nous dit-elle. Son projet, elle le défend corps et âme. En deux ans, elle a fait taire toutes les critiques.  » Monsieur Alibhai cherchait un club pour créer un partenariat Nord-Sud avec la Côte d’Ivoire où il possède une académie. Grâce à son école de jeunes performante, l’Olympic nous permettait cette transversalité. Mais pas question de créer un nouveau Beveren ! Je n’aime pas ce projet car je l’assimile à un ghetto. Les Ivoiriens ne se sont pas fondus dans l’environnement existant « , explique celle qui est devenue la maman adoptive de Venance Zezeto et de Marco Né.  » Nous, on communique beaucoup plus. Nos jeunes participent à une vie commune « .

En gage de bonne foi, les repreneurs ont bien expliqué qu’il n’était pas question d’avoir plus de six Ivoiriens dans le noyau.  » Le résultat est là. La mayonnaise a bien pris. Que ce soit entre les repreneurs et les gens en place. Ou entre les joueurs Ivoiriens et ceux du cru « , analyse Hubaux.

Au bout du compte, l’Olympic a réussi une vraie synergie entre équipe Première, école des jeunes et académie ivoirienne.  » Quand on voit le noyau, on ne pointe plus les joueurs issus de l’académie en disant qu’ils sont Ivoiriens. On en a fait des Dogues « , s’enthousiasme Taddeï.  » Dans un premier temps, on voulait qu’on nous accepte et qu’on croit à notre projet. Derrière ce côté social, nous avons aussi voulu nous donner des ambitions sportives : la D2 dans les deux ans et la D1 dans les sept. Nous nous sommes donnés les moyens mais nous avons respecté le club et son histoire. Je venais à peine d’arriver au club que j’ai reçu un livre retraçant l’histoire de celui-ci. Je l’ai lu en une nuit. Je voulais assimiler l’Olympic. Sur le plan de la communication, on a toujours voulu maintenir un lien entre nous et les gens. Nous ne nous sommes pas coupés des supporters. Ici, tout le monde m’appelle Julie. J’habite à Charleroi, j’ai appris à connaître les commerçants. Je me sens bien ici « .

Taddeï-Ost : une victoire de la mentalité

En début de saison, après avoir échoué lors de la dernière rencontre du tour final, l’Olympic partait avec l’étiquette de favori. Football léché, budget conséquent, tout prédisposait les Dogues à un survol du championnat.  » On faisait un scouting minutieux de l’adversaire mais cela ne servait souvent à rien car les clubs se transcendaient contre nous « , explique l’entraîneur Dany Ost. Point de survol donc, mais une faculté à gérer les moments importants. Et finalement une montée méritée. Cette promotion, l’Olympic la doit à son noyau de qualité mais également à un homme : Ost. Véritable institution de l’Union Saint Gilloise lorsqu’il était joueur, il s’est fondu dans le moule carolo depuis qu’il a embrassé la carrière d’entraîneur : un premier passage à l’Olympic et une montée avec Heppignies (entrecoupée par une autre montée avec Rhode-Verrewinkel) lui ont permis d’être adopté.

La succession de Patrick Thairet n’était pas aisée mais Ost s’en est parfaitement bien sorti.  » J’ai été choisi parce que j’avais travaillé au Rwanda et que je connaissais la mentalité africaine mais que je saisissais aussi très bien l’âme carolo. Mon but était de souder le groupe et de créer une ambiance. On me croit souvent olé, olé. C’est en partie vrai. Je sais mettre l’ambiance. Les joueurs aiment me charrier et il m’arrive d’aller boire un verre avec eux mais ils savent que s’ils arrivent une minute en retard, ils auront affaire à moi. J’ai une rigueur de travail « .

Dans la région, Ost a su séduire. Il a une image de communicateur et de rassembleur.  » En stage, je dispose les tables de façon à ce que personne ne tourne le dos à un équipier. Je ne voulais pas avoir les Noirs d’un côté et les Blancs d’un autre ; ni les vieux à part et les jeunes au milieu. Je base ma philosophie d’entraîneur sur celle qui m’animait quand j’étais joueur. Je travaille sur la force et la mentalité d’un groupe. J’avais une crainte : je savais que la moitié de l’effectif venait de rater l’accession à la D2. Il ne fallait pas que cet échec laisse des traces « .

Comme l’appétit vient en mangeant, l’Olympic vise maintenant la D1 dans les trois ans. Le budget de 600.000 euros sera revu à la hausse de 30 %. Des joueurs expérimentés comme Frédéric Stilmant (ex-Ostende, Tubize, Oud-Heverlee) ou Nicolas Flamini (ex-Brussels, Tubize) ont été acquis.  » Il faut évidemment éviter de retourner en D3. Ce serait un coup d’arrêt. On vise donc le maintien « , affirme Taddeï.  » Mais pourquoi pas viser une cinquième place l’année prochaine ? », lâche-t-elle avant de se reprendre,  » Si l’entraîneur m’entendait, il ferait une crise de nerfs… « .

Pourtant, de telles ambitions demandent aussi des investissements. Le stade vieillit (même s’il a largement le niveau pour la D2) et la présence du Sporting nuit au développement économique du club.  » Je pense que le potentiel est là. La population est présente « , réfléchit Hubaux,  » C’est à nous à fidéliser notre public. Que ceux qui se disent Dogues aux terrasses des bistros se manifestent !  »

Sur le plan économique, Taddeï se veut prudente :  » On connaît le climat économique de la région. D’ailleurs, nous ne pratiquerons pas de tarifs prohibitifs la saison prochaine, malgré la montée. Mais notre cellule commerciale s’étoffe et nous ne comptons pas vivre dans l’ombre du Sporting. Chacun vit à son niveau. On ne touche pas le même public. Je ne connais pas les ambitions du Sporting. Moi, les miennes sont claires : rendre à l’Olympic son lustre d’antan. Je veux que les Dogues soient fiers de l’être « .

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