Les stylistes

Ballon brossé, frappe lourde dans la lucarne : les coups francs relèvent parfois de l’art. Passage en revue des spécialistes du moment.

D’après les statistiques des trois dernières saisons et l’évaluation de la rédaction, nous avons établi le top cinq des spécialistes des coups francs, classement où prévalent les buts inscrits. Ces joueurs sont toujours actifs en championnat de Belgique. Nous leur avons posé cinq questions.

1) Quelle est votre place favorite pour botter un coup franc ?

2) Quelle technique utilisez-vous ?

3) Comment est-ce devenu une spécialité ?

4) Qui est le meilleur spécialiste du moment, selon vous ?

Bosko Balaban {Club Bruges}

Croate, 28 ans.

L’avant du Club a fait ses preuves en la matière depuis quelques saisons, généralement de loin. Il a ainsi marqué deux buts lors de sa première saison en Belgique (2004-2005), de même que lors de l’exercice suivant. Cette année, Balaban en est déjà à quatre.

1) » Je n’en ai pas vraiment. Je peux marquer de n’importe où, avec un brin de chance. Je pars du principe que je vais marquer mais parfois, je pense n’avoir aucune chance de cet endroit et pourtant, le ballon fouette les filets. Si je devais choisir ma place de prédilection, je dirais un rien sur la gauche. C’est de là que j’ai marqué mon plus beau but sur coup franc, contre Gand, des 30 mètres « .

2)  » Je tire de l’intérieur ou de l’extérieur du pied, en fonction de l’angle. Sur les longs tirs, je préfère le cou de pied pour insuffler plus de vitesse au ballon « .

3) » Gamin, je ne m’exerçais guère. J’ai commencé il y a sept ou huit ans. Tous les jours, après chaque entraînement, de toutes les positions. Ma réputation est faite depuis longtemps au Dinamo Zagreb et en équipe nationale. Je trouve l’exercice plus ardu en Belgique car on joue avec plusieurs marques différentes de ballon. Le Club s’entraîne avec Adidas mais beaucoup de clubs jouent avec Select. Devoir botter un coup franc avec un autre ballon est parfois délicat « .

4)  » En Belgique, Milan Rapaic est le meilleur. Je l’ai vu botter des coups francs magnifiques en équipe nationale. Sur la scène internationale, le Lyonnais Juninho est sans conteste le plus performant « .

Adnan Custovic {Mouscron}

Bosniaque, 28 ans.

Le bombardier bosniaque n’est pas un tireur raffiné. Il a surtout un shoot très puissant. Des cinq coups francs qu’il a convertis en deux saisons, jusqu’à présent, quatre étaient tirés des 25 mètres, voire davantage.

1) » L’idéal est d’être à une vingtaine de mètres du but, un rien à gauche. Quand le ballon est plus proche du rectangle, je tire en puissance, droit devant. Si je suis à plus de 30 mètres du goal, j’essaie de contourner le mur. Cela peut paraître illogique mais je pense que si on propulse le ballon en puissance à travers le mur, à condition d’être proche du rectangle, le gardien n’a pas le temps de réagir « .

2) » De près, de l’intérieur du pied. Plus je suis loin, plus je privilégie l’extérieur du pied pour donner plus de force à mon envoi. Un tir doit être explosif. Parfois, les entraîneurs essaient de me modérer, ils me disent que je ne dois pas tirer au but sans échauffement, à l’entraînement. Mais c’est plus fort que moi, je ne puis m’en empêcher « .

3) » La puissance de mon tir est innée. Je n’ai jamais dû consentir d’efforts. Gamin, j’étais fasciné par le football anglais : qu’il a-t-il de plus magnifique qu’un long tir que le gardien, impuissant, voit atterrir dans son but ? Ce sont mes buts préférés. Ils sont devenus ma marque de fabrique. Parfois, je m’attarde cinq ou dix minutes, après l’entraînement, pour exercer les phases arrêtées, mais au fond, je ne fais rien de spécial « .

4) » Tom Soetaers et Balaban sont les spécialistes du moment en Belgique. Sur le plan international, je reste un fan inconditionnel de David Beckham. Son style est inimitable « .

Milan Rapaic {Standard}

Croate, 33 ans.

Il a déjà marqué cinq buts sur coup franc en championnat de Belgique. L’international croate a été particulièrement efficace la saison passée avec quatre tirs victorieux. Jouant rarement cette saison, Rapaic n’a pas encore trouvé le chemin du but.

1) » Comme je suis gaucher, je préfère me charger des phases arrêtées sur le côté droit. La distance idéale ? 18 à 20 mètres « .

2) » Cela dépend de la position. De loin, j’arme mon tir du cou du pied ou de l’extérieur. Si je suis plus près du but, je tire de l’intérieur « .

3) » Je crois que j’étais prédestiné à me distinguer à cet exercice. Je n’ai jamais dû m’entraîner spécifiquement. Gamin, je m’amusais à tirer au but, avec mes copains, et j’ai rapidement réalisé que cela me réussissait. C’était déjà très naturel. Après l’entraînement, je continue généralement à tirer en compagnie de quelques coéquipiers mais cela reste un plaisir, à mes yeux « .

4) » Je n’aime pas citer de noms. Si je dois vraiment distinguer quelqu’un en championnat de Belgique, ce sera moi (il rit). Non, sérieusement, Balaban est actuellement le meilleur spécialiste. Je l’ai souvent vu à l’£uvre en équipe nationale et il a du talent. Sur le plan international, Juninho est le meilleur « .

Mbark Boussoufa {Anderlecht)}

Marocain néerlandais, 22 ans.

Boussoufa a fait ses gammes avec Gianfranco Zola à Chelsea. Pendant des heures, il a étudié les mouvements de son maître. Depuis son arrivée en Belgique, via Gand, le technicien marocain a marqué quatre buts à partir de coups francs directs. Il détient aussi le brevet des passes tranchantes.

1) » Je préfère les envois très proches du rectangle, pourtant beaucoup plus ardus que les tirs de loin. Peu m’importe que le ballon soit à droite ou à gauche, je suis capable de tirer des deux côtés. J’observe la position du gardien avant de choisir mon coin. En général, je botte dans le coin situé derrière le mur mais je peux aussi tirer dans l’axe, comme contre Charleroi l’année dernière « .

2) » Je botte le ballon de l’intérieur du pied. Le ballon surplombe le mur avant de repiquer très vite. C’est un truc de Zola. Quand on préfère tirer de loin, comme Balaban, mieux vaut utiliser le cou du pied « .

3) » Devenir un spécialiste des phases arrêtées requiert beaucoup d’entraînement. J’ai appris que Juninho s’entraîne spécifiquement deux fois par semaine, à raison d’une heure et demie. On en voit les résultats. Je dois admettre que je m’exerçais davantage à Gand qu’à Anderlecht car Georges Leekens attache beaucoup d’importance aux phases arrêtées. En plus, au Sporting, je suis moins souvent chargé des coups francs, non seulement parce que nous sommes plusieurs à nous partager cette tâche mais aussi parce que l’adversaire commet nettement moins de fautes aux alentours du rectangle. C’est vraiment net : j’avais beaucoup plus d’occasions de botter un coup franc à proximité du but à Gand « .

4) » En Belgique, Balaban n’est pas mal. Il est le meilleur du championnat, avec Rapaic « .

Tom Soetaers {Genk}

Belge, 26 ans.

Le seul Belge du top cinq n’a émergé que cette saison. L’année dernière, de retour après cinq saisons aux Pays-Bas, il n’a guère été sollicité et n’a pas marqué. Durant l’exercice actuel, son tir en arc lui a permis de marquer trois buts, dont deux des 35 mètres, et de délivrer de nombreux assists.

1) » Peu importe. A Genk, nous sommes deux à nous charger des phases arrêtées : Thomas Chatelle et moi. Celui qui se sent le mieux tente sa chance. Je n’ai pas de préférence. Pour un gaucher, il est évidemment plus facile de se charger d’un ballon situé un peu à droite du but, pour surplomber le mur. Globalement, je préfère les envois de loin car le mur est logiquement plus éloigné. L’arbitre permet souvent au mur de se rapprocher, quand le coup franc est dans les parages du but « .

2) » Je botte toujours à fond. Certains joueurs le placent à l’instinct. Je n’y crois pas : ces ballons sont trop mous et les gardiens actuels sont tellement souples et costauds qu’ils les interceptent aisément. Il faut oser prendre des risques. Si le ballon se retrouve dans la tribune, c’est pas de chance. Mais si le tir est cadré, il est presque impossible à neutraliser « .

3) » Je ne tire pas mieux qu’avant. Simplement, maintenant, je peux me charger des phases arrêtées. J’en étais capable à l’Ajax mais c’était interdit et Genk ne m’y autorisait pas l’année dernière. Je suis en confiance, ce qui se traduit notamment en coups francs percutants. Je continue à m’exercer chaque semaine face à un mur en plastique « .

4) » Balaban est le numéro un de notre championnat. Il est capable de convertir un coup franc direct de près comme de loin « .

par matthias stockmans

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