LES SECRETS DU VALDES CATALAN

 » Ce que j’aimais, c’était mettre des buts et qu’ils m’embrassent. Mais au lieu de ça, c’est à moi qu’ils les mettaient. Et moi, je me retrouvais seul à aller rechercher la balle.  » La confession faite par Valdes à El País dépeint le portrait d’un homme qui ne voulait pas devenir gardien de but. Un poste tellement écoeurant qu’il lui a occasionné plus de larmes que de trophées.

Garder les buts du Barça était une souffrance. Trop lourde pour les épaules d’un gamin, qui ne tient que six mois lors de son premier séjour à la Masía avant de retourner dans le cocon familial.  » Chaque nuit était un drame « , raconte son frère Ricardo à Canal + Espagne.

Entraîné sur les plages des Canaries par son père, celui que l’Espagne du football surnommera la doble (référence à ses  » doubles initiales « , VV) revient à Barcelone à treize ans. Un soir, après avoir déposé leur fils à la Masía, père et mère profitent d’une porte restée ouverte pour fouler la pelouse du Camp Nou. Dans l’obscurité, le père désigne l’une des cages à son épouse :  » Un jour, tu verras ton fils jouer dans ce but.  »

La prophétie paternelle se réalisera. Parce que Victor a du caractère. Urko Pardo, aujourd’hui entre les perches de l’APOEL Nicosie, a côtoyé Valdes pendant huit ans en Catalogne :  » En plus d’être un mec sympa en dehors du terrain, ça a toujours été un gardien exceptionnel. Une fois sur la pelouse, c’était un gagneur. Il faut avoir un mental d’acier quand on évolue à cette place.  »

Le problème de la doble, ce n’est pas le mental, mais le plaisir. À 18 ans, il réunit sa famille pour leur dire qu’il veut en finir avec tout ça, laisser le football derrière lui parce qu’il n’est pas heureux. Et quand Louis van Gaal le renvoie dans l’équipe B après un match face à Valladolid en 2002, Victor ne se présente pas à l’entraînement.

 » J’ai appris le jeudi que j’étais écarté, que je devais m’entraîner avec eux le vendredi puis jouer le samedi. J’aurais voulu au moins un week-end pour réfléchir à tout ça.  »

Valdes est sanctionné, mais son histoire barcelonaise va seulement commencer. Il finira par s’installer durablement dans les cages du Barça, levant systématiquement les doigts au ciel au moment de fouler la pelouse. Un geste en hommage à son grand-père, que faisait déjà son père lorsqu’il jouait.

Les Valdes éviteront toujours de crier trop fort que papy était fan du Real. VV est assez critiqué comme ça. Au sein de ce Barça invincible, il est considéré comme l’anonyme chanceux, voire le point faible.  » Il est mauvais, mais il joue au Barça « , affirme Diego Maradona. Réponse de l’intéressé :  » On a toujours douté de moi, mais seuls les gardiens peuvent juger les gardiens.  »

Victor semble enfin heureux. Parce qu’il joue plus souvent avec ses pieds qu’avec ses mains, d’abord. Ensuite, parce qu’il peut compter sur la présence de son ami Andrés Iniesta, qui lui apporte  » de la paix et de la tranquillité « . Il joue même sa meilleure saison quand le sort s’abat sur lui lors d’un match face au Celta Vigo.

L’arbitre siffle un penalty alors que la faute est manifestement hors du rectangle. Capitaine, la doble va s’en plaindre auprès de l’assistant, qui contraint finalement l’arbitre à revenir sur sa décision. Coup franc pour le Celta, et rupture des ligaments croisés pour Valdes.  » Je l’avais dit à mes équipiers, tout se passait trop bien, quelque chose devait m’arriver « , confie l’homme qui s’est tatoué un capricorne sur son avant-bras gauche.

C’est donc blessé que Victor laisse Barcelone derrière lui, vendant même la maison à l’architecture follement futuriste qu’il s’était fait construire à Gava, là où vivent les joueurs du Barça.  » On m’a dit qu’il avait pris la décision de faire table rase du passé « , confirme Urko Pardo.

Monaco, qui avait un accord avec le gardien, mange sa parole suite à cet incident. Valdes se relance seul, au caractère. L’instantané de sa blessure lui sert de photo de profil sur WhatsApp, accompagnée de la phrase suivante :  » Je me suis cassé le genou, mais je n’ai pas relâché le ballon.  »

PAR GUILLAUME GAUTIER AVEC DAVID DUPONT

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