» Le public de Sclessin me donne des ailes ! « 

Toujours motivé par son objectif de gagner le plus de prix et d’argent possibles, l’arrière droit du Standard n’a pas changé depuis ses débuts.

Ronnie Stam :  » Si j’ai quitté l’Angleterre pour la Belgique, ce n’était pas pour me rapprocher de Breda, ma ville. Les gens pensent que je ne peux pas m’en passer mais c’est faux. Je m’y plais, je suis le NAC quand j’en ai l’occasion mais si je reçois une offre intéressante de Chine dans quelques années, je n’hésiterai pas. Comme à Breda, Enschede, Wigan et Liège, j’y vivrai pour mon sport.

Depuis dix ans, je ne fais que dormir, manger et m’entraîner. Je ne suis pas Lionel Messi. Je peux apporter quelque chose à n’importe quelle équipe à condition d’être affûté. Je ne suis pas un rêveur. Je n’ai jamais cru obtenir un contrat dans un grand club ni jouer en équipe nationale. Je pars d’un principe : si je me donne à fond jour après jour, j’obtiendrai ce à quoi j’ai droit.

J’aimerais évidemment gagner la Coupe du Monde mais je n’ai apparemment pas prouvé que je méritais ma chance. En 2009-2010, je pensais être le meilleur arrière droit des Pays-Bas avec Gregory van der Wiel mais Bert van Marwijk ne partageait pas cet avis. Pas plus que Louis van Gaal. Chaque entraîneur a ses préférences.

Le Standard, un saut dans le vide

Je suis content de mes choix, jusqu’à présent. Le Standard représentait un saut dans le vide. Je m’étais gravement blessé à la cheville durant mon dernier match pour Wigan Athletic et j’ai dû être opéré. Wigan disputait la finale de la Coupe, était rétrogradé et j’arrivais en fin de contrat. Quelques clubs anglais se sont manifestés mais le mercato n’était pas encore vraiment lancé.

C’est alors que Stan Valckx m’a téléphoné. Il a été mon premier agent, quand il travaillait pour le bureau de Kees Ploegsma senior, et nous sommes restés en contact. Il m’a parlé du Standard. Un grand club, qui voulait être champion, ça sonnait bien. Après trois ans à lutter contre la relégation avec Wigan, c’était attrayant. En plus, ce stade fantastique et ces supporters fanatiques me plaisaient. Les fans du Standard sont parmi les plus fous du Benelux et j’aime ça. Plus il y a de la ferveur, mieux je me sens.

Le Standard restait sur des années très décevantes et il fallait qu’il se passe quelque chose. Guy Luzon, le nouvel entraîneur, voulait un arrière droit offensif et avait récolté des informations sur moi auprès de collègues de Premier League. Il m’avait aussi visionné et me voulait. J’ai donc demandé à mon ami Mohammed Sinouh d’entamer les négociations.

Mo est agent mais je n’en ai pas de fixe. En bon copain, il m’aide quand je le lui demande, et bien. Le contrat était superbe, vraiment top. Il n’y avait qu’un problème : le président Roland Duchâtelet jugeait irresponsable d’offrir un contrat de trois ans à un joueur qui n’était pas encore rétabli, ce que je peux comprendre. J’avais passé deux mois dans le plâtre.

On m’a proposé d’effectuer ma revalidation au Standard, sans contrat. Dès que le physio donnerait son feu vert, j’obtiendrais le contrat. C’était parfait. Après trois semaines de mobilisation, il m’a fait courir sur le tapis roulant. Je suis allé jusqu’à 20 km/h, à fond donc. J’ai obtenu mon contrat mais il m’a fallu des mois pour retrouver ma forme.

Au poil avec Ruiz et Tioté

En octobre, c’était chose faite mais l’équipe tournait bien. Daniel Opare jouait bien. L’entraîneur m’a fait jouer de temps en temps mais après la trêve hivernale, il a opté pour l’équipe qui avait si bien entamé la compétition. La blessure de Daniel m’a permis de devenir titulaire et de le rester, jusqu’à ce que je tombe malade. L’entraîneur a été honnête. Il avait simplement deux bons arrières latéraux.

Les gens ont toujours cru que je ne jouerais que pour le NAC. C’est le club de mon coeur mais après cinq ans, je pensais pouvoir viser plus haut, je voulais faire carrière, sportivement et financièrement, et j’ai opté pour le FC Twente, qui a versé deux millions bienvenus au NAC. J’ai insisté sur la chance que je recevais. Je n’ai compris que plus tard que ce n’était pas sympa à l’égard des supporters du NAC. Je me rattraperai à mon retour. Car j’y reviendrai, peut-être comme joueur, sûrement comme directeur technique.

A Twente, j’ai vu comment un entraîneur formait une équipe à succès. Nous avons été deuxièmes puis premiers. Steve McClaren avait soudé l’équipe, tout fonctionnait. Je m’entendais parfaitement avec Bryan Ruiz sur le flanc droit. On voulait tous progresser. J’ai travaillé mes points faibles comme un forcené. Je m’étais toujours bien soigné mais j’ai découvert que mon jeu de tête était perfectible. Plusieurs fois par semaine, après l’entraînement, je travaillais cet aspect avec Cheick Tioté. Je devais remettre de la tête les ballons qu’il m’envoyait. Défensivement et offensivement. Je ne serai jamais un spécialiste du jeu aérien mais j’ai progressé.

Les gens ne me pensent pas capable de tels efforts mais pour moi, des séances de course en plus des entraînements sont fréquentes depuis des années. Un de mes points forts, c’est de pouvoir arpenter le flanc, parce que j’ai un gros moteur. Ça s’entretient. Même en vacances. Peu importe où je me trouve mais après deux semaines de repos, j’ai besoin de courir. Sur la plage de Miami, en montant et en descendant les escaliers. Chaque été, je mets tout en oeuvre pour être en forme dès le premier entraînement. C’est cette volonté qui m’a permis de réussir ma carrière.

Un salaire multiplié par trois en Angleterre

J’ai évolué en Premier League. Il y a de quoi être fier. Ça n’a pas été facile, d’ailleurs, car les conditions sont très différentes des Pays-Bas. Par exemple, je ne pouvais signer que si je passais par tel manager. Heureusement, ça ne m’a pas handicapé car mon contrat avec mon agent du moment, Chiel Dekker, venait de prendre fin. Ensuite, les Anglais se sont rendu compte que je m’étais blessé, comme l’année dernière avant de rejoindre le Standard. Ce n’était pas grave mais ils ont retiré leur offre de trois ans en dernière minute : je ne pouvais plus signer que pour une saison. Heureusement, le manager du club, Roberto Martinez, était de mon côté. Je lui ai téléphoné, du bureau du directeur, et je lui ai dit que je n’étais pas venu en Angleterre pour un an. Il a parlé au directeur et en une minute, tout était réglé. J’ai signé pour trois ans, avec un salaire trois fois supérieur à celui que m’offrait le FC Twente. J’étais aux anges mais j’ai ensuite appris que c’était un salaire normal en Premier League. Notez, ça ne m’a pas fait grand-chose : peu m’importe ce que gagnent les autres, pour autant que je sois satisfait de mon salaire. Je suis un arrière latéral, pas un avant qui inscrit vingt buts par saison.

Même si je n’ai pas toujours été titulaire, je pense avoir réussi cette aventure : 70 matches en trois saisons, ce n’est pas mal. J’ai toujours eu de bonnes cotes dans la presse, les entraîneurs de Wigan ont toujours été positifs. J’ai montré que je pouvais apporter quelque chose au plus haut niveau. J’ai eu la malchance de jouer pour une équipe qui s’est battue trois ans de suite contre la relégation. L’entraîneur me préférait souvent un géant de deux mètres qui restait en arrière et dégageait tous les ballons. Je le comprenais, d’ailleurs. Un entraîneur qui perd sept matches de suite n’est plus sûr de lui et il mise sur la défense.

Déçu par le niveau de la Premier League

La Premier League est cruciale pour ces clubs. Durant les dernières semaines de la saison, notre président, Dave Whelan, passait dans le vestiaire avant chaque match. Il nous rappelait l’importance du maintien. Et il augmentait chaque fois la prime de maintien. Un montant fixe était convenu mais en fin de saison, il augmentait presque de semaine en semaine. Pendant ma première saison, c’était 90.000 euros pour chaque joueur. Ça a l’air colossal mais une rétrogradation coûtait bien davantage au club, à cause de la perte des droits TV.

Malheureusement, durant ma dernière année, malgré la prime, nous avons été relégués, tout en gagnant la Coupe. J’ai disputé cinq des sept matches de ce tournoi et sans blessure, j’aurais joué à Wembley. En Angleterre, quand vous n’êtes pas assez bon, on vous écarte après un an. On se moque bien de perdre ainsi son capital. Moi, on ne m’a jamais mis à la porte. J’ai toujours été un joueur important du noyau.

J’ai déjà expliqué que le niveau m’avait déçu. La Premier League est un cirque. L’attention massive du public dégage beaucoup de fonds et la passion fait le reste mais le football n’est pas bon du tout. Faites disputer Sunderland-Norwich dans le stade du FC Eindhoven, devant 4.000 personnes, et elles ne reviennent plus jamais. Vraiment, indépendamment du top huit, le niveau du jeu est mauvais. On ne s’entraîne pas dur. C’est de la thérapie occupationnelle.

Certains jours, nous ne passions que trois quarts d’heure sur le terrain. Nous n’avions jamais deux séances par jour et souvent, nous avions au moins deux jours de congé par semaine. Parfois trois ! Ce n’est pas illogique quand on dispute 60 matches par an mais des clubs qui jouent pendant des mois le samedi, comme Wigan, pourraient s’entraîner davantage. Je pense que c’est typiquement britannique. Moi, je m’entraîne pour améliorer ma condition alors qu’en Angleterre, on ne le fait que pour rester en forme.

Jouer en Premier League est super mais le niveau est inférieur à celui de l’Allemagne et de l’Espagne. Ne me comprenez pas mal, je m’y suis amusé. Les Anglais vivent le football d’une manière fantastique. Les gens ont une autre mentalité : ils vous accordent tout pour autant que vous donniez tout pour votre club à chaque match.

Pour les trophées et l’argent

Je joue au football pour gagner des trophées et, bien sûr, de l’argent. J’ai été important l’année au terme de laquelle le FC Twente a été champion et j’ai eu ma part dans la victoire en Coupe de Wigan. Combien de joueurs ont-ils remporté des prix avec ces clubs ? Très peu. Et maintenant, je lutte pour le titre avec le Standard. J’aime la pression que cela engendre, jour après jour. Nos supporters sont tellement formidables… Dans les tribunes, 30.000 personnes poursuivent le même objectif que moi. Si nous perdons, ce qui n’arrive pas souvent, heureusement, elles sont fâchées. Moi aussi ! Ce public me donne des ailes. Après le match, ces gens restent groupés derrière un des buts, nous allons vers eux, c’est une sorte de rituel. J’en ai la chair de poule.

J’aime le championnat de Belgique. Ici, il n’est pas facile d’être champion. Anderlecht, le Club Bruges, le Racing Genk, Zulte Waregem, nous… Ça fait cinq clubs qui peuvent être sacrés et il y a encore ces play-offs. Il faut repartir à zéro après trente matches. C’est terriblement passionnant. Regardez à quel point le classement était serré l’année dernière. C’est quand même chouette, non ?

Je suis assez régulier mais je me surpasse de 5 % dans les grands matches, grâce à l’adrénaline. Certains joueurs calent sous la pression mais chez moi, c’est le contraire. Je ne marque pas beaucoup, de mon poste, mais quand j’y parviens, c’est un moment important. Il y a des années, le NAC a disputé les play-offs et s’est maintenu grâce à mon but contre le FC Oss. A Twente, j’ai inscrit le but de la victoire contre Vitesse, lors du week-end où l’Ajax pouvait nous dépasser si nous ne nous imposions pas.

Ronnie et sa grande gueule

Je suis professionnel depuis un bout de temps mais je ne pense pas avoir changé. Je reste le même Ronnie, avec sa grande gueule. Ça posait problème à Twente. A mon départ, le club m’a dit que j’étais pénible au sein du groupe mais il tient souvent ce genre de propos quand des joueurs décident de s’en aller. Ceci dit, je ne prétends pas que c’est faux. J’ai un caractère différent. Je viens de la rue. J’ai toujours respecté les autres mais quand je ne suis pas d’accord, je le dis plus vite. Je suis agité, aussi. Mais je n’arrive jamais ivre à l’entraînement, je ne me dispute pas facilement et je me livre toujours à fond. Tous les jours. Même après dix ans.

Les sommes importantes que je gagne ne m’ont jamais fait tourner la tête. Quand j’étais au NAC, tout jeune, j’allais toutes les semaines au casino. Je jouais au blackjack avec quelques coéquipiers. C’était pour le plaisir mais ça coûtait de l’argent, évidemment. A la longue, ça peut être fatal. Je l’ai compris et j’ai arrêté à temps. Je n’ai pas commis d’autres faux pas. En Angleterre, j’ai roulé en Bentley une saison. Le club me l’avait fournie en leasing. Jamais je n’imaginerais acheter une voiture pareille.

Maintenant, j’ai une Mercedes et une Volkswagen Polo. J’ai une Rolex, offerte par Twente à l’occasion du titre. Je n’éprouve pas le besoin de passer mes vacances à Miami ou dans un autre endroit luxueux. J’y suis déjà allé mais cet été, je me suis rendu avec autant de plaisir au camping de Salou. Avec mes parents et ma famille, pour jouer au foot sur la plage avec mon fils de trois ans. Et pour courir, évidemment. Même en vacances, je reste un sportif professionnel.  »

PAR THIJS SLEGERS

 » Certains calent sous la pression. Moi, c’est le contraire.  »

 » Les fans du Standard sont les plus fous du Benelux. J’adore ça.  »

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