Le plan de la Ligue Pro: Casino Royale et compagnie low-cost

Il y a dix jours, quand la Ligue Pro a proposé sa réforme de la D1, certains allèrent bien trop vite en besogne en parlant de  » journée historique du foot belge « . On aurait tout d’abord pu préciser que ce plan devait être soumis au vote de l’assemblée générale de l’Union Belge fin juin pour avoir une vraie chance d’exister. D’ailleurs, l’UB n’a pas considéré que l’accord valait la mention sur son site internet… Et elle a bien fait : elle ne peut pas donner la plus petite impression d’être d’accord sur la manière dont le président de La Gantoise et de la Ligue Pro Ivan De Witte a présenté l’enfant. On sait depuis belle lurette que le courant ne passe pas entre les deux familles et ça ne s’arrange pas entre la D1 et une D2 qui se sent bafouée.

De Witte n’a pas sondé la D2 pour parvenir à un accord sur les descentes et montées à partir de la prochaine saison-charnière et sur le prix de l’accord (la D2 aimerait au moins dix millions d’euros des droits de TV et refuse l’aumône de trois millions !). Pire, Pierre François, le directeur général du Standard, a dit qu’on avait assuré aux clubs de D1 que la D2 serait d’accord avec le plan. Ce n’est pas la première fois que le businessman-psychologue des Buffalos met à mal certains principes. Et dire que certains suiveurs se précipitent pour lui tisser une cape de chevalier blanc de notre football…

Les jours qui viennent risquent de voir les bases de la belle entente  » historique  » entre les clubs de D1 durement testées. Et quand la pression s’installe, les manitous de l’élite ont toujours du mal à réfréner leurs ego et à voir le bien commun. Cela dit, le plan pour la saison 2009-2010 ne manque pas de bonnes idées. Le concept est clair : une D1 à 16 clubs avec deux mini-championnats après la phase classique (un entre les clubs classés de la première à la sixième place pour lequel les clubs conservent la moitié de leurs points acquis et un autre entre les huit clubs classés derrière sans conserver de points). Quant aux modalités de descente en D2, rien n’est encore précisé.

Le champion accédera directement à la phase des poules de la Ligue des Champions, le deuxième aux préliminaires, le troisième ira en UEFA tout comme le vainqueur de la Coupe. Enfin, le vainqueur du deuxième mini-championnat disputera un test-match avec l’équipe du top 6 hors les places déjà attribuées pour le dernier ticket UEFA.

Positif : le fait que les deux mini-championnats de 10 et 14 journées ne pourront être qu’intenses, de même que la lutte constante dans la phase classique pour y accéder. Plus de ventre mou peuplé d’équipes concernées ni par le titre, ni par la descente. L’implication reste forte, pratiquement comme en début de saison quand tous les clubs sont gonflés d’espoirs.

La société hollandaise Hypercube qui a étudié le concept (et été payée des fortunes par la Ligue Pro) a observé que la réforme hollandaise avait fait passer son assistance globale de 4,9 millions de personnes à 5,8 en deux ans et prévoit que les recettes guichets de la D1 augmenteront de 20 % sur la même période (ce ne sera pas du luxe pour investir dans des terrains chauffés partout). Hypercube évacue la question de la lassitude chez les spectateurs parce que le suspense sera toujours présent. Les joueurs joueront-ils trop ? Ce n’est rien par rapport à la soixantaine de matches que les grandes équipes européennes avalent. Bref, ce sera Casino Royale.

Négatif : on ne sait pas comment, à la fin de la saison prochaine, passer de 18 à 16 clubs pour la saison du changement (de la même manière qu’on ignore comment la descente vers la D2 sera réglée dans la nouvelle D1). Et comment justifier sportivement qu’un club issu des places 7-14 décroche une place en UEFA ? Ce n’est pas ça qui va renforcer notre efficacité européenne. Mais c’est la carotte que la Ligue Pro tend à la D1 et à la D2 ( » Rendez-vous compte : un club montant possède une chance réelle de coupe d’Europe. En un an de la D2 à l’UEFA ! « ). Ici, le plan agit comme les compagnies aériennes low-cost qui proposent des tickets à 1 euro. Et c’est de la publicité mensongère : il n’y a qu’un ticket à ce prix-là.

PAR JOHN BAETE

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