LA D2 VIT-ELLE AU-DESSUS DE SES MOYENS ?

Chaque semaine, Sport/Foot Magazine pose la question qui fait débat.

Un mouroir, un cimetière, l’enfant pauvre du foot belge. Ce sont les expressions qui reviennent souvent pour décrire notre division 2. Et celles-ci proviennent fréquemment de la bouche des présidents de clubs qui considèrent que les moyens octroyés à la BelgacomLeague sont largement insuffisants. Récemment d’ailleurs, l’antichambre de l’élite faisait l’actualité de manière négative sur le sujet des licences.

Cinq formations se sont vues refuser la précieuse licence sans laquelle un club ne peut pas rester en D2 : Tubize, Hoogstraten, le RWDM Brussels, Saint-Trond et l’Antwerp. Ce qui est étonnant, c’est que parmi ces cinq teams, quatre jouent pour la montée : Tubize, le RWDM Brussels, Saint-Trond et l’Antwerp. Cela relance une question brûlante : les clubs belges ne vivent-ils pas au-dessus de leurs moyens à cet échelon ?

Pour RaymondLangendries, président de l’AFC Tubize, ce n’est pas la bonne question à poser.  » Le problème, ce n’est pas tant les dépenses que les moyens accordés aux clubs de D2. Soit on nous fournit ces moyens, soit on arrête de demander aux clubs de D2 d’être des clubs professionnels avec 17 joueurs sous contrat, un T1, un T2, un médecin, etc…

Tout cela, il faut le payer comme dans une entreprise. Quand vous jouez correctement le jeu et que vous payez votre personnel légalement, vous ne pouvez plus survivre. Et puis, si vous voulez être un petit peu compétitif, il faut tout de même avoir dans votre noyau des joueurs de qualité, et ceux-ci ne sont pas gratuits.  »

Gare aux irrégularités !

Cette plainte, GuidoDeCroock, président de la D2 belge, la connaît bien et, pour lui, la situation est plus compliquée.  » Le problème est que cette réglementation de la fédération a été fixée par une convention collective de travail et que, pour le moment, nous ne pouvons rien faire pour la changer car il faudrait un accord entre patrons et syndicats pour ce faire. Nous avons mis en place cette règle de 17 joueurs au minimum sous contrat pour obtenir la licence afin de lutter contre le fléau des joueurs payés au noir.  »

Pour lui, toutefois, certains clubs vivent bel et bien au-dessus de leurs moyens :  » Dans la D2, il faut faire la distinction entre les clubs vraiment professionnels comme l’Antwerp et les autres qui emploient surtout des joueurs qui ont un autre travail à côté. Ceux-ci sont sous contrat à mi-temps pour le club. Si tous prenaient plus de joueurs sur ce mode, leur situation serait bien meilleure. Je pense que l’on doit compter entre 8.000 et 10.000 euros par an pour le salaire de joueurs dans cette optique, ce qui n’est pas insurmontable.

C’est vrai que les bons joueurs sont souvent professionnels mais prenons un élément comme Laurent Depoitre. Il y a quelques années, il jouait à Péruwelz et maintenant il est à Gand. Pourquoi jouait-il encore en D2 il y a quelque temps ? Parce qu’un contrat à plein temps n’était pas compatible avec ses études universitaires. Il y a donc beaucoup de qualité en D2, même avec des joueurs employés à mi-temps.  »

Certains clubs ont trouvé un autre moyen de réduire les coûts salariaux : offrir un salaire minimum à leurs joueurs et faire passer le reste dans des primes de déplacement estimées à la hausse.  » Je suis au courant de ces pratiques « , explique le président De Croock.  » Ces clubs prennent un énorme risque, tout comme ceux qui payent leurs joueurs au noir. Il faut savoir qu’il n’y a pas de contrôle au niveau de la fédération pour les clubs en dessous de la D2 qui ne demandent pas leur licence, mais le risque est de plus en plus grand d’être contrôlé par le fisc. Les contrôleurs vont de plus en plus s’intéresser au football dans les divisions inférieures et si des irrégularités sont constatées, cela signifie presque toujours la fin du club.  »

Une réforme qui divise

Contrairement à la formation brabançonne, le KSK Heist a pu obtenir sa licence directement avec un budget presque équivalent à celui de Tubize. Du côté du domaine sportif par contre, les rôles sont inversés puisque Heist lutte pour ne pas descendre en Division 3.  » J’ai toujours dit que le côté sportif était le plus important tant que cela ne menaçait pas la bonne gestion du club « , nous confie PatrickWijns, le président du club de Heist.

 » Le sportif n’a jamais été un problème pour nous, en D2. En revanche, le financier l’est. Nous avons aussi des problèmes, comme les autres, et il est très difficile en tant que club professionnel de survivre à cet échelon.  »

La différence entre les deux clubs pourrait en partie être expliquée par le nombre de joueurs sous contrat. En début de saison, ils étaient 27 à Tubize contre 17 à Heist. Il existe également une différence notable entre les droits TV perçus. Là où Heist touchera cette année 25.000 euros en deux fois, Tubize n’a perçu que la somme de 10.000 euros selon son président. Une information que Belgacom, le gérant des droits TV, se refuse à confirmer.

Ces montants restent tout de même ridicules si on les compare avec ceux qui sont distribués dans d’autres championnats. Cela reste une revendication principale des clubs de D2. Pour Guido De Croock, la situation pourrait changer avec des changements en préparation :  » Nous pensons à une réforme de la D2 avec deux séries : une A qui rassemblera les grands clubs et sera plus intéressante pour la télévision et une B avec les dix autres formations de deuxième division.

Vu que les clubs de la Série B perdront toutes leurs grosses affiches, il faudra en tenir compte dans l’octroi des droits TV. Je suis en contact avec la D1 et j’attends une proposition de sa part pour le partage de l’argent des droits à la fin du mois.  » Une réforme que Patrick Wijns juge, lui, injuste et inégalitaire.

Finalement, le seul point sur lequel nos trois interlocuteurs s’accordent c’est que la Division 2 belge n’est pas viable à terme, que les clubs vivent au-dessus de leurs moyens ou non. Elle devra se réformer si elle ne veut pas tomber en faillite dans les prochaines années.

PAR OLIVIER EGGERMONT

 » Le problème, ce ne sont pas les dépenses mais les moyens accordés aux clubs de D2.  » Raymond Langendries, président de l’AFC Tubize

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