Bruno Govers

John van den Brom : De roi mage à roi fainéant

« On pratique enfin un football moderne« . La phrase est d’Emile Servranckx, administrateur du RSCA, au terme du match Malines-Anderlecht, remporté 1-4 par les visiteurs le 3 novembre 2012. Jusqu’alors, le déplacement derrière les célèbres casernes malinoises n’avait guère souri aux Sportingmen. Mais ce soir-là, pressing incisif dans le camp des Sang et Or et combinaisons du meilleur aloi étaient au rendez-vous. Les Mauves avaient ni plus ni moins étouffé leur adversaire. A l’époque, ils allaient d’ailleurs réussir la gageure d’aligner une série de 12 victoires d’affilée en Jupiler Pro League. Et avec la manière ! Pour la première fois depuis longtemps, on pouvait vraiment parler de football-champagne dans le chef du glorieux club bruxellois.

Après la trêve hivernale, toutefois, les bulles eurent tôt fait de retomber. La bouderie de Lucas Biglia d’abord, soucieux d’obtenir son bon de sortie, puis l’absence de Dieumerci Mbokani, retenu par la phase finale de la Coupe d’Afrique des Nations, eurent pour effet de stopper net l’équipe dans son élan. Dès lors, l’avance substantielle que Silvio Proto et les siens s’étaient concoctés au classement, fondit comme neige au soleil. Du coup, les pensionnaires du stade Constant Vanden Stock durent attendre la dernière journée des play-offs, grâce à un partage étriqué face à leur dauphin, Zulte Waregem, pour arracher sur le fil un 32e titre de champion de Belgique. La classe de leur médian argentin, auteur du but égalisateur, de même que le métier des chevronnés du team, à l’image de Dieu ou de Milan Jovanovic, avaient contribué à faire in extremis la différence.

Cette saison, en raison de la volonté du club de rajeunir les cadres, John van den Brom dut composer sans eux. A charge, pour lui, de bâtir une nouvelle phalange faisant la part belle aux jeunes. Au même titre qu’à ses débuts, lorsqu’il avait lancé dans la bataille des espoirs tels Massimo Bruno et Dennis Praet, le coach hollandais poursuivit sur cette lancée en titularisant des novices comme Frank Acheampong, Youri Tielemans ou Andy Najar. Mais, ce coup-ci, la greffe n’eut pas le même effet. Et les résultats, eux, ne furent plus au rendez-vous non plus. Non seulement en Ligue des Champions, soldée par un pauvre 1 sur 18, mais aussi sur la scène nationale, où les défaites s’accumulèrent.

Pour rectifier le tir, le coach néerlandais multiplia les compos différentes. Il se distancia aussi de sa philosophie pour s’adapter de plus en plus au système mis en place par l’opposant. Même si celui-ci, à l’image du Lierse, n’avait rien d’un foudre de guerre. A l’instar de ses compatriotes Adrie Koster, Ron Jans ou Mario Been, John van den Brom avait un plan A à son arrivée chez nous. Mais comme ses compatriotes, il n’a jamais su trouver l’astuce pour relancer la machine dans l’adversité. Au contraire, il s’est enfoncé et entêté tant et plus. Aux entraînements, il n’a plus jamais juré que par des toros, snobant tout autre variante. Dans ces conditions, on comprend que Samuel Armenteros, à son retour aux Pays-Bas après un séjour manqué au Parc Astrid, se soit ému de ne jamais avoir eu droit à la moindre séance de préparation tactique à Neerpede.

A la longue, JVDB ne savait même plus à quel saint se vouer. Il en résulta une forme de désinvolture à l’entraînement. A l’étage, certains observateurs ayant pignon sur pelouse, l’affublèrent d’ailleurs d’un surnom éloquent : le roi fainéant. De quoi contraster singulièrement avec l’étiquette de roi mage que d’autres, en haut lieu, lui avaient accolée à l’automne 2012, quand tout lui souriait.

Un ancien de la maison lui trouva un autre sobriquet tout aussi éloquent : van den Brol. Double allusion, d’une part, à un onze de base sans cesse remodelé et, de l’autre, à l’absence totale de fil conducteur dans la matière fournie aux joueurs. A Besnik Hasi, à présent, de sauver ce qui peut encore l’être à l’ombre de Saint-Guidon. Mais vu l’indigence de son devancier, faire mieux ne devrait pas être insurmontable.

Bruno Govers

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