Je n’ai jamais été ovationné comme à Gaziantepspor

 » Il faut vivre le football au quotidien en Turquie : c’est unique. En tant que joueur, je me suis mesuré à Fenerbahçe avec Anderlecht en Coupe des Champions en 1965-1966 (0-0 à Istanbul, 5-1 chez nous) et on devinait déjà que ce pays ne tarderait pas à devenir une puissance du football. A cette époque, j’ignorais qu’on me verrait un jour dans un training de coach à Ankara. J’avais entendu parler de cette ville grâce aux reportages de Luc Varenne à la RTBF radio. Après avoir quitté Seraing en 1995, j’ai été contacté par un ami d’enfance d’origine turque de mon fils, Stéphane. Il me parla de Gençlerbirligi d’Ankara. C’est le club de l’élite de la capitale turque et le président était intéressé par mon parcours sérésien, évidemment, mais surtout par mon acquis lillois. Gençlerbirligi entendait ériger un centre de formation et j’y ai apporté des idées françaises. Ce club s’est très vite doté d’un outil de travail exceptionnel. L’argent ne pose pas un gros problème dans les clubs turcs qui appartiennent généralement à des capitaines d’industries. A peine arrivé à Ankara, j’avais oublié mon portefeuille sur le toit d’une voiture. Un passant a attendu plus d’une heure, le temps que je revienne, pour me rendre mon bien. Je suis resté une saison à Gençlerbirligi que j’ai qualifié, comme mon prédécesseur, pour la Coupe Intertoto.

Ma demande d’augmentation salariale ayant été refusée, je me suis retrouvé un an plus tard à Gaziantepspor, dans le sud-est de l’Anatolie. L’ambiance était différente mais intéressante, dans une région plus calme qu’à Ankara. J’y ai fait venir Yaw Preko, Isaias, DésiréMbonabucya, etc. Débauché à Anderlecht, Preko avait été acquis pour un million de dollars. Et il se débrouilla bien en Turquie. Notre début de championnat fut bon et on me parla durant cette série d’une tradition régionale. Après la première défaite, les supporters sacrifiaient toujours un mouton pour conjurer le sort. Et c’est qui est arrivé au bout de cinq rencontres. J’ai traversé le stade et un supporter me marqua le front avec le sang de l’animal qui venait d’être immolé. J’ai tout vécu et remporté de nombreux succès au cours de ma carrière. J’ai eu droit à pas mal d’acclamations mais je n’ai jamais été ovationné comme ce soir-là à Gaziantep-spor. Les supporters avaient apprécié que je partage avec eux une de leurs coutumes. Je garde un grand souvenir des matches disputés à Fenerbahçe, Galatasaray ou Besiktas. Mais il ne faut pas oublier l’essentiel : si le football vibre à ce point là-bas, c’est d’abord parce que les grands joueurs turcs sont nombreux.  »

né en 1941, heylens fut un excellent back droit (67x diable rouge, équipe d’europe 65, mondial 70 au mexique, 7 titres et 3 coupes de belgique avec anderlecht). coacha une douzaine de clubs (passa 5 ans au losc et fut coach belge 1984 à seraing)

propos recueillis par pierre bilic

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