Hype et sexy

Le Kavé a survolé le tour final et retrouve la D1 délaissée par le Lierse.

C’est après cinq journées que le tour final a livré son verdict. Une journée avant la fin. Young Red KV Mechelen a décroché son ticket pour la D1 après un parcours presque parfait. Le Lierse n’a donc pas pu rééditer son exploit de la saison passée (et du défunt championnat). Après 18 ans en D1, et dix ans après leur titre de champion, les Lierrois retrouveront le purgatoire de la D2.

Mais plutôt que de s’apitoyer sur le descendant, saluons plutôt la performance malinoise. Il n’aura fallu que quatre ans au Kavé pour surmonter la faillite. Deux ans en D3, deux ans en D2, et revoilà déjà les Sang et Or parmi l’élite. Autant ils ont survolé le tour final, autant le match du sacre fut pénible pour eux. Dimanche, face à Courtrai, qui n’avait toujours pas récolté un seul point, les Malinois se sont imposés dans la douleur. Les Courtraisiens ont mené deux fois au score, obligeant leur adversaire à une course poursuite. Nonante minutes durant, les hommes de Peter Maes ont assiégé le but de Peter Mollez. Deux tirs sauvés sur la ligne, une transversale et un poteau, un penalty et un but refusé. Tous les ingrédients de la malchance étaient réunis pour postposer le sacre malinois. Mais l’offensive a porté ses fruits. Et une fois le troisième but inscrit, le Kavé a continué son jeu léché. Car, Malines joue bien. Très bien. Si la défense faillit à certaines occasions (comme ce fut le cas notamment sur les deux buts de Courtrai), l’attaque est plaisante à voir jouer.  » Ce fut vraiment dur pour nous « , expliquait Issame Charai en pleine euphorie.  » Pourtant, on était appliqué. On s’est porté à l’assaut du but adverse dès les premières minutes. Mais on a commis deux erreurs derrière et Courtrai en a profité pour marquer deux fois « .

Pourquoi Malines a réussi son tour final ?

Malines a séduit les observateurs durant ce tour final. Son moins beau match fut le premier disputé à l’Antwerp (0-0). Battus deux fois en championnat par les joueurs de la Métropole, les Malinois craignaient leur adversaire. D’autant plus que l’Antwerp avait lâché sa fin de championnat dans l’optique de ce tour final. La victoire 1-0 dans un stade comble lors du deuxième match a libéré les jeunes du Kavé. Ils se sont rendus compte de leur supériorité et ont alors joué sans complexe, s’améliorant de match en match. Au Lierse, les Malinois ont offert une leçon de football à leurs hôtes durant une mi-temps. Jeu sobre, en un temps avec quelques touches techniques. Ceux qui semblaient dubitatifs sur la qualité du jeu de Malines ont du revoir leur jugement. Sur ce qu’il a montré au Lierse et contre Courtrai, le Kavé a sa place en D1.

De plus, que ce soit à domicile ou en déplacement, les Malinois peuvent compter sur le soutien inconditionnel de leurs supporters. Au Lierse, jeudi, un déplacement de quelques kilomètres, il y avait 15 bus de supporters malinois. Dimanche, l’espace réservé aux visiteurs était remplie à ras bord. Une partie de la tribune centrale courtraisienne avait même été réservée aux Sang et Or. Ils étaient donc 3.000 au stade des Eperons d’Or. Cinquante bus avaient fait le déplacement. Peu de clubs de D1 peuvent rivaliser avec une telle ferveur.

Quels sont les joueurs clés ?

Le Kavé manque cruellement de planches et peu de noms retentissants sont à épingler. Seuls Bert Dhont, Bjorn Vleminckx, Kenneth Van Goethem et Bart Van Zundert ont connu la D1. Or, Dhont quittera le club la saison prochaine. Par contre, les supporters pourront toujours compter sur leur idole : Vleminckx, jugé trop léger à Beveren, a pris une autre envergure. En début de tour final, les observateurs estimaient que par rapport à l’Antwerp avec Fraizer Campbell et au Lierse avec Bob Peeters, Malines ne disposait pas de vrais buteurs. Pourtant, avec 16 goals à son compteur, Vleminckx a réussi son championnat. Dans le tour final, il a été prépondérant puisqu’il a inscrit quatre des neuf buts malinois.

D’autres joueurs ont marqué les esprits. Olivier Werner (à l’Antwerp et au Lierse) a été décisif. Ce gardien liégeois a le sens du spectacle. Issame Charai (trois buts au tour final), sur son flanc droit, a posé d’énormes problèmes aux défenses adverses. Et que penser de la prestation du tout petit (1,66m) serbe Antun Dunkovic qui a le sens de la dernière passe et qui n’avait pourtant pas débuté le tour final. Le capitaine Nana Asare (20 ans !) est également un élément important. La défense centrale est aussi solide : Jonas Ivens est suivi par des cercles de D1.

Malines mérite-t-il son ticket pour la D1 ?

 » Nous avons largement mérité notre accession à l’élite « , lâche le président malinois Johan Timmermans,  » Nous avons pratiqué le plus beau football des quatre prétendants. C’est le couronnement de toute la saison car on a travaillé très dur. Nous avons terminé deuxièmes au classement du championnat, ce qui aurait déjà dû nous conduire directement en D1. Ce tour final, c’est la cerise sur le gâteau. Je remarque qu’il y a, à tous les niveaux, une grande faim de football dans le club. Cela m’apporte une grande satisfaction. Les joueurs ont fait preuve d’une énorme fraîcheur mentale. Ils ont écrit le début d’une nouvelle histoire « .

 » Malines est un club où chaque joueur sait exactement ce qu’il vaut. Bert Dhont, un vrai clubman, en est le parfait exemple. Il est en fin de carrière mais a réussi à évoluer au-dessus de son niveau pendant tout le championnat. Et puis, il faut aussi souligner les mérites de notre entraîneur. Peter Maes a osé jouer au football, se basant sur nos propres forces « .

Malines est-il assez mature pour la D1 ?

 » Malines vit plus que jamais. C’est une équipe hype, jeune et sexy. Le potentiel est présent. A nous de bien l’utiliser « , continue le président.

 » Je ne me laisse pas griser par le succès « , ajoute Timmermans,  » Nous devons rester sur le qui-vive et je suis certain que nous traverserons des difficultés. Notre ambition est de construire quelque chose en D1. Toute place est bonne à prendre, si ce n’est la dix-septième ou dix-huitième. KVM est une marque d’une grande valeur. A nous de la développer. Je sais que dans les moments délicats, on pourra compter sur notre douzième homme qui mettra le feu et l’ambiance dans de nombreux stades. Il a été le moteur de notre équipe. Sur le long terme, on doit suivre les exemples de Westerlo, Zulte Waregem ou Roulers : grandir pas à pas dans un environnement sain. Il faudra également élargir le noyau car on doit s’attendre à une longue saison. Nous opterons en premier lieu pour des jeunes joueurs qui auront une marge de progression et qui sauront montrer de l’enthousiasme sur le terrain. Le budget sera évidemment revu à la hausse. Avec l’arrivée des droits TV, on le doublera pour atteindre les 5 millions d’euros « .

Tel est le discours présidentiel. Est-il réaliste ? En battant en Coupe, Zulte Waregem et le Germinal Beerschot, le Kavé a montré qu’il pouvait rivaliser avec des formations de D1. Néanmoins, Malines a décidé de privilégier la carte des jeunes. Or, ce qui lui manque, ce sont des vieux routiers. Le président se sert de l’exemple de Zulte Waregem et Roulers mais ces deux équipes avaient misé sur des joueurs d’expérience pour encadrer le groupe qui avait obtenu son ticket en D1. Avant même la montée, Malines avait déjà commencé son marché en attirant deux joueurs d’avenir : Xavier Chen (Courtrai, courtisé par Mouscron) et Koen Persoons. Les jeunes suffiront-ils ?

Quel est l’homme derrière ce succès sportif ?

A la tête du Malinwa, on trouve l’ancien gardien d’Anderlecht et du Standard, Peter Maes :  » En cinq ans comme entraîneur, c’est la première fois que je réussis à monter avec mon équipe « , explique-t-il.  » Nous n’avons jamais douté de nos qualités et nous avons toujours privilégié le beau jeu avec tous les risques que cela comporte. Au final, nous avons émergé grâce à notre mental et notre niveau technique supérieur. Je suis fier de l’organisation mise en place. Mes joueurs ont appris à évoluer de façon disciplinée. Or, la plupart sont très jeunes et tout était nouveau pour eux. En un an, ils ont acquis beaucoup d’expérience.

Notre force réside dans l’atmosphère qui règne dans les vestiaires. C’est un vrai groupe de copains. Quand je dis cela, cela sonne comme un cliché, mais chez nous, c’est vraiment spontané ! Les 20 joueurs du noyau ont tous apporté leur pierre à l’édifice. Au final, on peut dire que l’on a réussi une excellente saison : Quart de finale en Coupe, 70 points et victoire dans le tour final.

Nous tacherons de conserver notre identité : jouer avec des jeunes Belges, en se basant sur nos propres forces mais avec réalisme. Vous pouvez être sûr que nous ne construirons pas un mur devant notre gardien. Nous voulons aussi donner aux jeunes qui nous ont porté en D1 une chance de démontrer leur talent. Et pas question de bousculer le noyau avec des noms ronflants !  »

Peter Maes a donc construit une équipe bien balancée. Il a aussi donné une autre envergure à certains joueurs, comme Charai ou Pieter Crabeels qu’il a reculé de l’attaque au poste de médian gauche.

Pourquoi le Lierse a-t-il flanché ?

On pensait le Lierse au moral d’acier. On s’est lourdement trompé. Usés par une course poursuite tout au long de la saison, les Lierrois sont arrivés lessivés au tour final, alors que l’Antwerp et Malines avaient aiguisés leurs armes (et leur physique). Le départ en fanfare du Lierse fut trompeur à plus d’un titre. D’abord parce qu’avec deux victoires, on ne gagne pas un tour final. Ensuite parce que ces deux succès furent obtenus aux dépens d’une formation qui n’allait faire que de la figuration.  » On a fait deux très bonnes rencontres contre Courtrai mais peut-être était-ce simplement parce que l’adversaire était plus faible ? », lâche Marko Muslin

 » Depuis le début de la saison, on passe de miracle en miracle. Pendant six mois, on s’est accroché à l’espoir du tour final « , explique Muslin,  » On s’est battu dans ce sens durant six mois. Maintenant, on en paie peut-être le prix mentalement. Je ne crois pas que la défaite à l’Antwerp a agi comme une cassure dans le groupe mais on a dû gérer cinq rencontres en deux semaines : c’était trop pour nous « .

Chris Janssens abondait dans le même sens en ajoutant que plusieurs joueurs étaient fatigués. Face à Malines, les plus expérimentés (comme Mario Verheyen ou Janssens lui-même) semblaient au bout du rouleau, errant comme des âmes en peine. La fraîcheur malinoise a eu raison de l’expérience lierroise.

par stéphane vande velde et frederic vanheule – photos: reporters/boucau

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