» HASI EST UN GRAND ENTRAÎNEUR EN DEVENIR « 

Prouver à Gand qu’il est bel et bien un grand avant motive tout particulièrement le néo-Buffalo.  » D’autres seraient restés à Anderlecht jusqu’au bout de leur bail mais je ne suis pas comme ça. Je suis un battant, je veux être sur le terrain.  »

La présence de David Pollet en pointe de l’attaque gantoise ne constitue pas une surprise. La saison dernière, il a affronté Courtrai (et donc le nouvel entraîneur de Gand) à trois reprises durant le championnat régulier. Il a marqué lors de ces trois matches : deux fois sous le maillot de Charleroi et à une reprise sous celui d’Anderlecht. En plus, son manager n’est autre que Mogi Bayat, qui est également le représentant de Hein Vanhaezebrouck. Ça aide.

 » Oui, mais ce club s’était déjà intéressé à moi il y a quatre ans « , rétorque le Français en souriant.  » Je restais sur une excellente saison au Racing Paris et j’ai décidé de prolonger de trois saisons mon contrat au Racing Lens, auquel j’appartenais.  »

Ce qui est étonnant, c’est que David Pollet ne se soit pas inscrit dans la durée à Anderlecht, où il avait paraphé un contrat de quatre ans et demi fin janvier dernier.  » En football, tout peut aller vite. Ces quelques mois au Sporting ont été beaux. Malgré un temps de jeu limité, j’y ai appris beaucoup et je m’y suis fait des amis.  »

Qu’as-tu appris à Anderlecht ?

David Pollet : Beaucoup de choses.

Plus précisément ?

J’y ai eu l’occasion de devenir champion, de gagner ainsi mon premier trophée, et de découvrir les matches des PO1. Ce sont quand même des rencontres qui font progresser un joueur.

Tu as été titularisé seul en pointe contre le Standard, lors du premier match des play-offs, mais le Sporting a perdu et tu as disparu de la scène.

Oui. Kljestan et moi avons été écartés de l’équipe pour ne plus y revenir. L’équipe a commencé à tourner sans moi et l’entraîneur n’a plus rien changé.

 » J’étais dans une impasse  »

Pourquoi Besnik Hasi t’a-t-il préféré à Aleksandar Mitrovic pour le match au Standard ?

Le coach a procédé avec un seul avant, dans un registre qui m’était familier à Charleroi, et il voulait que je signe la même prestation mais ça n’a pas été mon meilleur match. Nous avons joué très bas, avec Tielemans derrière moi. J’ai bénéficié de fort peu de soutien et je n’ai reçu que des ballons aériens. Peut-être l’entraîneur a-t-il gardé ce match en tête.

Quand as-tu eu le sentiment qu’il y avait un problème ?

Quand on ne joue plus beaucoup et qu’on constate qu’à l’entraînement, c’est toujours le même onze qui va être choisi, on réfléchit. Je suis travailleur et j’ai continué à bosser mais je n’entrais même plus au jeu, à la fin, et je ne me sentais plus impliqué. Je me suis dit qu’il valait peut-être mieux chercher une solution. Comme Anderlecht n’a pas tout mis en oeuvre pour me conserver à mon retour de vacances, j’ai compris que nous étions sur la même longueur d’ondes.

As-tu parlé de ta situation avec Besnik Hasi ?

Oui, bien sûr.

Qu’a-t-il dit ?

Que les meilleurs jouaient. Je pouvais rester, il laissait la porte ouverte mais j’ai senti que je me trouvais dans la même impasse qu’à la fin de la saison et que le retour de Suarez allait achever de tout compliquer. J’ai donc demandé s’il était possible de partir et on m’a répondu que oui.

 » Un électrochoc sous Hasi  »

Le changement d’entraîneur a-t-il joué un rôle dans la rapidité de ton départ ?

Oui. Pendant les deux premiers mois, j’ai continué sur ma lancée de Charleroi, pour lequel j’avais inscrit 14 buts. Je ne jouais pas beaucoup mais quand j’entrais au jeu, je signais de bonnes prestations. J’ai marqué deux buts.

Comment as-tu vécu la renaissance d’Anderlecht sous la direction de Hasi ?

Comme souvent quand on change d’entraîneur, le groupe a subi un électrochoc. Tout le monde s’est adapté au discours du coach et ça s’est reflété sur le terrain. Quelques modifications ont permis à l’équipe de tourner : Tielemans au six et Kouyaté dans l’entrejeu. Je pense qu’Hasi est un grand entraîneur en devenir. Il a tout pour réussir, il est travailleur et sait manager un vestiaire. Je lui souhaite beaucoup de succès.

Mais il ne te faisait pas suffisamment confiance ?

C’est clair.

Etais-tu un choix de John van den Brom ?

Non. Je pense que j’étais un choix mûri d’Anderlecht. Tout le monde était content quand j’ai signé. Moi aussi, j’ai du mal à réaliser que j’ai signé pour quatre ans et demi en janvier et que je suis déjà parti mais… j’ai tourné la page. Je pense à l’avenir et je suis heureux ici.

 » Le train ne passe qu’une fois  »

As-tu discuté avec John van den Brom avant de signer à Anderlecht ?

Oui. Hasi assistait à l’entretien et ils avaient la même vision : Suarez était sur la touche et ils voulaient un troisième attaquant possédant un profil différent. Quelqu’un comme moi, qui peut fonctionner comme pivot, apporter de la profondeur, à côté du buteur qu’est Mitrovic et du technicien Cyriac.

Après avoir signé, tu as déclaré :  » C’est un rêve. C’est le seul club que je voulais rejoindre et je vais réussir.  »

Oui, en signant pour Charleroi, je voulais effectuer un pas vers un grand club. Quand je jouais à Lens, Anderlecht était à mes yeux le plus grand club belge. J’ai été surpris qu’il s’intéresse à moi. Je me suis demandé si je devais franchir le pas immédiatement ou achever la saison avec Charleroi mais quand on se voit proposer un contrat de quatre ans et demi, on se dit que le train ne passe qu’une fois et qu’il ne s’agit pas de le rater. J’ai sans doute été trop vite mais je ne le regrette pas. Finalement, je n’ai pas pu réussir parce que je n’ai pas vraiment eu la chance de continuer à évoluer.

Qu’as-tu pensé quand Herman Van Holsbeeck s’est attribué un zéro sur dix pour son travail pendant le mercato hivernal ?

Je savais qu’il ne s’agissait pas de moi mais les mots ont quand même été écrits… Il a commis une erreur.

 » C’est quoi, le style d’Anderlecht ?  »

Es-tu déçu de n’avoir pas réussi dans le club de tes rêves ?

Bien sûr. Je n’aime pas le terme échec car je ne vois pas les choses comme ça. J’aurais pu rester mais ça ne m’intéressait pas. Je me suis posé les bonnes questions au bon moment et Gand s’est intéressé à moi. L’entraîneur, le président, le directeur sportif, tout le monde souhaitait ma venue. J’ai senti que le club dégageait une atmosphère positive et qu’il avait un projet ambitieux.

Comment juges-tu le niveau d’Anderlecht ?

On sent que ce club possède une certaine expérience et dégage un certain charisme. Dommage qu’il avait déjà été éliminé de la Ligue des Champions à mon arrivée car c’est encore tout autre chose.

Tu pars alors qu’Anderlecht est automatiquement qualifié pour la Ligue des Champions. N’aurais-tu pas dû rester un peu plus longtemps ? Compte tenu de la lourdeur du calendrier, tu aurais sans doute obtenu ta chance et ça n’aurait pas été une mauvaise affaire avec les primes.

Non. Certains joueurs seraient restés jusqu’au terme de leur contrat mais je ne suis pas comme ça. Je suis un travailleur, un battant, je veux être sur le terrain.

Ne conviens-tu pas au style d’Anderlecht ?

On ne peut pas vraiment parler d’un style spécifique à Anderlecht. Chaque joueur a le sien et doit s’adapter au jeu, veiller à être concurrentiel et signer des prestations. Je ne pense pas que le style de Mitrovic soit le même que celui de Mbokani. Alors, c’est quoi, le style d’Anderlecht ?

Anderlecht n’est-il pas synonyme d’une certaine classe technique ?

Les armes dépendent de l’adversaire. Dennis Praet et Youri Tielemans sont techniquement forts avec le ballon mais je ne pense pas qu’ils soient typiquement anderlechtois. Donc, je pense que mon style convient au Sporting mais je n’ai pas obtenu la chance me permettant de prouver que je pouvais y rester.

De quoi as-tu besoin pour être performant ?

Comme tout le monde, je dois me sentir bien dans ma peau et savoir qu’on me fait confiance.

Comment fonctionnes-tu le mieux en attaque ?

J’ai connu mes meilleures années seul devant, appuyé par deux ailiers. J’ai également joué avec un deuxième avant, à Anderlecht et ici. J’en suis capable. J’aime les espaces dans le dos de la défense et il me faut des joueurs aptes à délivrer la dernière passe.

Tu travailles avec un entraîneur très sévère sur le plan tactique. Quel effet cela fait-il ?

On a besoin de sévérité pour apprendre quelque chose de neuf et progresser. Je n’ai encore jamais connu d’entraîneur qui travaille autant la tactique, de façon si détaillée, pour tirer profit des points faibles de l’adversaire. Il ne va quand même pas jusqu’à jouer à la PlayStation avec nous. Il nous octroie une certaine liberté. Il est plus facile de marquer quand chacun monte sur le terrain avec la même idée que quand chacun fait ce qu’il veut.

 » Je sais d’où je viens  »

Quels aspects dois-tu travailler ?

Compte tenu de ma taille, je dois mieux jouer dos au but, mieux conserver le ballon et améliorer mon jeu de tête. Le travail quotidien de la finition est aussi important pour mon assurance.

Comment Hein Vanhaezebrouck t’a-t-il convaincu ?

Il apprécie mon profil et mon caractère, la façon dont je me comporte au sein du groupe. Je pense que c’est pour ça que je suis ici.

Tu as rapidement conquis l’appréciation des Belges, y compris pour ta personnalité.

Je suis simple. Je sais d’où je viens. Mes parents sont de simples travailleurs. Ils m’ont appris ce que signifiait le travail, ils m’ont appris à ne pas faire de bêtises ni à jeter l’argent par les fenêtres. Je ne vais certainement pas dépenser mes sous en autos.

A quoi ?

J’investis dans l’immobilier dans le Nord de la France. Une carrière est courte et je veux en profiter longtemps après son terme.

Comment te sens-tu en Belgique, en tant que Français ?

Bien.

 » La Belgique respire le football  »

Ta mère est originaire d’Ostende. Te sens-tu des racines en Belgique ?

(Rires) Ma mère a évidemment quitté la Belgique depuis longtemps. Sa mère vit aux Philippines. Un de ses frères vit toujours au littoral mais je suis né en France, j’y ai grandi, j’y ai été à l’école. C’est là que j’ai été formé. Mon père et moi sommes parfois allés voir un match en Belgique, notamment à Mouscron, et je suis également venu en Belgique quand j’ai été repris dans les équipes nationales d’âge.

Qu’est-ce qui te plaît ici ?

Le fait de pouvoir être en famille le soir. En France, quand on doit aller à Angers, on part la veille du match et on revient deux jours plus tard. En Belgique, un footballeur professionnel peut jouir d’un certain confort dans sa vie quotidienne. C’est un petit pays qui respire le football, certainement par comparaison avec la Ligue 2. A Istres, on joue devant 600 personnes. A Anderlecht et à Bruges, c’est devant 20.000 spectateurs et à Gand, ils sont 15.000.

Tu fêtes tes 26 ans ce moi-ci. Ne rêves-tu pas de réussir un jour en Ligue 1 ?

J’y jouerais si j’étais resté à Lens, puisque le club de mon coeur vient d’être promu. On verra ce que l’avenir m’apportera. Je ne m’occupe que du court terme.

 » Je ne suis pas d’un naturel revanchard  »

Y a-t-il une grande différence de niveau entre Gand et Anderlecht ?

Anderlecht a plus d’expérience mais je n’ai pas relevé de différence importante.

Veux-tu montrer sous le maillot de Gand que tu as le niveau requis pour jouer à Anderlecht ou encore devenir le meilleur buteur du championnat pour cette raison ? Est-ce une source supplémentaire de motivation ?

Oui, même si je ne suis pas d’un naturel revanchard. Mais je ne négligerai pas l’occasion de devenir meilleur buteur.

Veux-tu marquer plus de buts qu’Aleksandar Mitrovic ?

Pour devenir le meilleur réalisateur du championnat, je devrai aussi marquer plus que Mitro. Mais ce n’est pas parce que je n’ai pas joué à Anderlecht et lui bien qu’il est mon ennemi. A l’entraînement, nous nous entendions bien. Je lui souhaite une bonne saison.

PAR CHRISTIAN VANDENABEELE – PHOTOS : KOEN BAUTERS

 » Gand s’était déjà intéressé à moi il y a quatre ans.  »

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