En 6 mois ce qu’on vit en 5 ans

Pour sa première saison, cet ancien publicitaire (co-fondateur de l’agence RSCG) avait vite perdu le sourire.

aTout a changé depuis cette victoire du PSG à Lens (1-2) ?

Alain Cayzac : Je vois la vie un peu plus en rose depuis. A Lens, 2.000 supporters ont fait le déplacement et les nouveaux joueurs commencent à être vraiment dans le coup comme Peguy Luyindula et Jérémy Clément. Christian Rodiguez lui revient bien aussi. Mais j’essaye de garder la tête parce que Paris est un club où on vous encense et on vous enterre, encore plus vite qu’ailleurs.

C’est l’éternel problème ?

Cette démesure est à la hauteur de la passion qui entoure le football. Quand on lit les titres des journaux, on est passé en une semaine de Paris, la honte à Un PSGmagnifique ! C’est extraordinaire ! ( il rit). Mon ami Gérard Houllier à l’habitude de dire qu’au football, on passe rapidement from zero to hero. Le PSG a malheureusement la mauvaise habitude de ne pas être régulier depuis de nombreuses années, mais dès qu’une série de bons résultats s’enchaînent, je ne manque jamais l’occasion de rappeler cette formule aux joueurs.

Mais vous avez été heureux de sortir du trio infernal…

C’est paradoxal parce qu’on visait la 4e ou la 5e place en début de saison, et si on m’avait dit que je serais content de passer 17e, j’aurais éclaté de rire ! Aujourd’hui, Lyon est malheureux, alors qu’il est assuré de remporter un 6e titre, ce qui est pourtant formidable.

Soyons cyniques : Paris s’est transformé en magnifique animateur des équipes du bas du tableau…

Je m’en serais bien passé, pour le c£ur et les nerfs, c’est très dur ! Avec Paul Le Guen, on essaye plutôt de transmettre de l’énergie positive aux joueurs. Au point qu’on me reproche parfois de ne pas taper assez du poing sur la table. A quelques matches de la fin, c’est justement ce qu’il ne faut pas faire. Les joueurs sont déjà dans le doute, ce n’est pas la peine d’en rajouter.

Il reste trois rencontres à domicile (Nantes, Lyon et Troyes). Ce sera la clé du maintien ?

Cette année nous avons un gros problème au Parc des Princes. Au classement, nous avons été derniers à domicile ! Il y a plusieurs explications à cela, des désillusions en début de championnat mais aussi ce climat assez invivable et ces tribunes fermées après le match de Tel-Aviv. A présent, il nous faut redevenir performant chez nous.

Vous attendiez-vous à autant de difficultés pour votre première année de présidence ?

J’ai vécu en six mois, ce que j’aurai du vivre en cinq ans. C’est un concentré de problèmes, qui a démarré par le gag des nouvelles directives d’arbitrage au sujet des tirages de maillots, mais aujourd’hui, les mauvaises habitudes sont revenues dans les surfaces de réparation. Ensuite, il y a eu la suspension de Pierre-Alain Frau, le cas Vikash Dhorasoo, le drame du match de Tel-Aviv, la blessure de Mario Yepes, sans oublier le changement d’entraîneur, moi qui déteste le principe de changer d’entraîneur en cours de saison… Je sais que Paris n’est pas un long fleuve tranquille, mais je ne pense pas qu’il existe beaucoup de présidents qui aient vécu ce que j’ai vécu pendant cette saison.

Le soutien des actionnaires, nouveaux propriétaires du PSG, vous fait-il défaut ?

Non, il n’y a aucun problème là-dessus. J’ai de très bons rapports avec les actionnaires qui sont toujours là quand il le faut. Je ne prendrais pas cela comme une excuse. Les actionnaires du PSG sont là pour 5 ans, c’est une éternité dans le football.

 » Nous n’avons aucune dette, en tout cas !  »

Si le PSG descend, qui restera ?

Pour l’instant, on se préoccupe surtout de rester en Ligue 1. Je ne critique personne, mais beaucoup d’erreurs ont été commises depuis 10 ans, comme quand des joueurs sont revendus beaucoup moins chers que ce qu’ils avaient coûté… A mon arrivée, j’ai prôné la stabilité parce que j’étais traumatisé par cette instabilité chronique. Certains me l’ont reproché, mais j’assume ce choix. Quand depuis 10 ans on n’a pas de palmarès en championnat, il y a des questions à se poser…

Lesquelles justement ?

Avoir une vraie politique de formation, construire un centre d’entraînement digne de ce nom, modifier l’approche du recrutement en étant attentif aux capacités d’adaptation de chaque joueur à la pression qui règne à Paris. Il faut aussi mieux gérer la masse salariale qui est très importante, même si le club est sain financièrement car nous n’avons aucune dette.

Concernant cette masse salariale, Pauleta, qui compte parmi les gros salaires, pourrait-il quitter le club en fin de saison ?

Le salaire de Pauleta a été réévalué de 20 % l’année dernière lorsqu’il a signé sa prolongation de contrat. Il n’y a aucune raison pour qu’il n’honore pas ses deux années de contrat. Il a quelques difficultés en ce moment, mais c’est le lot de tous les grands attaquants. Pauleta est quand même un des meilleurs buteurs du championnat. Pour mieux maîtriser cette masse salariale, nous comptons plutôt intégrer une part de variable liée au résultat dans la rémunération des joueurs. C’est le cas de Peguy Luyindula dont le salaire a été divisé par deux à son arrivée, mais avec un intéressement sur les résultats.

L’un des reproches fait fréquemment au PSG concerne la grande quantité de joueurs en région parisienne dont le club ne tire pas profit.

Nous ne pouvons pas recruter tous les joueurs de l’Ile-de-France. Nous avons déjà des premiers résultats avec notre formation, puisque cinq jeunes ont intégré le groupe pro cette année : Clément Chantôme, Youssuf Mulumbu, David Ngog, Larrys Mabiala et Mamadou Sakho.

L’effectif parisien manque-t-il d’aboyeurs ?

Je n’aime pas ce terme d’aboyeur, je parlerai plutôt de leader. Pauleta est très respecté dans le vestiaire, c’est un leader naturel, comme Landreau ou Yepes. Mais quand on vit des saisons horribles, il faut plus de leaders. Notre effectif doit se composer de joueurs formés au club, de jeunes talents et de plusieurs stars, comme Pauleta, Rothen, Yepes ou Landreau. Jean-Michel Aulas a une bonne formule pour parler de recrutement, en disant qu’il s’est peut-être moins trompé que les autres.

par sébastien binet-décamps – photo: reporters

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