Divinités italiennes

 » Vincenzo Nibali me fait penser à Felice Gimondi « , a déclaré Christian Prudhomme, le directeur du Tour de France. L’élégant Felice remporta la Grande Boucle en 1965, à 22 ans. La surprise était générale car son équipe, Salvarani, le sélectionna en dernière minute. Les amateurs de cyclisme n’avaient pas retenu son succès au Tour de l’Avenir un an plus tôt. La conquête du maillot jaune 65 a marqué le début de l’exceptionnelle carrière du champion de Bergame. Un autre jeune crack italien monta sur le podium : Gianni Motta, troisième, compléta la recette du cyclisme aldente. Superbe coureur, Motta habitait à Cassano d’Adda, à une trentaine de bornes de Milan. A la fin des années 80, le sympathique Motta insista pour que je passe chez lui avant Milan-Sanremo ou le Tour de Lombardie.

L’accueil y fut chaleureux : Motta avait aménagé une cave, garnie de trophées, où il recevait ses amis pour refaire le monde, évoquer les grandes courses d’autrefois et la classe folle d’Eddy Merckx. Francis Remy, de LaMeuse, rêvait de nous accompagner chez Motta, peut-être pour voir si Aldo Tonnoir, notre photographe, et moi, ne lui racontions pas des carabistouilles. Un peu plus tard, il apprécia avec nous la spécialité culinaire de la maman de Motta : des tripes façon maison à se pourlécher les doigts. C’était un plaisir de suivre la Primavera avec Motta (né 13 mars 1943), ce champion que les tifosi reconnaissent et adorent toujours. A sa demande, nous l’avons accompagné un jour dans les coulisses d’une émission de la RAI (photo).

Là, Gimondi, (29 septembre 1942) nous adressa un magnifique compliment : – Je connais votre magazine. Vous êtes de grands professionnels. Je vous invite demain soir à la maison. Tonnoir, n’en revenait pas, moi non plus. Gimondi, c’est la classe, un palmarès tellement fourni dans les classiques et les épreuves par étapes qu’il forme avec Fausto Coppi et GinoBartali la trinité du cyclisme italien. Sans Eddy Merckx comme concurrent qu’il respectait profondément, le Bergamasque se serait forgé un palmarès unique en son genre. Il nous reçut chez lui, magnifique demeure, où sa femme avait dressé une table de toute beauté. Et, durant un repas inoubliable, Gimondi retraça le film de sa carrière avec soin.

Il se souvenait même de sa victoire au bout de Paris-Bruxelles en 1966, un an après son succès au Tour de France. J’avais 14 ans et je m’étais glissé près de la ligne d’arrivée avenue du Globe, à deux pas du Parc Duden. Gimondi l’emporta avec 25 secondes d’avance sur un imposant trio de sprinters belges : Willy Planckaert, Rik Van Looy et Walter Godefroot. Il fallait le faire et Gimondi n’en resta pas là…?

PAR PIERRE BILIC

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire