De plus en plus rasoir

Lu sur le blog d’un fana de cyclisme dimanche soir :  » Viens de perdre 4 heures de ma vie pour avoir regardé n’importe quoi.  » Lu en pages sportives le lundi matin :  » La plus grosse émotion fut notée avant le départ quand le roi Philippe donna le départ de la Doyenne.  »

Deux avis, ô combien pertinents, sur un Liège-Bastogne-Liège qui n’a guère tenu ses promesses, ne valant en définitive que par son sprint final et la victoire de Simon Gerrans. Un pistolero qui n’avait qu’une balle dans son barillet, mais qui l’a utilisée au bon moment. Un peu comme Fabian Cancellara à Paris-Roubaix. Comme le disait Philippe Gilbert après coup, ce genre de scénario est, hélas, appelé à se répéter.

Si cette prédiction est amenée à se réaliser et que des classiques comme Milan-Sanremo, l’Amstel Gold Race, la Flèche Wallonne et même Liège-Bastogne-Liège débouchent sur des courses qui n’offrent qu’une bonne heure de bataille, à l’image des étapes pour sprinters dans les grands tours, alors le cyclisme va au-devant de sérieux problèmes. Et c’est dommage à une époque où la petite reine a perdu pas mal de crédit, tant auprès du public que chez les sponsors, en raison de la problématique du dopage. Dans ces conditions, le sport cycliste mériterait davantage qu’une bataille furtive.

Mais quelles sont les raisons qui expliquent qu’hormis le Tour des Flandres, toutes les épreuves classiques ne valaient guère la peine d’être vécues ?

1) Le système des points en vigueur au WorldTour, où la crainte de perdre des points précieux est plus grande que le risque d’en gagner.

2) Le nivellement vers le bas : toutes les (semi)-classiques ont été remportées ces dernières semaines par des coureurs différents, de pays différents et de formations différentes. Et, ce qui est plus significatif encore : tant à Liège-Bastogne-Liège que lors de l’Amstel Gold Race et même Paris-Roubaix, on n’a jamais recensé ces dix dernières années autant de coureurs terminant dans la minute : respectivement 31, 40 et 18.

Les valets et les coureurs de 2e rang lorgnent également de plus en plus des épreuves spécifiques. Grâce à une préparation plus poussée sur le plan scientifique – ce qui n’était pas toujours le cas jadis – les coureurs ont une carrière plus longue qu’autrefois. Dans des courses avec oreillettes (WorldTour), ils évoluent donc de manière à la fois plus réfléchie et groupée. Avec simplement une mission : ne pas attaquer, protéger le plus possible le (souvent seul) leader en prévision de l’emballage final. La plupart ne veulent pas, non plus, se brûler sur un parcours rendu souvent très dur (voire trop dur) par les organisateurs. A fortiori à une époque où les coureurs ne carburent plus avec n’importe quoi.

Ce cyclisme plus clean doit être applaudi des deux mains. Mais sa physionomie actuelle, par contre, donne nettement moins lieu à se réjouir. Alors, quels sont les remèdes à apporter pour rendre à nouveau les courses plus attrayantes ?

1) Réduire le nombre de coureurs par équipe à 6, ce qui induit moins de contrôle, une épreuve plus captivante et moins de risques de chute.

2) Supprime les oreillettes et les remplacer par un moyen de communication unique pour tous les coureurs.

3) Revoir le système des points attribués au WorldTour.

4) Rendre les parcours moins durs.

Et veiller aussi à rendre les courses visuellement plus attractives, comme en F1. Avec, par exemple, des caméras sur les voitures suiveuses, sur les casques, sur les vélos, de façon à être plongé au coeur même des épreuves.

Le président de l’UCI, Brian Cookson, projetait déjà une réforme des épreuves du calendrier ainsi que du WorldTour. Il peut peut-être aussi s’attaquer au reste…

PAR JONAS CRÉTEUR

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire