Commotions et suicides

Dans son livre  » K-0, le dossier qui dérange « , Jean-François Chermann, neurologue français et spécialiste des commotions chez les sportifs de haut niveau, passe en revue les traumatismes liés à ces blessures souvent prises à la légère, et à laquelle peu de disciplines échappent.

L’espérance de vie d’un joueur de football américain a récemment été estimée à 55 ans. Comment expliquer cela ?

D’une part, les joueurs pèsent parfois près de 150kg. Les risques d’obésité et de complications cardiovasculaires sont donc plus grands. D’autre part, les conduites à risque, notamment la prise de cocaïne, qui est fortement répandue dans ce sport, réduit leur espérance de vie. Ensuite, il y a les cas de suicides. Les études qui ont été menées sur les cerveaux d’anciens sportifs démontrent que les troubles du comportement, de l’humeur se déclarent plus rapidement chez les anciens footballeurs américains que dans les autres sports. Beaucoup de joueurs se retrouvent ruinés, seuls et donc plus sujets au suicide.

Y a-t-il plus de commotions dans le sport aujourd’hui ou sont-elles plus facilement détectées ?

Aujourd’hui, les commotions sont décelées plus rapidement, mais il y en a aussi beaucoup plus parce que les sports sont plus violents, avec des saisons plus longues et un temps de récupération toujours réduit. Et puis, sans vouloir faire offense aux sportifs d’il y a trente ans, les joueurs que l’on retrouve sur les terrains ou les rings ont une masse musculaire bien plus importante qu’auparavant.

Quels sont les sports à risques ?

Le hockey et le football américain sont des sports dangereux à cause de la morphologie des joueurs et de la vitesse à laquelle ils se déplacent. Un joueur de hockey peut atteindre 40km/h. En cas de contact, la combinaison de la masse du joueur et de la vitesse à laquelle il se déplace peut faire de gros dégâts. Le K-O avec perte de connaissance ne représente que 10 % des commotions. Dans la boxe, la commotion fait partie de la règle et un joueur peut être compté deux fois avant que le combat ne soit arrêté par l’arbitre. Cela veut donc dire que le joueur commotionné peut être laissé sur le ring même s’il n’a pas perdu connaissance. Ça, c’est de la folie.

Dans votre livre, vous dites que les enjeux financiers incitent joueurs, entraîneurs et dirigeants à ne pas tenir compte de ces chocs ?

La NFL a dû reconnaître le risque à long terme. Mais pour le moment, elle estime qu’il n’y a pas d’autre moyen de les combattre que d’autoriser le joueur à rejouer uniquement s’il ne présente aucun symptôme après un choc et si les tests réalisés quelques jours après ne montrent aune anomalies. Avant ces règles, les joueurs voulaient rejouer le plus vite possible, parce que c’est un sport où les places sont chères et le système de primes les encourage à le faire. Plus on joue, plus on gagne. Et si on a la réputation d’être un joueur fragile, on joue moins, les supporters vous oublient et votre carrière en prend un coup.

Alors, que faire lors d’une commotion ?

Ne pas remonter sur le terrain ! Prendre au moins deux jours de repos, éviter tout travail intellectuel. Et puis, avant d’envisager la reprise de la compétition il faut parfois attendre jusqu’à un mois. Tout cela sous le contrôle d’un médecin et après examen neurologique.

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