Cancer DU TOUR

The Boss est dans la fosse aux lions. Il se dopait… comme les autres… en mieux.

Se battre jusqu’au bout, c’est inscrit dans l’ADN de Lance Armstrong. Les cols les plus durs, les adversaires les plus féroces, un cancer : il a vaincu tout et tout le monde. Pourtant, il vient de jeter l’éponge.

Une décision sage, finalement. Car s’il avait continué à s’entêter et avait porté son cas devant la commission d’arbitrage, l’USADA (agence américaine anti-dopage) aurait révélé les témoignages et les preuves d’une ribambelle de coureurs. On n’aurait plus seulement eu connaissance des déclarations des ennemis d’Armstrong comme Floyd Landis et TylerHamilton, mais aussi de George Hincapie, Levi Leipheimer, Christian Vande Velde ou encore David Zabriskie.

Si Armstrong pouvait se permettre de mettre en doute la crédibilité de Landis et Hamilton, il n’en est rien dans le cas de Hincapie, qui fut longtemps considéré comme l’un de ses meilleurs amis et avait autrefois affirmé que le sextuple vainqueur du Tour de France était un frère pour lui. Hincapie a témoigné sous serment, et aux Etats-Unis, un faux témoignage est passible d’une peine de prison. Remember l’ex-athlète Marion Jones ! Si les déclarations de George Hincapie avaient été rendues publiques, cela aurait signifié le coup de grâce pour le Texan. Il a donc choisi la moins mauvaise issue. Il échappe aussi (provisoirement du moins) au risque d’emprisonnement pour fraude d’argent public dans le financement du dopage au sein de l’équipe US Postal. Les enquêteurs n’ont pas trouvé de preuves irréfutables mais les soupçons sont énormes. Armstrong est plus que suspecté de s’être dopé mais cela n’est pas punissable aux Etats-Unis. Il a toujours sorti le même argument pour sa défense : il a été contrôlé plus de 500 fois, jamais positif. Il sait qu’il risque de perdre l’ensemble de son palmarès. Mais il assume : il préfère passer pour un martyre que pour un dopé notoire.

En cas de condamnation effective, il pourrait perdre une partie de sa fortune car des demandes de dédommagement gigantesques pourraient suivre, de la part de ses (ex)sponsors et de compagnies d’assurances. Pour le moment, son empire financier reste intact. Nike et Anheuser-Busch ne voient pas de raisons de le laisser tomber, LA peut continuer à donner des conférences joliment rétribuées et sa fondation reste une raison d’espérer pour des personnes atteintes d’un cancer dans le monde entier. Même si des médias américains ont déjà signalé que la destination des 500 millions de dollars déjà amassés était assez douteuse : l’argent servirait davantage aux relations publiques, à la publicité, à couvrir des frais divers et à polir l’image d’Armstrong, plutôt qu’à la recherche contre le cancer.

Donc, le Texan a choisi de ne pas avouer. Une stratégie qui pourrait être la bonne, car si l’UCI refuse de lui enlever ses victoires, les conséquences resteront limitées. L’image du Boss sera ternie, mais cela passera vite, la réhabilitation ne tardera pas – surtout aux Etats-Unis. D’ailleurs, il continue à être massivement soutenu dans divers sondages organisés sur Internet et les dons à sa fondation ont encore augmenté récemment.

L’UCI n’a plus aucune crédibilité

La question essentielle est toujours sans réponse : Lance Armstrong se dopait-il, oui ou non ? Tous les insiders sont persuadés depuis longtemps qu’il était un des leaders de la manipulation sanguine ! Un trafic dans lequel trempaient aussi tous ses principaux adversaires, qu’ils aient entre-temps été suspendus ou pas. Armstrong garde des défenseurs, ceux qui continuent à marteler qu’il n’a jamais subi de contrôle positif. Mais on sait ce que valent les contrôles. Le code mondial anti-dopage stipule clairement qu’un coureur peut être puni sur la base de témoignages. Et selon l’agence française anti-dopage, l’Américain n’a jamais été pris parce que des organismes tout en haut (l’UCI ?) l’avertissaient avant les contrôles  » inopinés « .

Armstrong n’a jamais été pris officiellement mais il a quand même subi des contrôles positifs. En 1999, il a produit un certificat médical antidaté pour échapper à un contrôle positif aux corticostéroïdes. En 2005, L’Equipe a révélé qu’il s’était dopé à l’EPO six ans plus tôt. Armstrong a échappé à des sanctions car il n’existait pas encore de cadre légal autour des échantillons d’urine conservés pour analyse. Et il y a ce contrôle au Tour de Suisse en 2001. Il était positif à l’EPO, ce qui est confirmé par l’agence américaine anti-dopage et par le directeur du labo de Lausanne. Mais l’UCI aurait ignoré ce résultat. Plusieurs coureurs, dont Landis et Hamilton, l’ont reconnu. Que ce soit vrai ou pas, on sait que l’UCI a accepté, plus tard, deux versements d’Armstrong pour l’aider à lutter contre le dopage : 25.000 et 100.000 dollars ! Pour se rendre redevable, il n’y a pas mieux…

C’est l’UCI (et éventuellement le TAS) qui décidera du retrait ou non des résultats de l’Américain. Une UCI qui, juge et partie, a tenté de reprendre le dossier de l’USADA et a ainsi perdu toute crédibilité. Une UCI, aussi, qui s’est dite soulagée après l’arrêt des travaux d’un grand enquêteur américain qui cherchait à en savoir plus sur la manière dont le dopage était financé dans l’équipe d’Armstrong. Argument massue :  » Notre sport a déjà suffisamment souffert de scandales liés au dopage. « 

L’Union Cycliste Internationale attend maintenant le jugement motivé de l’USADA mais il est peu probable qu’elle efface Lance Armstrong des palmarès. Bjarne Riis est toujours considéré officiellement comme vainqueur du Tour 96 alors qu’il a reconnu son dopage à l’EPO… Et si Armstrong perdait ses victoires, il irait probablement devant le TAS. Faut-il le blâmer ? Le priver de ses sept succès pour les offrir à Jan Ullrich et d’autres coureurs du même genre ne serait pas non plus logique. Divers témoignages signalent qu’Armstrong utilisait le même carburant que ses adversaires : EPO, hormones de croissance, testostérone, transfusions sanguines,… Mais c’est lui qui gagnait. Parce qu’il était plus perfectionniste, plus doué, plus ambitieux, plus fort dans la tête, etc.

PAR JONAS CRETEUR – PHOTOS: IMAGEGLOBE

Armstrong utilisait le même carburant que ses adversaires : EPO, hormones de croissance, testostérone, transfusions sanguines.

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