Buts mythiques

L’équipe nationale a fait mouche à 1.099 reprises en 644 matches mais quel ballon gagnant a marqué le plus l’histoire de l’équipe nationale ?

par pierre bilic et bruno govers

par Pierre Bilic et Bruno Govers

Avant leur rendez-vous au Portugal, les Diables Rouges n’ont plus qu’une solution pour dénicher les buteurs qui pourraient animer leur division offensive : se rendre en pèlerinage à Fatima. Depuis le retrait de Marc Wilmots, auteur de 28 buts en 70 présences au sein de l’équipe nationale, la poudre des artilleurs belge est mouillée. Ce manque de tonus à la finition n’est même plus inquiétant, c’est dramatique. Il est déjà loin le temps de nos grands oiseaux de proie se délectant devant les gardiens adverses. Parmi les 20 meilleurs cogneurs de l’histoire de l’équipe nationale, cinq seulement sont encore en activité et ne feront plus souvent rêver les foules : Emile Mpenza, Wesley Sonck, Bart Goor, Thomas Buffel et… Luis Oliveira qui à 37 ans joue encore dans un petit club sarde, Nuorese (Série C 2) . Qui reprendra un jour le flambeau ? Qui rejoindra BernardVoorhoof, Paul Van Himst, Jan Ceulemans, Marc Degryse, Enzo Scifo, Marc Wilmots et consorts au panthéon des grands buteurs de l’équipe nationale ? Pour l’instant, c’est le désert. Depuis leur première représentation, le 1er mai 1904 au Vivier d’Oie à Bruxelles (3-3 contre la France), les attaquants  » Made in Belgium  » ont souvent été les parents pauvres de l’équipe nationale. A l’heure actuelle, la différence entre buts marqués (1099) et encaissés (1108) est négative : – 9. Il faut remonter au 19 avril 1908 afin de trouver brièvement une différence de buts positive (+1 après un match contre l’Angleterre). Pourtant, tout le monde a vécu des moments de joie intense en assistant aux triomphes des Diables Rouges. Nous avons retenu dix buts mythiques dans leur album avant de les classer par ordre de préférence. Un signe ne trompe pas et est indicatif à plus d’un titre : c’est un arrière qui a marqué le but le plus important, le plus significatif, le plus émouvant, le plus médiatisé et le plus mythique de notre équipe nationale : Georges Grün. Il y a eu d’autres bijoux que nous ne pouvons que bichonner en écoutant une chanson de Joe Cocker :  » N’oubliez jamais « ….

1. Georges Grün

Pays-Bas-Belgique, 13 novembre 1985, Rotterdam, Pays-Bas, 1-2, Coupe du Monde

Pays-Bas : Van Breukelen, Wijnstekers, Spelbos, Van de Korput, (46′ Van Loen), Van Tiggelen, Valke, Rijkaard, Gullit, Tahamata (75′ Silooy), Houtman, De Wit.

Belgique : Pfaff, Gerets, Broos, Clijsters, De Wolf, Léo Van der Elst (47′ Grün), Vandereycken, Franky Van der Elst (74′ Veyt), Ceulemans, Vercauteren, Desmet.

Il faisait un froid de canard dans le stade de Feyenoord : le Kuip tremblait de joie sur ses bases dans la certitude que les troupes oranges allaient obtenir leur billet pour la Coupe du Monde 86, au Mexique. Les 54.000 spectateurs chantaient à tue-tête (Hup, Holland, hup…) avant cette deuxième manche des barrages opposant les Pays-Bas et la Belgique. A l’aller, au Stade Constant Vanden Stock, Frankie Vercauteren avait marqué le seul but de la soirée  » Guy Thys avait élaboré une stratégie très précise en ce qui me concernait « , se souvient Georges Grün.  » Le coach fédéral appréciait une de mes qualités : le jeu de tête. En face, il y avait un autre amateur de trafic aérien : John Van Loen. Guy Thijs m’avait dit :  » S’il monte sur le terrain, tu joues.  » Les Pays-Bas se passèrent de ses services en première mi-temps et je suis resté sur le banc. Pendant le repos, un membre du staff technique belge a remarqué, alors que la porte du vestiaire hollandais s’était brièvement entrouverte que Michel Van de Korput était déjà déshabillé. La nouvelle fut transmise à Guy Thys qui décoda tout de suite :  » Georges, Van Loen va jouer, on demandera tout de suite un changement si ma certitude se confirme.  » Les Hollandais espéraient nous surprendre car John Van Loen ne s’était pas échauffé sur le terrain. J’ai pris la place de Léo Vander Elst dès la 47e minute. Je n’ai pas quitté John Van Loen d’une semelle. La Belgique jouait bien mais cela n’empêcha pas la Hollande de mener 2-0, suite à des buts de Peter Houtman et de Rob De Wit. C’était déjà la fête pour nos adversaires mais la Belgique multipliait les occasions de but. J’avais mis John Van Loen sous l’éteignoir et j’avais rempli mon contrat mais je voyais évidemment qu’on jouait très bien. Je savais que cela allait rentrer. Un seul et c’était  » Viva Mexico « . A la 84e minute, après un corner, je suis resté devant le grand rectangle hollandais. René Vandereycken a récupéré le ballon avant de dénicher Eric Gerets sur la droite. Je me suis avancé alors que le centre de notre barbu partait bien. La trajectoire était idéale et j’ai jeté toutes mes forces dans cette détente. John Van Loen n’a pas réagi et j’ai devancé Ronald Spelbos. Tout était fait en puissance et c’est pour cela que mon buste est passé devant celui de l’arrière central néerlandais. Je n’ai pas calculé : ma reprise de la tête était tellement puissante qu’ Hans Van Breukelen n’y vit que du feu : 2-1. Quatre minutes plus tard, la Belgique était qualifiée pour le Mexique. Quelle explosion de bonheur ! J’ai inscrit beaucoup de buts de la tête, comme à l’occasion de mon premier match en équipe nationale face à la Yougoslavie, en 1984. C’était à Lens et ma détente fut plus pure qu’en Hollande. Le but de Rotterdam m’est le plus cher, on m’en parle encore régulièrement. Quelque part, c’est le seul trophée individuel (virtuel) de ma carrière. Puis, cela nous a permis de vivre la magnifique campagne mexicaine.  »

2. Léo Van der Elst

Belgique-Espagne, 22 juin 1986, Puebla, Mexique, 1-1, tab 5-4, Coupe du Monde

Belgique : Pfaff, Gerets, Grün, Demol, Renquin, Vervoort, Scifo, Ceulemans, Vercauteren, (106′ Léo Van der Elst), Veyt, (83′ Broos), Claesen.

Espagne : Zubizaretta, Crego, (46′ Senor), Gallego, Chendo, Camacho, Michel, Victor, Calfera, Moreno, Salinas (63′ Olaya), Butragueno.

Au Mexique, les choses ne se mirent pas facilement en place. Guy Thys renvoya René Vandereycken (en pétard avec les jeunes) et Erwin Vandenbergh (blessé) au pays. En huitièmes de finale, l’URSS plia l’échine devant les Belges. Puis ce fut au tour de l’Espagne.  » A la fin de la deuxième mi-temps, c’était 1-1, buts de Jan Ceulemans et de Senor « , raconte Léo Van der Elst.  » J’étais parfaitement échauffé quand je suis monté au jeu pour la deuxième prolongation. Guy Thys avait un nom sur sa liste pour les tirs au but : le mien. J’étais d’accord mais à une condition : tirer le dernier. J’espérais que Jean-Marie Pfaff arrête deux ou trois tentatives espagnoles. Jan Ceulemans, Nico Claesen, Enzo Scifo et Hugo Broos ont marqué, Senor pas. Si j’arrivais à surprendre Andoni Zubizaretta, c’était le paradis. Que devais-je faire ? Opter pour un obus droit devant moi ou une balle placée ? Mes équipiers brugeois de l’équipe nationale me conseillèrent de mettre le plus de poudre possible dans cette balle. C’était quand même une de mes spécialités. J’avais noté que le gardien espagnol choisissait toujours un côté. Les 50 m entre le rond central et le point de penalty ont été très, très, très longs.

Le stade était entièrement acquis à la cause de nos adversaires. Il y avait un bruit mais ce n’était pas grave. Je me suis élancé et, les yeux fermés, j’ai tout mis dans ce ballon : droit devant moi et en force. Comme prévu, Zubizaretta plongea vers un coin. S’il était resté au milieu de sa cage, il se serait retrouvé dans les filets avec la balle. Ce fut du délire. Il m’est arrivé de réussir trois buts en Coupe d’Europe avec Bruges (contre Dortmund) mais le tir au but de Puebla est le moment le plus exaltant de ma carrière. Il nous propulsait en demi-finale d’une Coupe du Monde.  »

3. Erwin Vandenbergh

Argentine-Belgique, 13 juin 1982, Barcelone, Espagne, 0-1, Coupe du Monde Argentine : Fillol, Olguin, Galvan, Passarella, Tarantini, Ardilès, Gallego, Maradona, Bertoni, Diaz (64′ Valdano), Kempes.

Belgique : Pfaff, Gerets, Millecamps, De Schrijver, Baecke, Guy Vandersmissen, Coeck, Jan Ceulemans, Vercauteren, Czerniatynski, Vandenbergh.

Pour les observateurs présents lors de l’ouverture du Mundial 82, notre petit pays n’était qu’un oiseau pour le chat argentin, tenant du titre mondial emmené par un jeune prodige : Diego Maradona.  » Pour moi, ce fut probablement le match le plus parfait de la Belgique vu sous l’angle tactique « , souligne Erwin Vandenbergh.  » Diego Maradona s’attendait à un marquage individuel mais Guy Thys organisa une zone défensive autour de lui. Cette option fit merveille. Maradona fut réduit au silence. Les Argentins ne se sont jamais dépêtrés dans cette toile d’araignée parfaitement tissée. Dans ces conditions, et vu l’impuissance argentine, il était évident que noua allions hériter d’occasions de but. A la 63e minute de jeu, Franky Vercauteren m’adressa un bon centre devant le rectangle. J’avais remarqué qu’ Ubaldo Fillol s’avançait vers moi. A ce moment-là, mon intention était de le lober en reprenant la balle de Vercauteren de la tête. Mais Fillol s’est arrêté tout net et cela m’a fait changer d’avis en une fraction de seconde. J’ai d’abord contrôlé le ballon de la poitrine. Et j’ai tiré de l’extérieur du pied droit : Fillol était battu. On m’a souvent dit que cette phase de jeu avait semblé très longue, presque interminable. C’était une impression. Personne ne s’attendait à notre succès. J’en garde un souvenir ému car le monde entier a regardé ce match. Et le Camp Nou est un stade unique, le plus beau qui soit. Ce but est aussi entré dans l’histoire parce que nous avons battu l’Argentine. Après mon but, personne n’a cédé à l’excitation. L’équipe a respecté toutes les consignes de Guy Thys jusqu’au coup de siffler final. Sans cela, ce but n’aurait pas le même impact des années plus tard.  »

4. Philippe Albert

Belgique-Pays-Bas, 25 juin 1994, Orlando, Etats-Unis, 1-0, Coupe du Monde

Belgique : Preud’homme, Emmers (78′ Medved), Grün, Albert, De Wolf, Scifo, Franky Van der Elst, Staelens, Borkelmans (61′ Smidts) Degryse, Weber.

Pays-Bas : DeGoey, Valckx, RonaldKoeman, FrankDeBoer, Rijkaard, Jonk, RonaldDeBoer (46′ Witschge), Wouters, Taument (64′ Overmars), Bergkamp, Roy.

La Floride avait été envahie par des milliers de supporters belges et néerlandais qui ont fait la fête ensemble dans les rues d’Orlando. On avait rarement vu une ambiance aussi sportive et positive avant un match de Coupe du Monde d’une telle importance.  » Il y avait des monstres sacrés dans l’effectif néerlandais mais c’était le cas chez nous aussi « , se souvient Philippe Albert.  » Et pour tout vous dire : nous n’avions peur de personne, et donc pas des Néerlandais que nous respections, sans plus. Notre génération était mue par une grande confiance en ses moyens et son talent. Le stade était plein à craquer et le match fut de toute beauté. A certains moments, la Belgique méritait de mener 2-0 ou 3-0. Mais cela aurait pu se terminer par 2-2 ou 3-3. Ce fut un des meilleurs matches de cette World Cup. Si les Hollandais n’ont pas marqué, ce fut grâce à Michel Preud’homme qui réalisa quelques interventions miraculeuses pour le compte d’une équipe qui défendait en 5-3-2 et attaquait en 3-5-2. Puis, tout se joua suite à un coup de coin botté par Marc Degryse à la 66e minute de jeu. Sur ce genre de phase, les grands formats (Georges Grün, moi…) et ceux qui se débrouillaient bien dans le trafic aérien ( Enzo Scifo) montraient automatiquement le bout du nez dans le rectangle adverse. C’était une habitude, une attitude logique et normale mais rien n’avait été répété mille fois à l’entraînement. Non, c’était instinctif. Je sentais que je devais y aller, point final. Georges Grün a touché la balle de la tête. J’étais au bon endroit pour la reprendre : boum du gauche dans la mêlée. Jan Wouters s’était replié sur la ligne, aux côtés de son gardien de but. Dans un réflexe, il a voulu écarter le ballon mais il l’a fait avec son mauvais pied. Son geste défensif n’était pas parfait alors que ma frappe était quand même très puissante. Le ballon a encore heurté le montant avant de finir sa course dans les filets d’ Ed De Goey. Si Jan Wouters s’était mieux placé, je n’aurais peut-être pas marqué ce but dont on me parle souvent.  »

5. Jan Ceulemans

Belgique-Union Soviétique, 15 juin 1986, Léon, Mexique 4-3 (ap), Coupe du Monde.

Belgique : Pfaff, Gerets (111′ Léo Vander Elst), Grün (99′ Clijsters), Demol, Renquin, Scifo, Jan Ceulemans, Vercauteren, Vervoort, Veyt, Claesen.

Union Soviétique : Dassaev, Bal, Kouznetsov, Bessonov, Demianenko, Yaremtchouk, Aleinikov, Yakovenko (79′ Yevtoushenko), Zavarov (72′ Rodionov), Rats, Belanov.

En 1986, l’Union Soviétique disposait d’une équipe nationale qui était rangée parmi les grands favoris du tournoi mexicain. Ce rôle d’outsider convenait parfaitement à la bande à Jan Ceulemans. Faut-il croire que le coach soviétique, Valéri Lobanovski, avait oublié cet atout belge soigneusement mis au point par Guy Thys ?  » C’est un match qui est resté dans la légende en raison de son scénario hors norme « , dit le Caje.  » On est passé par tous les états d’âme : 0-1, 1-1, 1-2, 2-2 puis prolongations : 3-2, 4-2, 4-3. Tous les buts ont été importants. Enzo Scifo a fait 1-1 et moi 2-2 à la 78e minute de jeu. La puissante Union Soviétique était ébranlée. Elle avait survolé ses matches pour accéder à ce huitième de finale, ce qui ne fut pas notre cas. Cette équipe nationale était plus forte que la nôtre et elle estimait probablement que la Belgique ne pèserait pas lourd. Sur mon but, j’étais à hauteur de la ligne arrière soviétique. Je tournais le dos au gardien adverse, Rinat Dassaev. Stéphane Demol a dégagé la balle très loin. Je l’ai contrôlée de la poitrine, je me suis retourné, j’ai tiré et marqué. Les Soviétiques ont réclamé un hors-jeu. Il n’y en avait pas selon l’arbitre. La Belgique égalisait pour la deuxième fois et cela a certainement décuplé la confiance de tous. Les Diables Rouges jouaient bien mais avaient aussi un brin de chance. Stéphane Demol et Nico Claesen ont fait 3-2 et 4-2 durant les prolongations : leurs buts étaient splendides aussi. C’était un grand match des Diables Rouges avec un suspense fou mais Belgique-Allemagne de 1980 (finale de l’Euro) et Belgique-Espagne de 1986 avaient encore atteint un niveau supérieur.  »

6. Pol Anoul

France-Belgique, 17 octobre 1948, Colombes, France, 3-3, Amical

France : Darui, Huguet, Cuissard (41′ Guérin), Marche, Prouff, Hon, Baillot, Batteux, Baratte, Sinibaldi, Flamion.

Belgique : Daenen (30′ Meert), Aernaudts, Carré, Anoul, Henri Coppens, Henriet, Bertrand, Govard, Mermans, Chavès, Thirifays.

Entré dans l’histoire du football belge, et des Diables Rouges en particulier, comme  » L’homme de Colombes « , le polyvalent joueur du FC Liégeois Pol Anoul (né le 19 août 1922) doit ce surnom à un but légendaire qu’il inscrivit dans la banlieue parisienne, à Colombes, au Stade Yves du Manoir, précurseur du Parc des Princes d’abord puis du Stade de France. A la 52e minute, le Sang et Marine enraya une percée de son adversaire Henri Baillot. Par la suite, il esquiva en premier lieu le célèbre Albert Batteux d’une feinte de corps très subtile avant de poursuivre sa course entre deux opposants : Henri Guérin et Roger Marche, celui qui était surnommé en France  » Le Sanglier des Ardennes « . Entré dans le camp adverse, Pol Anoul dribbla successivement JeanProuff et Guy Huguet avant de tenter sa chance au but des 25 mètres. Une initiative couronnée de succès puisqu’il battit à cette occasion le keeper français Julien Darui d’un envoi en pleine équerre. La Belgique revint, de la sorte, à 3-2 avant d’arracher l’égalisation, en fin de partie, grâce au Gantois Freddy Chavès d’Aguilar.

7. MarcWilmots

Japon-Belgique, 4 juin 2002, Saitama, Japon, 2-2, Coupe du Monde

Japon : Narazaki, Matsuda, Morioka (72′ Miyamoto), Inamoto, Hidetoshi Nakata, Suzuki (69′ Morishima), Yanasigawa, Koji Nakata, Ono (64′ Alex), Toa, Ichikawa.

Belgique : De Vlieger, Peeters, Van Buyten, Van Meir, Van der Heyden, Simons, Vanderhaeghe, Walem, Goor (70′ Sonck) , Verheyen (83′ Strupar), Wilmots.

Opéré pour la onzième fois de sa carrière – du ménisque ce coup-ci -, le  » Taureau de Dongelberg  » avait promis qu’il serait au rendez-vous à l’occasion du match d’ouverture du Mondial. Et Willy a tenu parole en inscrivant le premier but de l’épreuve, d’un ciseau absolument splendide.  » Ma prestation lors du dernier galop d’entraînement contre les Tricolores, au Stade de France, m’avait mis en appétit « , se souvient-il.  » Ce soir-là, j’avais contribué au succès de nos couleurs, sur la marque de 1-2, en trompant Fabien Barthez, in extremis, d’une reprise de volée. Face aux Japonais, j’avais d’abord tenté ma chance au prix d’un heading, puis sur un tir croisé. La 57e minute aura finalement été la bonne pour moi : Eric Van Meir avait expédié un ballon en cloche, au-dessus de la défense. Quand j’ai constaté que l’adversaire commis à ma garde n’allait pas pouvoir intervenir, j’ai tenté le ciseau. Avec succès, car le ballon, bien piqué, était hors de portée pour le gardien. Ce geste, je l’avais essayé 40.000 fois à l’entraînement, au préalable (il rit). Pas toujours avec bonheur, loin s’en faut, mais à force de persévérance, j’ai fini par cadrer de plus en plus ces rétros acrobatiques. En définitive, j’ai eu de la chance au bon moment. Etait-ce mon plus beau but en sélection ? Je dirais le plus spectaculaire, peut-être. Moi, celui qui me tient le plus à c£ur est le troisième que je plante contre la Russie : un contrôle du droit qui met deux adversaires sur le mauvais pied, puis un tir du gauche qui fait mouche. Mon goal le plus précieux, hélas, m’a été enlevé. C’est bien sûr celui que j’ai inscrit durant ce même Mondial asiatique face au Brésil, d’un coup de tête bien placé. Aujourd’hui encore, je me demande toujours pourquoi l’arbitre ne l’a pas validé « …

8. André Denul

Belgique-Portugal, 17 février 1971, Anderlecht, Belgique, 3-0 Ch. d’Europe

Belgique : Piot, Heylens, Plaskie, Dewalque, Thissen, Vandendaele, Van Moer, Semmeling (46′ Thio), Denul, Lambert, Van Himst.

Portugal : Damas, Amandio, Humberto, Rolando, Hilario, Neves, Fernando Silva (46′ Rebelo) , Pinto (73’Guerreiro) , Baptista, Eusebio, Simoes.

Appelé pour la toute première fois en sélection à l’occasion du match précédent contre l’Ecosse (rencontre qui coïncidait avec le retour chez les Diables Rouges de Paul Van Himst, auteur d’un hat-trick face à l’équipe britannique), l’attaquant lierrois André Denul paraphe le dernier but de la soirée au terme d’un mouvement de toute beauté.  » Wilfried Van Moer avait sollicité Popol pour un une-deux « , se rappelle-t-il.  » Au lieu de s’en tenir à un seul échange, le duo effectua ce mouvement à deux reprises au cours de la même phase.

Quand Kitchi récupéra le cuir, il me le céda lui aussi en un temps. Le temps de crocheter un adversaire et je logeai le ballon dans le but. Une seule fois, dans ma carrière, j’avais été impliqué dans une phase similaire : en Coupe d’Europe, face au PSV Eindhoven, quand j’avais également signé la quatrième et ultime réalisation de mes couleurs après un double coup de génie signé Frans Vermeyen et Swat Janssens. Ce qui était chaque fois remarquable, c’est qu’une demi-douzaine d’adversaires furent médusés sur ces actions. Or, il y avait quand même du beau linge derrière chez les Portugais, avec Humberto et Hilario. Sans oublier le légendaire Vitor Damas dans les buts. C’était mon premier but chez les Diables Rouges ! Et il méritait le détour  » !

9. Jean Cornelis

Angleterre-Belgique, 21 octobre 1964, Wembley, Angleterre, 2-2, Amical

Angleterre : Waiters, Cohen, Thomson, Milne, Norman, Moore, Thompson, Greaves, Pickering, Venables, Hinton.

Belgique : Nicolay, Heylens, Verbiest, Plaskie, Cornelis, Gérard Sulon, Jurion, Vermeyen, Van Himst, Vandenberg, Puis.

Le gazon anglais, et celui de Wembley en particulier, ont souvent été une morne plaine pour les Diables Rouges, régulièrement réduits à la portion congrue, si pas davantage, là-bas. Sauf en cette soirée automnale des sixties quand ils furent bien près de ramener la victoire du stade londonien. En effet, le score final de 2-2, atteint à la 70e minute, ne fut rendu possible que suite à un own-goal de Laurent Verbiest. En première armure, c’est un autre défenseur, anderlechtois comme lui, qui s’était distingué en collaboration avec Paul Vandenberg.  » Jean Cornelis, qui officiait au poste de back gauche, avait intercepté le ballon à hauteur de la ligne médiane  » dit-il.  » Il s’est d’emblée engouffré sur son flanc, où je lui ai fait place en rentrant dans le jeu. A un moment donné, il m’a sollicité en vue d’un une-deux et je lui ai rétrocédé le cuir. Mon coéquipier ne s’est pas posé la moindre question et a envoyé une frappe puissante qui a terminé sa course en pleine lucarne, sur la gauche du portier anglais Anthony Waiters.  » Ce fut là mon seul but en 19 sélections « , observe Jean Cornelis.  » Mais quel but ! J’en ai, certes, marqué d’autres dans ma carrière. Mais plus jamais un petit bijou pareil. Aujourd’hui, près d’un demi-siècle plus tard, les anciens m’en parlent encore. Comme quoi, il avait vraiment frappé les imaginations « .

10. Bernard Voorhoof

France-Belgique, 15 avril 1928, Colombes, France, 2-3, Amical

France : Henric, Wallet, Domergue, Chantrel, Kenner, Villaplane, Dewaquez, Bardot, Nicolas, Langiller, Gallay.

Belgique : Caudron, Lavigne, Hoydonckx, Pierre Braine, Vanhalme, Boesman, Voorhoof, Devos, Raymond Braine, Moeschal, Diddens.

Né le 11 mai 1910, l’attaquant du Lierse Bernard Voorhoof n’avait donc pas encore atteint ses 18 ans lorsque le sélectionneur, Hector Goetinck, décida de le titulariser pour les besoins d’un déplacement face à l’équipe de France, dans la banlieue de Paris. Après cinq minutes de jeu à peine, le jeune débutant remercia le fédéral de la plus belle manière qui fût en ouvrant le score sur un but d’anthologie. Le Racingman Jules Lemaire, alias Lavigne, chipa d’abord le ballon au Français Alexandre Villaplane. Il céda ensuite le cuir à son coéquipier bruxellois Jacques Moeschal, qui trouva Jan Diddens sur le flanc gauche. Son centre fut alors repris d’une tête plongeante par le teenager et le ballon termina sa course dans les buts français malgré une tentative du défenseur adverse Marcel Domergue d’arrêter le ballon de la main. Ce devait être là le premier des 30 goals réalisés par le puncheur des Jaune et Noir en sélection. Un record qui tient toujours aujourd’hui, même s’il a été égalé depuis lors par un certain Paul Van Himst. Il ne fait cependant aucun doute que si la carrière de  » l’ange blond  » n’avait pas été entravée par la deuxième guerre mondiale, Bernard Voorhoof, qui a joué jusqu’à près de 40 ans, serait actuellement le seul meilleur puncheur belge de tous les temps.

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