» Bobby Charlton était l’anti-Best « 

Pierre Bilic

NÉ EN 1941, HEYLENS FUT UN EXCELLENT BACK DROIT (67X DIABLE ROUGE, ÉQUIPE D’EUROPE 65, MONDIAL 70 AU MEXIQUE, 7 TITRES ET 3 COUPES DE BELGIQUE AVEC ANDERLECHT). COACHA UNE DOUZAINE DE CLUBS (PASSA 5 ANS AU LOSC ET FUT COACH BELGE 1984 À SERAING)

 » J’éprouve une grande admiration pour Bobby Charlton (73 ans) qui a fait les beaux jours de Manchester United de 1954 à 1973. C’était un numéro 10 exceptionnel que j’ai rencontré avec Anderlecht en huitièmes de finale de la C1. En 1968, c’était un événement car Manchester était le détenteur de cette Coupe d’Europe des Clubs Champions après son succès en finale (4-1) contre Benfica à Londres. Champion du Monde en 1966, Charlton était évidemment de la partie. Anderlecht avait un £uf à peler avec ce club. En 1956, déjà en C1, les Mauves avaient été battus 0-2 chez eux et laminés 10-0 en Angleterre. Cette dégelée resta longtemps dans les mémoires. Félix Week, le gardien d’Anderlecht avait passé la plus mauvaise soirée de sa carrière à Winchester United, comme il disait. J’avais 15 ans à l’époque et cela m’attrista durant quelques semaines. J’étais apprenti électricien et mon patron se moquait de moi : -A ta place, menneke, je demanderais mon transfert à l’Union Saint-Gilloise. C’est pas l’Union qui prendra un jour une telle raclée. C’est dire si cela a laissé des traces mais j’ai bien fait de rester à Anderlecht.

Nous avons retrouvé Manchester United 12 ans et 30 matches européens plus tard. Anderlecht avait acquis de l’expérience et notre équipe, rajeunie, renforcée, coachée par Pierre Sinibaldi, fit figure honorable à Old Trafford malgré le 3-0. MUFC venait de remporter la première de ses trois C1 et Charlton brilla à la man£uvre. Au retour, le 27 novembre 1968, Anderlecht secoua le cocotier : 3-1 avec deux buts de Pummy Bergholtz et un de Jan Mulder. Même si nous étions éliminés, l’affront de 1956 était lavé. En grand seigneur, Charlton nous félicita. C’était déjà une légende. Le 6 février 1958, il se trouvait à bord de l’avion qui ramenait Manchester après un match européen à l’Etoile Rouge Belgrade. L’appareil s’écrasa au décollage à Munich. C’était une tragédie : 8 joueurs de Manchester périrent. Charlton fut retrouvé légèrement blessé à 50 m de l’impact. Il faisait partie des miraculés mais l’équipe était décimée. Il se consacra durant des années à la reconstruction de son club. Son talent fut récompensé par le Ballon d’Or ’66.

Charlton, c’était le fair-play, la classe et on peut s’étonner que Sir Bobby ait été l’équipier d’un génie fou : George Best. Charlton était l’anti-Best. Le diable et l’ange gardien. Il faut un peu de tout dans une grande équipe. En Angleterre, on n’oublie pas ce que des personnages comme lui ont apporté au football. Le 3-1 du 27 novembre 1968 restera un des meilleurs souvenirs de ma carrière : c’était la première fois qu’Anderlecht battait un club anglais en coupe d’Europe.  »

PIERRE BILIC

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