Berlusconi a contribué à mettre le Calcio en danger de mort.

P iero a 18 ans. Il est étudiant en histoire à l’université de Palerme, l’une des plus anciennes d’Europe. Lors des dernières vacances de Noël, il a racheté à un copain parti étudier à Milan l’abonnement dans la Curva Nord du club rose et noir, devenu l’un des plus forts de Série A. Durant toute la semaine dernière, Piero s’est longuement tâté. Il avait une forte envie d’accompagner d’autres fans palermitains à Catane pour le derby sicilien du week-end. Mais quand on est étudiant, on n’a pas forcément l’argent disponible pour un tel déplacement. Et puis, son frère Pasquale, d’un an son aîné, étudiant en droit et également supporter de Palerme, lui a demandé de réfléchir et de se souvenir des bagarres qui s’étaient déroulées lors du dernier derby entre les deux équipes, à Palerme. Piero n’est pas allé à Catane et a vécu via les médias le chaos catanais. Peut-être que Pasquale lui a sauvé la vie…

En tout cas, rien ne sera jamais plus comme avant dans le Calcio, pris entre le pire et le meilleur. La violence qui gronde dans les gradins de tous les stades du pays (toutes divisions confondues) comme la lave de l’Etna qui domine le stade de Cibali à Catane et qui fait pleurer. Et la victoire de la Squadra à la dernière Coupe du Monde, qui fait rire. Mais ce dernier exploit ne suffit pas à tout masquer.

Dimanche dernier, Pasquale et Piero en ont eu assez de parler de tous les problèmes du Calcio et ont voulu aller jouer avec des copains. Mais impossible de louer à l’heure un de ces terrains de minifoot si typiques en Italie : ils sont à l’extérieur, en synthétique et sont entourés de hauts filets. Tout était fermé. Le football était prisonnier.

Luca Pancalli, le commissaire spécial de la fédération italienne, avait pourtant prévenu tout le monde une semaine plus tôt. Après la mort suite à une rixe d’un dirigeant de série C, il avait dit qu’il arrêterait tout à la moin- dre violence. Il a tenu parole. Maintenant il faut des mesures en profondeur comme en Angleterre, où on joue désormais sans barrières autour des terrains et où c’est le calme total en dehors des enceintes. Cela a pris du temps et coûté très cher, mais c’était le prix à payer suite à une situation qui avait provoqué le drame du Heysel en 1985 (des dizaines de morts… italiens lors de la finale de C1 entre la Juventus et Liverpool).

L’insécurité glaçante actuelle est un des héritages des gouvernements de Silvio Berlusconi qui ont laissé l’ensemble du pays dans un état lamentable (finances, santé, éducation,…). Tout à sa conduite populiste des affaires et à ses intérêts personnels, Berlusconi a fait voter des lois pour protéger le football mais elles n’ont pas été appliquées parce que les clubs n’ont jamais voulu payer la facture de la sécurité et les politiques risquant d’être impopulaires n’ont pas voulu jouer le jeu. A commencer par Berlusconi qui a toujours multiplié les casquettes de politicien, businessman et président de l’AC Milan. Le dernier bel exemple de cette créature protéiforme est d’avoir – en tant que président de Milan – exercé un terrible lobby politique pour que son club ne soit pas relégué en Série B à l’issue du Calciopoli. Et maintenant, comme big boss de la société de télévision Mediaset, il essaye de forcer la ligue professionnelle italienne à lui rendre une partie des droits payés en début de saison du fait de la chute des audiences télévisées, une conséquence du Calciopoli (suite à la relégation de la Juve et aux points retirés, le cavalier seul de l’Inter ne passionne plus personne).

Berlusconi a été remplacé par Romano Prodi aux manettes de l’Etat italien et c’est à lui à jouer. Mais on le voit quand même mal réussir à redorer suffisamment le blason du Calcio pour redevenir un candidat valable à l’organisation de l’EURO 2012…

par john baete

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire