Beckham du pauvre

Il pète le feu avec Lokeren après quelques coups d’éclat mais surtout une litanie de déboires aux Pays-Bas.

« Après le match contre le Standard, ma femme m’a envoyé un sms : -On me dit que tu as marqué deux buts. Qu’est-ce que tu fabriques ?  » Benjamin De Ceulaer (27 ans ce 19 décembre), marié à son amour d’enfance, n’a jamais fait flambé les marquoirs. Vrai attaquant, oui, mais le plus souvent déporté sur un flanc. Et des stats timides, donc : à peine 20 buts en D1 belge et hollandaise depuis ses débuts pros avec Saint-Trond en 2002.

Aujourd’hui, l’homme se découvre à Lokeren. Depuis deux mois, il marque, marque, marque. Jelle Vossen est encore loin au classement des buteurs mais Benji boxe dans la catégorie de Gohi Bi Cyriac, Marvin Ogunjimi, Romelu Lukaku ou Elyaniv Barda. Pas mal !

En tout cas, on l’avait complètement oublié. En 2005, il est in. De Ceulaer est mannequin à ses heures pour Dirk Bikkembergs, on le surnomme le David Beckham belge. Et surtout, il est considéré comme un des meilleurs avants du pays. A ce moment-là, on est sûr que Saint-Trond est devenu trop petit pour lui. Il ne sait plus où aller… A lui de choisir : Anderlecht (où il a fait deux ans de sa formation), Genk (quatre saisons chez les jeunes) et le Club Bruges sont sur sa piste. Il envoie tous ces beaux noms à la gare car il a mieux encore : il signe à Feyenoord.

Premier coup dur, à peine arrivé chez les kaaskoppen : on l’estime encore un peu tendre et on le prête au RKC Waalwijk. C’est déjà moins glamour. Deuxième patate : un… coéquipier lui explose une jambe alors qu’il fait une toute bonne saison (sept buts, il n’avait jamais fait aussi bien dans un même championnat) avec Adrie Koster comme coach. Troisième gnon : de retour à Rotterdam après un an, il casse la baraque en préparation, joue (bien) contre Middlesbrough et même Chelsea, mais dès que les choses sérieuses commencent, le coach Erwin Koeman le saque, lui fait comprendre sans jamais lui parler qu’il ne sera jamais mieux qu’un réserviste au Kuip. Et quatrième uppercut, alors qu’il est retourné à Waalwijk, plus prêté mais à titre définitif : il ne peut empêcher la chute en D2 de son club, en 2007.

Play-boy trop net

Allez, encore un gros coup dur… pour la route : en rentrant d’une fête du foot (l’équivalent de notre Soulier d’Or), sa voiture percute à 130 km/h un chien errant. Perte totale mais pas une égratignure sur le corps du play-boy. Au commissariat, les flics lui racontent qu’un an plus tôt, le même accident s’est produit au même endroit et qu’il y a eu un mort. Benji était déjà bien croyant ( » Je ne vais jamais à l’église mais je prie tous les soirs avant de me mettre au lit « ), il le devient encore plus :  » Quelques jours après ce petit miracle, je suis allé voir un tatoueur et je lui ai demandé de me dessiner une croix dans le dos.  »

Benjamin De Ceulaer sait aujourd’hui qu’il n’a pas fait que des bons choix :  » Je n’aurais pas dû signer à Feyenoord. Je devais d’abord passer par un grand club belge, histoire de m’habituer à la pression. A mon premier entraînement à Rotterdam, il y avait 12.000 spectateurs : je me demandais où j’étais tombé. Et l’ambiance au Kuip, c’est un truc terrible. Je n’étais tout simplement pas prêt.  » L’avis de Peter Delorge, icône trudonnaire :  » Un joueur aussi rapide, technique et spectaculaire était fait pour réussir à coup sûr dans le championnat hollandais. Benji avait sans doute juste oublié une petite chose : quand tu vas là-bas comme étranger, tu dois être au moins quatre fois meilleur que les joueurs du pays si tu ne veux pas te faire démolir dans la presse.  » Seljko Petrovic, qui a été son entraîneur à Waalwijk, confirme que le ket n’a pas donné assez :  » Il se serait amélioré de 40 % s’il avait été plus brutal. Je veux dire plus dominant. Une brutalité positive, c’est exiger le ballon à ses coéquipiers et faire soi-même une action. Ces dernières années, plusieurs Belges ont su faire ça avec l’Ajax. De Ceulaer, lui, est toujours resté le même garçon très net.  »

Sale joueur ?

Attention, le nouveau feu follet de Lokeren n’a pas non plus connu que des drames aux Pays-Bas. Il a longtemps été le chouchou de Waalwijk. Il y a fait des trucs presque aussi forts que son geste génial avec Saint-Trond dans un match de Coupe de Belgique contre Zulte Waregem (tapez Benjamin De Ceulaer sur youtube). La dernière montée de Waalwijk en D1 portait sa griffe grâce à un but décisif en play-offs contre De Graafschap. Et il a parfois eu très bonne presse. Comme quand on a rappelé, pendant qu’il traversait une période de très grande forme, qu’il avait été un cadre de la sélection de pubères belges (avec Thomas Vermaelen) qui avaient pris quatre points sur six contre l’Espagne de Cesc Fabregas et Andrés Iniesta.

Et toujours à propos de ces scribouillards hollandais… Il leur est arrivé de casser complètement notre Benji. Par exemple en prenant deux cartons rouges en trois semaines, chaque fois pour des agressions. On ne l’a pas tout à fait traité d’idiot mais on a bien insisté sur le fait qu’il ne comprenait rien du tout au foot. Quand il s’est pris sa deuxième exclusion (pour une vilaine faute sur Christophe Grégoire), la presse hollandaise a parlé de tackle de l’horreur et conclu que De Ceulaer était, à ce moment-là de la saison, le plus sale joueur de leur D1. Chez nous, c’est loin d’être le cas.

PAR PIERRE DANVOYE

 » Je suis un miraculé de la route, c’est pour ça que je me suis fait tatouer une croix dans le dos. « 

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