BASIC INSTINCT

Au Sporting, celui qui critique John van den Brom risque le renvoi. La spectaculaire rentrée dans le rang du principal candidat au titre était prévisible, mais son entraîneur n’a pas pris l’avertissement au sérieux. Il semble que l’équipe en paie maintenant les pots cassés.

L’été dernier, l’arrivée de John van den Brom a été vécue comme celle du Messie. Un innovateur, un people manager, un homme qui allait faire progresser les joueurs, un homme aussi qui a rapidement qualifié Anderlecht pour la Ligue des Champions. La manière n’était pas très importante et les embrassades de Van den Brom et de son adjoint Besnik Hasi, accolés dans la position du missionnaire sur la pelouse, ont été mieux accueillies ici qu’aux Pays-Bas, où les observateurs ont suivi le nouveau changement de cap de leur compatriote avec un certain scepticisme. Celui-ci a rapidement rallié à sa cause tous les protagonistes de son nouveau club tout en répondant aux attentes sur le terrain. Une fois l’hiver installé, Anderlecht emmenait résolument le classement tout en développant un football audacieux et attractif.

Puis tout a changé. Le football a perdu de son charme et les résultats sont devenus décevants. Suite à la division par deux des points avant le début des play-offs, les Bruxellois ont senti le souffle de leurs rivaux. Si, initialement, Van den Brom semblait rafraîchissant, il est devenu de moins en moins crédible. Contre le Standard, il a refusé de jouer mais ensuite, il a bombé le torse. Il a repoussé les critiques avec un dédain que Neerpede ne connaît que trop bien, désormais. L’ambiance et l’image ont changé. On est loin, très loin, de l’homme affable que la Belgique a découvert l’été dernier.

Innaurato prend la porte

Dimanche, après son match nul contre le Club Bruges, Van den Brom s’est déclaré  » particulièrement fier  » de la deuxième mi-temps. La réalité, c’est qu’Anderlecht n’a toujours pas gagné un seul match après trois journées de play-offs. La tendance négative qui s’est amorcée après la trêve hivernale se poursuit donc. Avec ou sans Dieumerci Mbokani. On n’a guère cherché les causes de ce passage à vide. Il a échappé à toutes les analyses mais le nombre de blessures auquel Anderlecht a été confronté il y a quelques semaines est interpellant, d’autant plus qu’il s’agissait de blessures musculaires : une élongation dans le chef de MassimoBruno et de RonaldVargas, une déchirure pour CheikhouKouyaté et GuillaumeGillet, lequel n’est pourtant jamais blessé. Ce constat, posé à ce stade du championnat, peut indiquer un manque de fraîcheur physique.

C’est précisément ce qu’avait craint Mario Innaurato avant la Noël. Il en avait averti le club mais Van den Brom a mal pris la critique et un mois plus tard, le préparateur physique était limogé. Déjà pendant la préparation de la saison, il était en sérieux désaccord avec les méthodes de travail du nouvel entraîneur principal. Il estimait qu’Anderlecht ne s’entraînait pas comme il l’aurait fallu, insistant trop sur la résistance au détriment de l’endurance. Le Batave, accueilli comme un innovateur, semblait n’avoir jamais entendu parler de périodisation. Plus Innaurato, le francophone, faisait de son mieux pour s’expliquer en néerlandais, plus l’entraîneur -dont le français n’a pas progressé d’un fifrelin en l’espace de dix mois – se moquait de lui. Las, il a décidé de ne plus reporter une opération au genou, prévue de longue date, et de disparaître un moment de la scène. Il a assisté aux matches sur des béquilles. Une fois sa revalidation achevée, il a reçu son C4.

Fin mars, le médecin du club, Kris Vollon, a également été renvoyé. À nouveau suite à un conflit avec Van den Brom, à propos de l’éternel blessé qu’est Ronald Vargas, paraît-il. En décembre, il est parti dix jours en stage aux États-Unis, avec Cyriac et un kinésithérapeute du club. Une belle et coûteuse excursion qui n’a servi à rien. Anderlecht a annoncé que Geert De Clercq reprendrait les tâches de Vollon jusqu’au terme de la saison mais c’est un secret de polichinelle : après son chemin de croix, Matias Suarez n’a plus la moindre confiance dans le chirurgien anversois. Allant à l’encontre même de son communiqué de presse, Anderlecht s’est empressé d’embaucher un nouveau médecin…

À l’instinct

À Neerpede, tout le monde a compris : celui qui émet une critique est fini aux yeux de Van den Brom. L’entraîneur boude les avis bien intentionnés et donne l’impression de suivre son instinct, ce qui est contraire à la science. On peut entraîner les tirs au but ? Il rigole. À la fin de la saison passée, Herman Van Holsbeeck a conclu un accord avec un psychologue. Le club pensait que son expertise pourrait générer une plus-value. Jusqu’à l’embauche de Van den Brom, qui n’a pas voulu en entendre parler. Le véto de l’entraîneur a fait loi.

Les problèmes d’Anderlecht commencent à présenter des analogies avec ceux du Club Bruges. Celui-ci avait choisi en Georges Leekens un entraîneur en fin de course, que toute passion avait quitté mais surtout un homme qui ne tolérait pas la moindre ingérence de la part des spécialistes. Quelques rapides succès ont camouflé le manque de condition de base de l’équipe mais les observateurs internes n’étaient pas dupes. Bien avant qu’Anderlecht ne cale, le château de cartes brugeois s’est effondré. Dimanche dernier, au stade Constant Vanden Stock, le Club a été débordé par un Anderlecht enthousiaste, qui, en infériorité numérique, a joué le tout pour le tout. C’est une conséquence directe du manque de travail de base effectué en été sous les ordres de Leekens. Reste à voir si Van den Brom parviendra à redresser la situation à temps pour Anderlecht.

PAR JAN HAUSPIE- PHOTOS: IMAGEGLOBE

Van den Brom boude les avis des spécialistes et se fie à son instinct.

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