Il était le seul représentant de Genk en équipe nationale. Désormais, ils sont deux mais lui n’y est plus.
L’image que l’on se fait de lui est-elle erronée ? Les clichés qui se répandent correspondent-ils à la réalité ? Qu’on l’aime ou qu’on ne l’aime pas, il faut reconnaître à KevinVandenbergh (23 ans) un mérite : il a le courage de ses opinions et ne se cache pas. Au lendemain du 6-0 à Anderlecht, et juste après avoir appris sa non-sélection pour les Diables Rouges, il a accepté de débattre de ces clichés. On en connaît d’autres qui, dans des circonstances similaires, se seraient rétractés.
Il est le fils de son père
Kevin Vandenbergh : » Oui, bien sûr. Tout le monde est le fils de son père. Et, quoi qu’il se soit passé ou qu’il puisse encore se passer, Erwin restera toujours mon père. Je ne me souviens plus de la dernière fois où je l’ai vu, mais je laisse toujours la porte ouverte à une réconciliation… s’il veut bien faire le premier pas et reconnaître ses torts. J’attends avec impatience qu’il me contacte, afin que nous puissions avoir une franche discussion et éclaircir les zones d’ombre. Ce qui s’est passé n’est pas drôle. J’ai vécu le divorce de mes parents, le procès qui en a découlé. J’ai toujours essayé de séparer la vie privée de la vie professionnelle, mais lorsqu’on vit des choses pareilles, on en emporte toujours quelque chose sur le terrain. Cela dit, quoi qu’en pensent certains, je ne suis pas le même footballeur que mon père. J’ai un sens du but aussi aiguisé, mais je travaille plus sur le terrain. Si je suis toujours fier d’être le fils d’Erwin ? Rien ne sera plus jamais comme avant, mais il m’a transmis des qualités, footballistiques et autres, que je ne renie pas. Cette séparation est grave pour lui également. Il devrait être fier d’avoir un fils comme moi, qui réussit en D1 et perpétue la tradition des attaquants dans la famille « .
Il marque mais ne fait rien d’autre
» Cette saison, Genk joue dans un autre système et je dois me mettre davantage au service de l’équipe. Seulement, beaucoup de gens ne s’en aperçoivent pas et on met toujours l’accent sur l’aspect négatif. C’est typique de la mentalité belge. Au lieu de souligner mes buts, on met le doigt sur mes lacunes. Lorsque TomBoonen gagne toutes les classiques, plus le Championnat du Monde, on lui reproche d’abandonner à la moindre côte dans le Tour de France. A sa place, je changerais de nationalité : il serait peut-être plus apprécié à l’étranger « .
Il ne sait pas jouer dans un 4-5-1
» J’ai démontré le contraire au cours des trois derniers mois : j’ai livré quelques prestations de haut vol dans un système en 4-5-1. Certes, c’est sans doute plus facile pour moi de jouer dans un 4-4-2, et d’avoir un autre attaquant à mes côtés. La blessure d’ IvanBosnjak m’a été préjudiciable, car nous étions complémentaires. Je suis persuadé que, s’il était toujours dans l’équipe, je totaliserais actuellement plus de buts à mon compteur. Dans un 4-5-1, je dois jouer différemment. Beaucoup de gens ne voient pas le nombre de kilomètres que je parcours pour soulager mes médians ou rechercher un ballon. A Anderlecht, la semaine dernière, j’ai sans arrêt couru mais je n’ai pas touché le ballon. La conclusion des gens ? On n’a pas vu Kevin Vandenbergh ! Ce fut aussi le cas dans d’autres matches. Mais j’ai créé des espaces pour des partenaires, et je songe en particulier à FarisHaroun, voire à WouterVrancken : combien de buts n’ont-ils pas inscrits grâce au fait que je mobilisais l’attention de plusieurs défenseurs adverses ? »
On ne le voit pas dans les grands matches
» Je trouve que c’est le contraire : j’ai livré mes meilleures prestations dans les matches au sommet. A-t-on oublié le double test-match contre le Standard ? Ma non-sélection pour le Portugal apporte de l’eau au moulin de mes détracteurs, mais je suppose que RenéVandereycken a opéré sa sélection en fonction du type de match qui attend les Diables Rouges à Lisbonne. Là-bas, ce sera une bataille de tranchée dans l’entrejeu. Il faudra peut-être aussi subir le siège en défense. On ne jouera probablement pas avec deux attaquants. Dans un football de contre-attaque, je conviens sans doute moins que d’autres, puisque je suis – c’est encore un cliché – essentiellement un joueur de rectangle « .
Il n’accepte pas d’être réserviste
» Cela ne me fait jamais plaisir de me retrouver sur le banc, je l’admets. Dire qu’aujourd’hui, j’accepte plus facilement un statut de réserviste, est un grand mot. Disons que je m’en accommode. Je ne me plains plus dans les médias, comme autrefois. Beaucoup de gens n’attendent que cela : que j’ouvre ma g… Donc, je préfère la fermer. On s’attendait à ce que j’explose après le match contre Roulers, lorsque HugoBroos m’avait scotché sur le banc alors qu’il avait lancé JelleVossen au jeu en fin de match. L’entraîneur m’a expliqué son choix : le match était plié et il trouvait que c’était l’occasion idéale d’offrir une chance à un jeune talent. J’aurais également aimé participer au match, mais je peux comprendre le choix du coach. Tout comme je peux comprendre qu’il choisisse entre GoranLjubojevic ou moi, selon qu’on ait besoin d’un joueur physique capable d’émerger de la tête sur les centres aériens, ou d’un élément plus technique et plus à l’aise dans les combinaisons. C’est un atout pour l’équipe de disposer de deux attaquants ayant des styles différents. Aujourd’hui, l’esprit collectif est beaucoup plus présent en moi. C’est l’équipe qui compte avant tout « .
Il est un tire-au-flanc
» C’est faux, et je crois que WouterVrancken et WimDeDecker l’ont clairement expliqué dans votre magazine. Je travaille autant que les autres à l’entraînement, et j’ose même affirmer que je remplis un certain rôle dans le vestiaire, mais ceux qui ne veulent pas le voir continueront à fermer les yeux. J’ai cette étiquette collée sur le dos, et pour m’en défaire, c’est très compliqué. Pourtant, les chiffres parlent pour moi : en cinq années à Genk, j’ai loupé moins de dix entraînements. Les méchantes langues diront que, si je suis rarement blessé, c’est parce que je ne mets jamais le pied. Là encore, c’est faux. D’aucuns diront aussi que je suis faible mentalement, mais après tout ce que j’ai vécu, tant sur le plan privé que professionnel, il faut être fort pour ne pas sombrer. Pourquoi suis-je toujours critiqué à ce point ? D’abord, sans doute, parce que je suis le fils d’Erwin. De ce fait, chacune de mes paroles est passée au crible, et la portée en est amplifiée. Je dois apprendre à vivre avec cela. Après le match au Standard, j’avais émis une critique à l’encontre de FrankDeBleeckere. Une critique justifiée, selon moi. Sept ou huit autres joueurs avaient émis la même critique. Mais qui a fait la manchette des journaux ? Moi, évidemment ! »
Il a une trop haute opinion de lui-même
» Je crois que je suis parfaitement conscient de mes qualités et de mes défauts. J’ai progressé physiquement, mais mon jeu de tête reste un point faible. Si je suis ambitieux, je sais que je ne peux raisonnablement songer qu’à trois championnats : la Belgique, les Pays-Bas et… l’Espagne. Je ne dois pas viser l’Italie, l’Allemagne ou l’Angleterre, ce type de football ne me conviendrait pas du tout. Je sais aussi qu’avant de franchir le pas vers l’étranger, j’ai intérêt à encore progresser dans le championnat de Belgique. J’ai déjà reçu des propositions de l’étranger : AZ, Sochaux et Levante, notamment. J’ai refusé car je trouvais le moment mal choisi, en milieu de saison, pour partir et essayer de s’acclimater en quatrième vitesse à un autre pays. Je pouvais aussi aller à Moscou, mais la Russie ne m’attirait pas outre mesure. Les Pays-Bas me conviendraient, parce qu’on y joue offensivement, qu’il y a beaucoup d’espaces et qu’on accepte le franc-parler. Je suis peut-être même encore… trop brave pour les Néerlandais. Je rêve des Pays-Bas depuis la signature de mon premier contrat pro, à 16 ans, mais je crois qu’il faut attendre le moment adéquat. Jouer en Espagne est aussi un rêve. Mais je ne vise pas le Real Madrid ou le FC Barcelone : c’est beaucoup trop haut pour moi. Une équipe de milieu de classement, en revanche… De toute façon, c’est Genk qui décidera. Je suis encore sous contrat jusqu’en 2009 et avant cela, le club peut fixer le prix de transfert qu’il désire. J’ai souvent été critiqué, mais je crois qu’on se rendra seulement compte de ce que j’ai représenté pour Genk lorsque je ne serai plus là. Si j’inscrits 15 buts cette saison, j’aurai réussi cette performance cinq saisons d’affilée. Peu d’attaquants peuvent en dire autant « .
Il est l’ami de Steven Defour
» Oui, et alors ? Dans le football professionnel, on a des collègues, mais peu d’amis. Steven en est un. J’ai toujours gardé le contact avec lui, et ce n’est peut-être pas très bien vu à Genk, mais je suis fidèle en amitié. Cela ne signifie pas que j’ai toujours été d’accord avec lui. Je n’ai pas apprécié la manière dont il a rompu son contrat à Genk, et je le lui ai dit. Ceci étant, pour pouvoir le juger, il faut connaître le fin fond de l’histoire et c’est le cas de très peu de gens. Je sais reconnaître les mérites des gens qui m’ont aidé. Je suis toujours reconnaissant aux joueurs de Westerlo qui m’ont accueilli lorsque j’ai intégré le noyau A, alors que je n’avais pas encore 16 ans.
Je ne peux pas les citer tous, mais je songe en particulier à FrankDauwen, qui m’a guidé et soutenu. Il avait encore joué avec mon père précédemment, et se rendait même aux entraînements avec lui, c’est sans doute l’une des raisons pour lesquelles il m’avait pris sous son aile protectrice. Je citerai RudiJanssens également, ainsi que des joueurs que j’avais côtoyés dans le noyau B, comme JefDelen lorsqu’il était blessé, ou SydneyLammens avec lequel le courant est directement passé. Pour moi, l’amitié passe avant tout. Une carrière est éphémère. J’ai 23 ans et j’espère encore jouer 12 saisons, mais il y aura une vie après le football. C’est là qu’il faudra pouvoir compter sur les amis. Les anciens collègues, je n’en entendrai plus parler à ce moment-là « .
Il est le seul Diable de Genk en équipe nationale
» Pour le match au Portugal, ce ne sera donc plus le cas. Si j’étais gêné d’être le seul Diable de Genk ? C’était parfois ennuyeux d’entendre des remarques à ce sujet alors que je n’étais pas responsable de la situation. C’était le choix du coach fédéral, pas le mien. Lorsque j’ai été sélectionné, j’ai répondu aux convocations, c’est tout. Mes relations avec Vandereycken ne sont ni moins bonnes ni meilleures que celles qu’il entretient avec d’autres joueurs. J’estime que j’avais mérité mes sélections sur le terrain, pas pour d’autres motifs « .
par daniel devos – photos : reporters
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