Arrête ton baratin !

Le discours, la méthode et les orphelins. Le discours formaté qui fragilise notre âme nostalgique est renforcé par la raison. Celle de l’état dans l’état qu’est un club de foot. Et plus encore son vestiaire. La méthode fait de nous des orphelins. La vérité qui toujours, pensait-on, venait des pieds ou des lèvres de nos héros footeux. Jusqu’où la com’ des coaches peut-elle aller ?

Par Frédéric Waseige

L’indécence politicarde a contaminé. Ceux qui étaient des éducateurs sont capables de dire tout et son contraire pour un même fait. Kenny Dalglish nous peine. Il s’indigne que Luis Suarez prenne huit matches de suspension pour propos racistes. Il soutient les autres joueurs quand ils portent un t-shirt à son effigie. Belle solidarité mais belle gravité aussi. La puissance émotive d’un maillot pousse parfois à la stupidité.

Dans le même match, un joueur peut laisser jaillir la connerie de sa bouche pour fustiger la couleur d’un adversaire et, quelques minutes plus tard, partager l’amour et l’émotion avec un coéquipier de la même origine. Y a pas à transiger avec le racisme. Qu’il soit plus bête que méchant ou pas. Dalglish a poussé la stupidité jusqu’à demander à la fédé ce qu’on pouvait dire ou pas sur un terrain.

A Chelsea, on a eu le bon goût d’interdire le t-shirt de soutien à John Terry inculpé pour les mêmes faits. Terry est un coutumier du dérapage verbal non contrôlé. Mais Terry, c’est aussi un coéquipier exemplaire et aimé de tous ses coéquipiers… quelle que soit leur origine. Mais là aussi la com’ du coach André Villas-Boas pose question :

1. Dans son soutien indéfectible à Terry : « Même s’il est déclaré coupable, je le soutiendrai ». En août, il avait demandé à ses joueurs d’être exemplaires sur et en dehors des terrains….

2. Dans ses analyses d’après match. A Tottenham : « C’était un honneur et un privilège d’assister à ce match de Chelsea ». Mouais, y a mieux pour faire croire que tout va bien.

Trois jours plus tard, on a enfin l’impression que l’apprenti mage parle vrai : « C’est fini pour le titre ». En ce Boxing Day, le jeunot est groggy comme un vieux boxeur qui court le cacheton avant l’appel de l’âge et notre réflexion sur les méthodes des coaches reprend de plus belle le soir.

Sur une télé britannique, on voit une rétrospective de la saison 1995-1996. Celle où notre bon Philippe Albert et ses potes de Newcastle ont failli être champions. Failli seulement, car le concurrent était Manchester United. Avec un Ferguson plus diable que jamais. Il bat Newcastle à distance. Via le poste, via l’écran. Il met la pression sur les arbitres, les Magpies et leurs adversaires. Kevin Keegan le prophète en perd son sens de la foi. Il devient fou et craque. Toujours devant le poste. Interview d’après défaite, gros casque sur les oreilles qui lui donne la candeur d’un Mickey trahi par oncle Donald. Le doigt pointé vers la caméra il lance : « Dites à Ferguson que ses méthodes sont lamentables ». Il enchaîne les larmes au bord des yeux : « Qu’il sache que nous allons encore plus donner pour gagner ». C’est Ferguson qui a déjà gagné… Chaque joueur de Newcastle va terminer la saison avec un joueur d’United sur le dos. Toute l’Angleterre adore Keegan et déteste Ferguson mais Sir Alex a tout gagné.

La force d’un coach c’est de ne pas laisser l’âme de son vestiaire en sortir et aller titiller celle des concurrents quand il le faut. On règle les comptes en interne. Personne ne doit savoir. Ou alors le plus tard possible. Roy Keane (qui d’autre) vient de s’attaquer à son ancien mentor. Celui qui l’a toujours protégé, même quand il annonçait qu’il allait casser la jambe d’un adversaire et le faisait. Même quand il agressait Carlos Queiroz alors adjoint de Sir Alex. Mais nuance. Keane : « Il m’a toujours défendu jusqu’à mes 34 ans. Après, j’étais trop vieux donc… ». Les coaches sont tous des prêcheurs dont les paroles n’ont qu’un but, mener dans un paradis appelé Victoire.

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