À L’OLYMPIA

Dans cette série consacrée au premier terrain de nos internationaux, pleins feux sur Nicolas Lombaerts, formé à quelques centaines de mètres de la maison familiale, à l’ombre de l’Olympiastadion.

C’est il y a 25 ans exactement, lorsque le Jan Breydel s’appelait encore l’Olympiastadion, que Nicolas Lombaerts, alors âgé de six ans, a suivi ses premiers entraînements à l’école de football du Club Bruges. Là, le gamin était quasiment dans son jardin. La maison familiale, qui hébergeait aussi ses soeurs Daphné et Anne-Sophie, était située à proximité, sur la chaussée de Gistel. A 5 minutes à pied.

En 2000, lorsque Nicolas jouait déjà en Scolaires, la famille Lombaerts déménagea vers l’avenue des Arbustes, à 300 mètres à peine de l’aire de jeu réservée à la jeune classe du Club.  » C’était facile « , explique Vincent Provoost, qui a joué avec Lombaerts depuis les Préminimes.  » Nicolas venait à vélo, je m’en souviens très bien.  »

GARDIEN

Le choix en faveur du Club Bruges coulait de source pour Nicolas. Son père Jean-Luc, avocat au barreau de Bruges, était d’ailleurs supporter des BlauwenZwart. Son grand-père maternel, Robert Mortier, était un ami d’Antoine Vanhove, l’administrateur délégué du Club qui, à l’époque, était quasiment dirigé par un seul homme.

Son parrain, Raoul Lombaerts, était aussi un amateur de football.  » Mais il supportait le Cercle. En tant que secrétaire de la localité de Sint-Andries (NDLR : et de Bruges après la fusion des communes en 1971), il a reçu deux abonnements : un pour le Cercle et un pour le Club. Mais il se rendait rarement au stade.

Sur les conseils de son médecin : s’énerver lors d’un match, c’est mauvais pour le coeur… Je pense qu’il n’a jamais vu un match de son petit-fils, mais il a joué avec lui dans le jardin, pendant des heures : le mercredi après-midi, le week-end, pendant les vacances scolaires…  »

Un endroit idyllique : Nicolas-le-gardien, et son grand-père qui essayait d’envoyer le ballon dans le but avec un pointu. Mais le petit Nicolas ne prendra jamais place entre les perches, en compétition.

Il était plutôt attaquant. Le poste que tous les enfants affectionnent. Et Nicolas était efficace dans ce rôle : il lui est arrivé d’inscrire dix buts au cours d’un même match. Il existe toujours des images vidéo du premier match officiel de Nicolas : contre le Cercle, sur un petit terrain de Sijsele, à la périphérie de Bruges, où les VertetNoir trouvaient parfois refuge.

A ses côtés, on distingue Georges Decrop, l’entraîneur des Diablotins. Jean-Luc :  » Un type extraordinaire. Il était à peine plus grand que ses petits footballeurs  » (il rit).

Une photo touchante, au début des années 90 : tout en haut de la tribune du stade, Nicolas Lombaerts, dans les bras de son papa, s’endort en regardant Dany Verlinden, Pascal Plovie, Alex Querter, Vital Borkelmans, Franky Van der Elst, Lorenzo Staelens et Jan Ceulemans. Jean-Luc :  » A ma connaissance, Nicolas n’a jamais eu de poster dans sa chambre, et n’a jamais idolâtré certains joueurs.  »

PLAISANTERIES

Toute la famille se retrouvait au Club Bruges : Nicolas sur le terrain, ses parents et ses deux soeurs le long de la ligne. Il a traversé toute la Belgique, et les anecdotes foisonnent. Comme à Beveren, lorsque sa soeur cadette Anne-Sophie s’est retrouvée avec une citrouille géante, aux côtés de papa et maman.  » Elle l’avait trouvée dans un champ et l’avait déterrée. Nicolas ne se serait jamais permis cela.  »

Il ne manquait pourtant pas d’énergie. Après le match, lorsque tous les parents se retrouvaient à la cantine, il n’avait qu’une envie : continuer à jouer au football. Il demandait :  » Papa, bois encore un verre, comme cela je peux rester un peu plus longtemps « .

La classe de1984-1985, était exceptionnelle. La plupart des jeunes de cette génération ont atteint la D1 : Provoost (Courtrai, Roulers), Van Tornhout (Club Bruges, Roda JC), Glenn Verbauwhede (Club, Courtrai, Westerlo), Bram De Ly (Courtrai), Wouter Vandendriessche (qui a gagné la Coupe de Belgique avec Zulte Waregem en 2006), Thomas Matton (Zulte Waregem, Courtrai, Gand), Bart Vlaeminck (Club, Roulers), Günther Vanaudenaerde (Club, NEC Nimègue, Westerlo)…

Beaucoup de titres, des sélections nationales, et surtout… beaucoup de plaisir.  » C’était une joyeuse bande, et cela se voyait dans les tournois de jeunes, lorsque tout le monde dormait dans la même chambre. On s’amusait beaucoup et on déconnait aussi « , se souvient Provoost.

Comme lorsque quelques joueurs collèrent leur arrière-train dénudé sur les vitres du bus. Hilarant ! Jusqu’au moment où une voiture a dépassé le bus avec, à son bord, un dirigeant du Club. Les petits garnements ont été sévèrement rappelés à l’ordre. Provoost :  » Glenn était pour ainsi dire le meneur. Lorsqu’il s’agissait de déconner, il n’était jamais bien loin. Nicolas était plus calme, il se contentait la plupart du temps de regarder les autres.  »

RESPECTUEUX

 » Il était dix fois plus sérieux que son père « , fait remarquer Jean-Luc qui a joué 12 ans au KFC Moerkerke, entrecoupés de brefs passages au KSV Jabbeke et au SC Beernem : des petits clubs de Provinciale de la région de Bruges.  » Je n’avais pas ma langue en poche, et j’écopais régulièrement d’une carte jaune ou rouge. A ce niveau-là, Nicolas ne me ressemble pas du tout. Il n’a encore jamais reçu une carte jaune pour rouspétance.  »

Jean-Luc résume les jeunes années de son fils :  » Elles sont passées sans qu’on s’en rende compte. Il ne s’est jamais rebellé, n’a jamais dépassé les bornes.  » Il s’est aussi montré très obéissant envers ses entraîneurs. Qu’ils l’alignent sur le flanc gauche, en soutien d’attaque, à l’arrière gauche, en défense centrale, peu lui importait : il se pliait aux directives sans broncher.

Provoost :  » Lorsque l’un de nos défenseurs centraux s’est blessé, Nicolas a quitté son poste d’arrière gauche pour jouer en défense centrale. Cela ne l’a pas perturbé le moins du monde : il est grand, intelligent, a un bon jeu de tête.  »

Et, ajoute Dries Slootmans : il a de la personnalité. C’était déjà le cas à l’époque.  » Il a gardé ses amis d’enfance, même s’il vit aujourd’hui dans un autre monde à Saint-Pétersbourg.  » Slootmans, qui est aujourd’hui Marketing Coordinator & Sales à Gand, a joué au Cercle et – une année – au Club lorsqu’il était jeune.

 » J’ai un an et demi de plus que Nicolas, mais je n’ai jamais joué dans la même équipe que lui. Il nous arrivait cependant de jouer un petit match dans le jardin.  »

Après l’école secondaire, au collège Saint-Léo de Bruges, ils ont étudié ensemble à Gand. Ils sont restés amis pour la vie, furent témoins de leur mariage respectif, et entretiennent toujours des contacts hebdomadaires.

Bart Devinck, qui a joué au Club de 1996 à 2005, est resté, lui aussi, l’un des meilleurs amis de Lombaerts.  » On reste en contact via WhatsApp au moins tous les deux jours.  » Lui non plus n’a jamais joué dans la même équipe que Nicolas, mais ils se sont découvert des atomes crochus.

 » Le vendredi soir, après les cours, on se donnait souvent rendez-vous dans l’un des cafés fréquentés par les jeunes, sur le Zand, à Bruges. Mais on restait sobres : on y passait une heure et demie, de 16 h 30 à 18 heures, et on ne buvait jamais d’alcool.  »

SPORT ET ÉTUDES

Lombaerts a choisi la section Latin-Math, alors que la plupart de ses compagnons ont opté pour la facilité : l’école de sport-élite ou l’Institut Libre de Commerce et des Sports à Sint-Michiels. Pourtant : il n’était pas un fana du blocus. Huit heures sur le banc de l’école, vite-vite à l’entraînement, et réviser un peu le soir. Ou pas.

Comme il l’a admis lui-même :  » Je n’ai jamais rien étudié à l’avance. En période d’examens, je révisais rapidement deux matières l’après-midi, et j’allais parfois me coucher un peu plus tard, mais je n’ai jamais été recalé.  »

Il a joué régulièrement avec l’équipe de son école, même si au Club, on n’appréciait pas trop les activités scolaires du mercredi après-midi. Lombaerts évite toutefois de jouer dans la cour de récréation, comme il le faisait à l’école primaire.  » Pendant la puberté, cela fait un peu enfantin.  »

Juin 2003 : le diplôme d’humanités est en poche, l’université attend. Il choisit le droit. Comme son père et son grand-père, mais c’est aussi un choix pragmatique : il n’est pas obligé d’aller trop souvent aux cours, il a peu d’exercices pratiques et c’est un domaine qui l’intéresse. Son choix n’étonne personne, et surtout pas son père.

 » Le soir, à la télévision, on regardait plus souvent des émissions consacrées aux affaires judiciaires plutôt que des programmes familiaux  » (il rit).

Au Club Bruges, Nicolas éprouve quelques difficultés chez les Espoirs, entraînés par le très exigeant Cedomir Janevski, l’actuel coach de Mouscron. Il ne laisse rien passer, car il est le dernier maillon d’une chaîne qui doit conduire les jeunes footballeurs en équipe Première. Nicolas doit souvent prendre place sur le banc, lorsque des joueurs convalescents du noyau A descendent en Espoirs pour retrouver le rythme.

Il retourne temporairement chez les U19 de Frank Decraemer, l’entraîneur qui lui a le plus appris. Il reprend confiance, et atteint rapidement le niveau requis pour jouer en Espoirs.

Mais l’entraîneur de l’équipe Première, Trond Sollied, n’a pas pour habitude d’aligner des jeunes talents. Une seule fois, lors d’un match de championnat contre Beveren, le Norvégien acceptera de placer quelques Espoirs sur le banc, mais se ravise en dernière minute. La raison ? Il n’y a pas de maillots à leur nom !

CONTRE-PROPOSITION

Au printemps 2004, Van Tornhout, Verbauwhede, Provoost et Vlaeminck sont appelés dans le bureau de Vanhove et du directeur sportif Marc Degryse : la saison suivante, ils pourront s’entraîner avec le noyau A. Jean-Luc et l’agent de joueurs Willy Hox sont également convoqués. Vanhove leur parle de ses… pigeons.

Degryse est assis dans un coin et écoute, avant d’informer les deux hommes que Nicolas, international chez les U19, devra encore patienter une saison chez les Espoirs.  » Lorsque je suis rentré de l’entraînement, je savais directement ce qu’il était advenu. J’ai rigolé et j’ai dit :  » Viens, on s’en va.  »

Nicolas n’a que l’embarras du choix : le Germinal Beerschot, avec la possibilité de rejoindre l’Ajax plus tard, Roda JC, le FC Twente, Brescia et Anderlecht, mais seule Gantoise l’autorise à combiner le football avec ses études de droit. Maman Lombaerts aurait préféré que son fils reste à Bruges, mais le projet sportif qui lui est proposé à Gand est séduisant.

Le Club fait une contre-proposition – il propose malgré tout une place dans le noyau A et promet un contrat financièrement plus intéressant qu’à Gand – mais le jeune défenseur central de 19 ans a fait son choix : ce seront les Buffalos. Provoost :  » Nicolas n’a jamais traité les dirigeants brugeois de malhonnêtes et nous a souhaités de devenir professionnels. ‘Vous le méritez.’ Cela en dit long sur ses qualités humaines.  »

PAR CHRIS TETAERT – PHOTOS KOEN BAUTERS

 » Il venait à l’entraînement à vélo, je m’en souviens très bien.  » – VINCENT PROVOOST, EX-COÉQUIPIER

 » Nicolas n’a jamais reçu une carte jaune pour rouspétance.  » – JEAN-LUC LOMBAERTS, SON PÈRE

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire