5 QUESTIONS QU’ON N’OSAIT PAS POSER À DIDIER FRENAY

Nos clubs ont acquis près de 40 joueurs entre fin juillet et fin août. Une nouvelle preuve de mauvaise gestion et le signe qu’on continue à agir dans l’urgence ?

Ce n’est pas un problème belge. Même Arsenal et Manchester United ont fait des transactions dans les derniers jours. Les explications sont multiples. Il y a les verdicts européens (qualification ou pas) qui déclenchent un effet dominos. Et les réactions de panique sont une autre raison. C’est frappant en Belgique. Un club qui a raté son début de championnat réagit subitement de façon émotionnelle, tient compte de la pression des médias et du public, et fait venir plusieurs joueurs à la fin du mois d’août. C’est ce qu’on voit par exemple à Mons. Les footballeurs sont des enfants gâtés, il suffit parfois qu’ils disent que ça ne va pas, et alors on transfère. Je passe 80 % de mon temps sur le marché allemand. Là-bas, tout est parfaitement structuré, on sait où on va, on raisonne à moyen et long terme. Ici, c’est beaucoup de court terme. Des clubs envoient des scouts un peu partout pendant plusieurs mois puis ne tiennent pas compte de leurs avis. Au bout du compte, ce ne sont pas nécessairement des gens du foot qui prennent les décisions de recrutement. Je discute rarement avec des gens compétents sur le marché belge.

Quand un confrère place Marouane Fellaini à Manchester United, tu ne te dis pas :  » Quel chançard celui-là  » ?

Dans ce métier, si on se préoccupe des autres, on n’en sort plus. Je vois surtout qu’un transfert pareil est une bonne chose pour moi parce qu’il augmente encore la valeur des joueurs belges et me donne des arguments supplémentaires. Par rapport à nous, les Pays-Bas ont longtemps été une référence pour les dirigeants des grands championnats. C’est fini, la Belgique est passée devant. Quand je vais au Bayern ou dans d’autres grands clubs allemands, on me dit qu’on s’intéresse maintenant plus au marché belge qu’aux championnats des Pays-Bas ou de France.

Gareth Bale au Real Madrid pour 100 millions et l’UEFA qui continue à parler de fair-play financier : on joue dans quelle pièce ?

S’il y avait un système performant de licences dans tous les pays, on ne devrait même pas envisager le fair-play financier. Je ne suis pas sûr qu’il soit applicable parce que les clubs réfléchissent depuis longtemps à des astuces pour le contourner dès qu’il sera imposé.

Depuis 2011, les commissions versées aux agents en Europe ont augmenté de 80 %. Il n’y a pas un souci quand des agents gagnent mieux leur vie que la moyenne des joueurs ?

C’est trompeur. Entre 5 et 10 % des agents se partagent 90 % du gâteau, les autres se battent pour la petite part restante, je ne sais pas comment ils font pour survivre. Parmi eux, il y a tous ceux qui travaillent sans être reconnus et ceux qui ont passé leur licence entre deux autres activités et pensent qu’envoyer un fax de temps en temps suffit pour gagner sa vie. Si on éliminait 80 % des agents, on supprimerait 80 % des problèmes. C’est clair que nous avons un problème d’image, on nous colle une étiquette de millionnaires. Je prends un exemple : Michel Louwagie dit que les managers sont des voleurs, mais quand il veut se débarrasser d’un joueur, il en appelle une dizaine.

Tu investis à Roulers, John Bico fait le noyau du White Star, d’autres agents dictent la politique sportive dans d’autres clubs : le mélange des genres est malsain, non ?

J’ai lu beaucoup de choses fausses sur mon implication à Roulers. Et pourquoi parle-t-on autant de deux petits clubs de D2, et pas de Charleroi où on connaît le rôle joué par Mogi Bayat ? Pour moi, il n’y a rien de mal là-dedans. C’est une bonne chose quand un agent valable, avec son expertise, participe aux décisions d’un club. Préfère-t-on un Van Noppen qui reprend le Beerschot, annonce des grandes ambitions, se promène à Anvers déguisé en ours puis coule son club ? Je n’investis pas à Roulers. J’ai seulement amené un sponsoring qui a permis d’engager un joueur extra-communautaire, j’essaie aussi de convaincre un investisseur étranger qu’il peut faire une bonne affaire s’il met de l’argent là-bas. C’est tout.

PAR PIERRE DANVOYE

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