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Risky business

Gand a sorti Jean-Luc Dompé de son chapeau. Un investissement risqué, un pari ou un joueur qui apporte un plus immédiat ? Pas simple car beaucoup d’entraîneurs se sont déjà cassé les dents sur le Français.

Il était debout le long de la touche, un peu mal à l’aise, sur le terrain de Drongen, à côté d’un ami. À l’issue de la première mi-temps de ce match de préparation, Yves Vanderhaeghe a ménagé Jean-Luc Dompé (22 ans), coiffé d’une casquette marquée du mot  » icône « . Il venait de signer un contrat de deux ans et il cherchait manifestement ses marques dans son nouvel environnement car ce footballeur de classe connaît déjà le revers de la médaille.

Philippe Bormans, alors manager général de Saint-Trond, avait transféré l’ailier droit de Valenciennes durant l’été 2015 pour une indemnité de seulement 180 000 euros. C’était bien vu, car le rapide Français s’était ensuite distingué au prestigieux tournoi international de Toulon, avec les U20. Marseille le convoitait mais était arrivé trop tard pour le footballeur, qui avait disputé 17 matches et se trouvait en fin de contrat.

Les Canaris lui offraient un bail de trois ans. Le joueur, lui, pensait rejoindre le Standard et avait diffusé la nouvelle sur les réseaux sociaux. L’entraîneur d’alors, David Le Frapper, qui le coachait aussi en U19 avait confirmé le problème.  » Le disque dur de son cerveau a une capacité très restreinte quand il s’agit d’écouter et de comprendre. C’est terminé, malgré tous nos conseils. Il n’y a plus de place pour lui dans notre projet.  »

Sous la direction de Yannick Ferrera, Dompé, associé à Edmilson Jr., éclate comme une comète. Ses débuts sont formidables.  » Une classe à part « , juge le Bruxellois, qui accorde beaucoup de liberté à ses ailiers et leur demande d’user de leur vitesse et de leur mobilité pour réaliser des actions. Dompé et Edmilson désarçonnent de la sorte les blocs défensifs.

 » Jean-Luc est un brillant footballeur. Il est bien vu par le groupe, communique parfaitement et peut devenir un leader.  » Après le départ de Ferrera pour le Standard en septembre 2015, Dompé accumule les légères blessures. Il fait aussi la une quand il expédie sa Mini Cooper contre un arbre.

Manque de professionnalisme…

En janvier 2016, Daniel Van Buyten attire Dompé à Sclessin via le manager Roger Henrotay, pour quelque deux millions plus un pourcentage en cas de revente. Le jeune médian défensif Alexis de Sart et l’extérieur droit Damien Dussaut opèrent le mouvement inverse. L’ancien Diable Rouge, engagé comme conseiller du président Bruno Venanzi, présente à Dompé un contrat valable jusqu’en 2019. Ferrera place la direction sous pression pour obtenir son poulain, Edmilson. C’est un coup double, pour remplacer Anthony Knockaert. Le Standard compte sur leur complémentarité et le spectacle qu’ils peuvent offrir.

 » Je ne peux m’épanouir que quand je suis libre. Je m’inspire de Cristiano Ronaldo. Il m’est plus facile de réaliser un ciseau qu’un simple tir « , explique l’extérieur, qui a grandi dans la région parisienne et a été lancé en division deux française par l’ancien international Bernard Casoni.

 » Jean-Luc est capable de mettre le feu au stade.  » Il n’y parvient qu’une seule fois, en mars 2016, en finale de la coupe, au stade Roi Baudouin. Dompé, dossard numéro dix, ponctue un une-deux avec Ivan Santini d’un but du droit. Le Standard remporte le trophée.

Las, en bord de Meuse, ce n’est plus le grand amour entre Ferrera, engagé par le directeur technique Olivier Renard, et Dompé. L’entraîneur se lasse de ses caprices. En août 2016, il est renvoyé dans le noyau B en compagnie de Mohamed Yattara et Renaud Emond pour manque de professionnalisme et d’engagement à l’entraînement.

L’intéressé ne réalise pas que son comportement pose problème. Il se moque du staff et va raconter partout qu’il est le protégé de Big Dan.

…et de maturité

Peu après, il se heurte à l’approche directe de l’entraîneur serbe Aleksandar Jankovic. Il arrive en retard à l’entraînement, ne fait preuve d’aucune discipline et affiche sa nonchalance. Dompé s’enfonce.

Il a grandi dans un quartier chaud du 91. La plupart de ses amis d’enfance sont en prison et lui-même a quitté le foyer parental à treize ans pour rejoindre le centre de formation de Sochaux, à 450 kilomètres de Paris.

 » J’ai eu la chance de pouvoir compter sur mes frères aînés pour m’indiquer la bonne voie. Ils me laissaient libre mais je devais dire où j’allais et quand je rentrerais. Je leur dois beaucoup, même si je ne crois pas que j’aurais fait des bêtises.  »

Sa mauvaise réputation se confirme toutefois lors de sa location ratée à Eupen, de janvier à juin 2017, puis à Amiens la saison passée. Jordi Condom ne tarde pas à fustiger sa mentalité et le renvoie en tribune après trois matches.

Ça ne va pas mieux à Amiens, en Ligue 2 : en octobre, Christophe Pélissier l’écarte définitivement, comme quatre autres joueurs. Les mêmes reproches reviennent systématiquement : Dompé n’a pas de maturité, il n’organise pas bien sa vie privée et manque de professionnalisme. Il est donc temps pour le joueur de se défaire définitivement de son étiquette d’enfant terrible…

 » Il est minuit une  »

 » Jean-LucDompé ne sait que trop bien ce qui l’attend « , insiste le manager général Michel Louwagie. Le dossier était sensible mais il a pu conclure le transfert grâce à  » ses bons rapports  » avec Roger Henrotay, le manager.  » Dompé est un cas. Il possède beaucoup de qualités : il est très rapide, surtout sur les premiers mètres, très vif et il a une bonne technique. Cette explosivité peut faire la différence.

D’autre part, il est difficile. Il doit se discipliner. C’est un défi. La balle est dans son camp car c’est presque sa dernière chance. Il n’est pas minuit moins cinq mais minuit une. Dompé va devoir faire preuve de professionnalisme et d’éthique. Il s’est retrouvé dans une impasse et c’est maintenant ou jamais. « 

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