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Kljestan : « La MLS progresse d’année en année »

Après trois années réussies aux New York Red Bulls, Sacha Kljestan vient de déménager à Orlando City où il va devoir prendre la relève d’un certain Kaká. L’Américain évoque son actu foot, Anderlecht et bien entendu Donald Trump.

Sacha Kljestan a quitté le Sporting d’Anderlecht un jour de janvier 2015. Devenu réserviste plus souvent qu’à son tour, il avait préféré retourner aux États-Unis, aux New York Red Bulls, pour y étaler toute l’expérience acquise en Europe. Avec réussite, puisque l’international américain est devenu une des stars de la MLS, au point de disputer toute la saison 2017 avec le brassard de capitaine au bras.

Il y a quelques semaines, c’est donc à la surprise générale que son transfert à Orlando City a été officialisé. À 32 ans, il se retrouve donc devant le dernier challenge de sa carrière. Et il le sait. Entre deux séances d’entraînement et après s’être assuré que ses enfants étaient bien au lit, Kljestan s’est posé devant son ordinateur pour donner de ses nouvelles à 7.300 kilomètres de chez nous.

Depuis votre retour en MLS, vous avez distribué plus de 50 passes décisives en évoluant très haut sur l’échiquier. Qu’est-ce qui explique cette métamorphose en joueur offensif efficace ?

Sacha Kljestan : J’ai toujours été le même joueur, je n’ai pas changé. La seule différence, c’est qu’avec New York, je jouais en 10 alors qu’à Anderlecht, on me demandait d’être beaucoup plus défensif parce qu’il y avait déjà les joueurs pour faire la différence devant avec Dennis Praet, Matias Suarez ou Milan Jovanovic.

Vous n’avez joué que six matches avec les USA depuis 2015 alors que vous étiez un des meilleurs joueurs de la MLS. Avez-vous eu des explications des sélectionneurs Jürgen Klinsmann et Bruce Arena ?

Kljestan : Non, je ne sais pas pourquoi.

 » J’ai quitté New York avec un goût amer  »

Comment expliquez-vous cette terrible désillusion des États-Unis, absents de la Coupe du monde pour la première fois depuis 1986 ?

Kljestan : Je ne suis pas sûr que ce soit un manque de qualité qui ait provoqué l’élimination. Je pense que les joueurs appropriés n’ont pas toujours été sélectionnés quand il le fallait. Le team-spirit qui avait rendu les USA si forts auparavant n’était plus le même qu’il y a quelques années.

Saviez-vous que votre popularité était telle que votre maillot était le 20e le plus vendu aux États-Unis en 2015 ?

Kljestan : Ma popularité a augmenté principalement parce que j’évoluais à New York et que le football est de plus en plus important dans cette ville. Et puis, évidemment, ma moustache est toujours aussi célèbre !

Avec New York, vous avez remporté le MLS Supporters’ Shield en 2015 (titre officieux décerné à l’équipe qui a obtenu le plus de points sur l’ensemble de l’année civile). Mais ce trophée signifie-t-il vraiment quelque chose, vu qu’à côté de ça le club n’a pas remporté la MLS Cup ?

Kljestan : Le MLS Supporters’ Shield a beaucoup d’importance pour le club et pour moi parce qu’il couronne le vrai champion sur la saison entière. Maintenant, c’est sûr que la MLS Cup est le trophée le plus prestigieux, je repars donc de New York avec un goût amer : celui de ne pas avoir pu soulever cette coupe devant les supporters. On a souvent été proche de l’empocher mais on a, à chaque fois, manqué de qualité, je pense.

 » Je pouvais signer où je voulais  »

Votre transfert vers Orlando City a été officialisé en janvier. Depuis quand saviez-vous que vous alliez quitter New York ?

Kljestan : Depuis décembre. Dès qu’on m’a annoncé la nouvelle, je me suis mis à la recherche d’un nouveau challenge. J’ai très sérieusement envisagé de revenir en Europe et j’ai eu plusieurs discussions avec des clubs du Vieux Continent. Mais finalement, l’intérêt et l’offre très concrets d’Orlando City, qui me voulait depuis longtemps, m’ont convaincu.

Avez-vous accepté facilement la décision de New York de se séparer de son capitaine ?

Kljestan : Les New York Red Bulls ont leur conception du football et veulent uniquement évoluer avec des jeunes joueurs. Je comprends qu’ils veuillent développer leur style et qu’il était temps pour moi de m’en aller, il n’y a pas de problème là-dessus. J’ai toujours tout donné pour le club et ça m’a réussi.

Sur les réseaux sociaux, vous n’avez pas hésité à interpeller la MLS sur le fait d’autoriser les échanges de joueurs sans leur consentement… En avez-vous parlé avec Laurent Ciman, qui a aussi été échangé cet hiver ?

Kljestan : Oui, on en a discuté à Los Angeles en janvier dernier. La différence, c’est qu’il a été vendu au Los Angeles FC sans son accord. C’est assez bizarre mais c’est le fonctionnement injuste de la MLS. Laurent était mécontent de quitter Montréal mais en fin de compte, il rejoint une magnifique ville, un club passionnant qui évolue dans un nouveau stade et avec un très bon coach (Bob Bradley, ndlr). Pour ma part, mes états de service et la bonne relation que j’entretiens avec New York m’ont permis de signer où je voulais. J’ai eu le choix, pas Laurent.

 » On m’apprécie car je suis un winner  »

À votre époque new-yorkaise, vous avez avoué adorer jouer à Orlando parce que vous saviez à chaque fois que ce serait difficile, que l’ambiance serait hostile et que les supporters n’hésiteraient pas à vous pourrir après sur Twitter. Est-ce facile de rejoindre un club dont les fans vous détestaient il y a encore quelques semaines ?

Kljestan : Les fans ne m’aimaient peut-être pas mais je pense qu’ils avaient du respect pour moi. Parce que j’ai marqué pas mal de beaux buts contre Orlando, délivré plein d’assists et parce que j’étais un winner. Je suis excité de leur montrer à quel point je me donne à fond chaque semaine. Et la dernière fois que j’ai porté du mauve, j’ai beaucoup gagné.

À 32 ans, quelles sont vos ambitions ? Pensez-vous encore à l’équipe nationale ?

Kljestan : Je rêve toujours du Team US. Mais au fond de moi, je sais que ce n’est plus un objectif très réaliste, surtout que le prochain match à enjeu sera disputé à l’été 2019 en Gold Cup. Pourtant, je joue encore à un haut niveau et je sais que je peux aider l’équipe nationale. Tout dépendra du nouveau sélectionneur (qui n’est pas encore désigné, ndlr).

Il y a quelques semaines, en demi-finale de la Conférence Est face à Toronto, une altercation avec Jozy Altidore sur le terrain puis dans les couloirs vous a mené à une suspension de deux matches. Un problème de relation entre vous deux ?

Kljestan : Jozy et moi étions amis depuis l’équipe nationale et je le considère toujours comme tel. Parfois, ce genre de débordement arrive en football, spécialement quand l’envie de gagner te dépasse. C’est ce qui est arrivé ce jour-là, d’où l’explosion de nos émotions.

 » Je prône l’égalité pour tous  »

Comment évolue la MLS ? En Europe, elle traîne encore sa réputation de maison de repos pour anciennes stars…

Kljestan : La popularité du football ne cesse d’augmenter aux États-Unis. Certains fans deviennent vraiment terribles, il suffit de regarder Orlando City et le  » Mur  » que les supporters ont créé derrière le but du nouveau stade. Récemment, Atlanta United a dépensé $18 millions (14,5 millions d’euros, ndlr) pour transférer le jeune Ezequiel Barco, en provenance d’Argentine. Je suis sûr que beaucoup de clubs européens ont voulu l’acheter mais il a choisi l’Amérique. C’est un signe. La MLS évolue d’année en année.

Anti-armes, anti-Trump… Vous êtes politiquement actif sur les réseaux sociaux. Quelles sont vos valeurs et motivations politiques ? Avez-vous un rôle social à jouer en tant que footballeur ?

Kljestan : Mes valeurs sont simples : toute personne doit être traitée de manière égale à une autre. Pas de racisme, pas de sexisme, égalité pour tous. Nous avons un gros problème avec les armes dans notre pays et il faudrait changer les lois. D’où la pression à mettre sur les politiciens Old School si nous voulons vraiment que ça bouge. Avec ma femme, nous nous impliquons de plus en plus en politique ces derniers temps et j’essaie d’utiliser ma voix et mes opinions pour aider à faire avancer les choses. Nous sommes arrivés à un point où il est nécessaire d’impliquer la jeune génération et la pousser à voter lors de chaque élection. Beaucoup trop d’Américains ne profitent pas de leur droit de vote.

En passant à Orlando City, Sacha Kljestan est resté fidèle au mauve.
En passant à Orlando City, Sacha Kljestan est resté fidèle au mauve.© REUTERS

 » Anderlecht restera toujours ma famille  »

En 2014-2015, vous n’avez pas joué beaucoup avec Anderlecht, vu la présence de Steven Defour et l’émergence de Youri Tielemans et de Leander Dendoncker. Comment avez-vous vécu cette période ?

Sacha Kljestan : Ma confiance en moi n’a jamais changé. Je n’ai pas douté de mes qualités et je suis resté un leader positif et un vrai coéquipier. Mais quand tu es un étranger et qu’il y a trois bons joueurs originaires du pays dans lequel tu évolues, c’est évidemment plus compliqué de se retrouver sur le terrain.

Vous n’étiez pas un grand fan des entraînements d’Ariël Jacobs…

Kljestan : Ce n’est pas que je ne les aimais pas, c’est que parfois, je les trouvais ennuyeux parce qu’on faisait toujours la même chose. Mais j’ai aimé jouer sous Jacobs parce qu’il choisissait toujours un onze de base adéquat. Il avait l’oeil pour placer la meilleure équipe sur le terrain.

L’Anderlecht actuel ne doit pas vous faire rêver…

Kljestan : C’est difficile pour moi de suivre les matches en direct mais j’ai pu voir des rencontres de Champions League. La raison des difficultés actuelles est simple : la qualité de l’équipe n’est plus la même qu’à l’époque des Biglia, Boussoufa, Suarez, Mbokani, Jovanovic, Kouyaté… et Kljestan ! J’ai vu que M. Vanden Stock avait quitté la présidence, je me souviens de lui comme d’une personne très humaine. J’ai appris à être un véritable champion à Anderlecht. Cela restera toujours ma famille. Peut-être que je finirai par y devenir entraîneur…

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