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 » Au début, tout le monde n’adhérait pas aux idées de Leko « 

Avant le clasico, Ruud Vormer nous parle de la santé retrouvée du Club Bruges après un départ hésitant en championnat et une élimination sans gloire sur la scène européenne.

Nous sommes au lendemain du déplacement à Genk, où Bruges a subi sa deuxième défaite de la saison. Le Club a beau compter une marge d’avance confortable au classement, ce n’est jamais agréable. Pour se changer les idées, Ruud Vormer et Hans Vanaken jouent au billard.  » Notre première mi-temps n’a pas été bonne, la deuxième fut meilleure « , dit Vormer.  » Ce sont des choses qui arrivent, non ?  »

Après le match, quelqu’un a voulu faire le parallèle avec la saison dernière et votre mauvaise série en déplacement.

RUUD VORMER : Ça n’a rien à voir. Les autres matches en déplacement ont été bons. Y compris à Mouscron, même si nous n’avons pas été très créatifs. Mais ce sont des choses qui arrivent sans qu’on sache toujours trop bien pourquoi. Ce qui est sûr, c’est que nous avons besoin de tout le monde. José Izquierdo n’étant plus là, nous devons être plus collectifs.

L’entraîneur s’est demandé si on ne vous avait pas un peu trop encensé ces dernières semaines.

VORMER : À Genk, tout le monde est motivé, non ? Mais il a peut-être raison et perdre une fois ne fait pas de tort. Mentalement, l’équipe est plus forte qu’avant mais il faut que chacun adhère aux idées. Si certains ne sont pas présents, cela se ressent tout de suite. Nous devons peut-être définir plus clairement à quel moment nous mettons la pression afin que tout le monde suive car si un gars ne fait pas son boulot, les autres trinquent.

Et qui doit déterminer cela ?

VORMER : Les joueurs les plus expérimentés : Hans et moi.

Et pourquoi ne l’avez-vous pas fait ?

VORMER : Parfois, ça ne marche tout simplement pas. On veut le faire mais on a toujours un temps de retard.

 » En début de saison, je me cachais  »

Bruges a-t-il un problème de gardien ?

VORMER : Question difficile. Je pense qu’Ethan nous a parfois sauvés mais sur certains ballons, il a foiré. Et une erreur du gardien se remarque toujours plus qu’un mauvais placement ou une mauvaise passe. Ce n’est pas à moi de juger. Qu’en pensez-vous ?

Qu’il fait des arrêts mais aussi des erreurs à chaque match.

VORMER : Oui, je sais. Je pense qu’on lui fait confiance mais c’est difficile. Une erreur d’un gardien, tout le monde la voit.

Comment réagit-il à tout cela ?

VORMER : Normalement. Bien. Il est moins insensible qu’il n’en a l’air. À sa place, je ferais pareil. Mon début de saison n’a d’ailleurs pas été bon non plus, même si je pense que c’était dû au système. Car en football, ça se passe dans la tête et beaucoup de choses dépendent du système.

Qu’est-ce qui n’allait pas ?

VORMER : Beaucoup de choses avaient changé, Hans n’était pas là, je jouais à côté de Nakamba et il n’y avait pas d’attaquant. Que devais-je faire du ballon ? Ce n’était pas moi qui allais dribbler alors je me posais des questions.

Au point de ne plus demander le ballon.

VORMER : Je me cachais, comme tous ceux qui ne se sentaient pas bien. Un gardien ne peut pas faire ça.

Un capitaine qui se cache ?

VORMER : Oui, enfin, se cacher, c’est un bien grand mot.

Jouer la sécurité, quoi.

VORMER : Oui, c’était ça ! Je ne donnais que des ballons faciles, je jouais sur mon expérience. Van Gaaldisait : Essaye déjà de donner le ballon à un équipier, ce n’est pas si facile. Je ne l’ai pas oublié.

 » La confiance est totalement revenue à présent  »

Mais ce n’est pas comme ça qu’on fait basculer un match.

VORMER : Exactement. Je n’étais pas décisif. Mais quand nous avons rejoué à trois dans l’entrejeu, cela a tout de suite été mieux et j’ai pu jouer plus en profondeur.

Tandis qu’avant, quand vous le faisiez, il y avait un trou entre la défense et l’entrejeu.

VORMER : On se faisait prendre et c’était normal. On sortait d’une période avec Preud’homme où tout était très clair puis, soudain, on nous demandait autre chose. Maintenant, tout le monde adhère mais au début ce n’était pas le cas. C’est pourquoi à Athènes, on a rejoué en 4-3-3, pour retrouver la confiance. Maintenant, elle est revenue, sans quoi on n’aurait pas pris trente points.

Pourquoi tout le monde n’adhérait-il pas aux idées de l’entraîneur ?

VORMER : C’est toujours un peu chacun pour soi, hein. Avec Preud’homme, on avait déjà essayé de jouer à trois derrière et tout le monde n’était pas d’accord non plus.

Vous êtes allés trouver l’entraîneur en groupe ou chacun lui a-t-il parlé individuellement ?

VORMER : Ce sont des choses dont il faut parler, n’est-ce pas ? Mettre une tactique au tableau, c’est facile mais sur le terrain, c’est différent. L’entraîneur a ses idées mais les joueurs aussi. On peut essayer de l’aider en lui donnant des indications. Au début, il y avait trop de doutes et ce n’est jamais bon.

Et vous, vous y croyiez ?

VORMER : Oui, je pense que ce système peut nous apporter beaucoup de choses. Mais pas à deux au milieu, sauf si on s’entraîne beaucoup et qu’on commence à gagner. Je préfère à trois, c’est plus facile pour presser. Sans quoi on court énormément sans ligne de conduite.

Six semaines de préparation, ce n’était pas assez ?

VORMER : Non. Il faut que tout le monde adhère. Ivan a beaucoup parlé au début mais que faire quand les résultats ne suivent pas ? Poursuivre ou changer ? Heureusement, il a poursuivi…

 » Quand je ne suis pas d’accord, je le dis  »

Sauf à Athènes, à la demande des joueurs. Qui a pris l’initiative ?

VORMER : Moi. Timmy. Refa. On pensait qu’en jouant comme la saison dernière, on pouvait faire mal à Athènes et on le lui a dit. C’est comme ça que ça doit fonctionner, non ?

Vous aviez déjà fait ça avec Preud’homme ?

VORMER : Oui, bien sûr. À l’époque, c’était plutôt Timmy qui s’en chargeait mais maintenant, c’est un peu mon rôle. Il faut être ouvert, non ? Quand je ne suis pas d’accord, je le dis.

N’est-ce pas à l’entraîneur d’être convaincant ?

VORMER : C’est difficile, hein. Leko est très ouvert, c’est chouette pour nous.

Mais si chacun exprime ses idées, ça complique sa tâche.

VORMER : Je ne crois pas qu’un entraîneur écoute tout le monde ni que tout le monde ose aller le trouver. On a discuté ouvertement et il a réfléchi. Mais c’est lui qui a pris la décision.

À Athènes, vos idées n’ont pas fonctionné non plus. Vous vous êtes excusés ?

VORMER : Non. Bien sûr, j’accepte cette responsabilité mais en football, on ne peut pas toujours gagner.

Du coup, Leko a dit que désormais, il imposerait ses vues.

VORMER : Oui, et ça marche. Il a été très courageux. Il n’a que 39 ans et entraîne depuis moins de trois ans mais il connaît le foot, c’est un gagneur et ses séances de théorie sont très bonnes. Plus tard, il sera peut-être plus autoritaire mais actuellement, ce n’est pas le cas et je trouve qu’il nous fait jouer.

Il n’est pas fan des rotations. Quel est votre rôle de capitaine auprès de ceux qui ne jouent pas ?

VORMER : J’essaye d’aider mais quand j’ai connu ça, personne ne m’a aidé. Le monde du foot est dur, chacun doit s’en sortir. J’essaye d’être positif, de leur dire qu’ils doivent travailler pour en être récompensés à Bruges ou ailleurs. Ce sont des clichés mais c’est la vérité.

 » L’Europe me manque  »

Vous croyez dans la rotation ?

VORMER : C’est difficile. Si on est européen, OK, à condition d’avoir un bon noyau. Car on ne peut pas déforcer l’équipe.

Zulte Waregem en fait l’expérience.

VORMER : C’est sûr, c’est plus dur physiquement et mentalement. C’est pourquoi j’ai de l’admiration pour les joueurs du Barça et du Real qui répondent présent chaque semaine malgré la pression. N’empêche que l’Europe me manque.

Le brassard a-t-il changé quelque chose à votre statut à Bruges ?

VORMER : Je me suis toujours senti très bien ici. Le respect, c’est là qu’on le gagne (il montre le terrain), pas en parlant. Je pense que je me débrouille bien. Preud’homme aimait avoir beaucoup de joueurs dans le rectangle, moi aussi. J’y étais parfois trop vite, disait mon père. C’est difficile de bien choisir son moment. Avec Izquierdo, on ne savait jamais si on allait recevoir le ballon. Mais on a besoin d’artistes comme lui.

Vous aimez marquer, hein !

VORMER : Bien sûr, c’est la plus belle chose qui soit, non ?

Les donneurs d’assists disent que ce n’est pas important.

VORMER : Un assist, c’est bien aussi, je suis plutôt bien placé pour en parler. Mais marquer, c’est encore mieux, même si l’intérêt de l’équipe passe avant tout. On ne peut pas jouer que pour soi. Quand ça a été le cas ici, je l’ai dit à la télé. Si un joueur est mieux placé que moi, je lui donne le ballon.

Vous avez une idée du nombre de kilomètres que vous parcourez sur un match ?

VORMER : Onze ou douze, je pense. Mais Hans court encore plus.

Pourtant, vous ratez rarement un match. Comment faites-vous ?

VORMER : Je mange sainement et je dors beaucoup. Si les enfants me laissent faire, je fais une sieste. Je leur dis qu’après, je serai disponible pour eux. Si on ne se repose pas, on ne tient pas le coup. En vacances, je me lâche mais toute l’année, je fais attention à ne pas grossir. Dix pour cent de masse graisseuse, c’est bien. Regardez Timmy ! C’est un exemple à tous points de vue.

Il ne regarde jamais un match. Ce n’est pas votre cas.

VORMER : (il rit) En effet. Je suis surtout les rencontres aux Pays-Bas et en Belgique. Je suis Davy (De fauw) et Timothy Derijck à Zulte Waregem, Clementà Waasland Beveren. Je suis content pour lui. Il a pris un risque en quittant Bruges, j’aime ça.

 » J’ai besoin de repères  »

Comment vous détendez-vous ?

VORMER : En passant du temps avec ma femme et mes enfants. J’aime me promener en ville, aller voir la famille.

Vous pouvez vous promener tranquillement à Gand, où vous avez choisi d’habiter ?

VORMER : Parfois, on m’accoste mais ça va encore. On a opté pour Gand parce que ma femme travaillait à Dordrecht. Une fois, après un match contre les Buffalos, des supporters sont venus coller des autocollants sur ma voiture et d’autres saletés du genre.

Qu’avez-vous fait alors ?

VORMER : J’ai fermé la porte et appelé la police, que pouvais-je faire d’autre ? Heureusement, j’étais seul à la maison car ça fait peur.

Votre femme est médecin urgentiste à Gand. Elle doit stresser plus que vous.

VORMER : Oui, les urgences, c’est très dur, surtout s’il y a des enfants. Par rapport à moi, elle a l’avantage de pouvoir oublier plus vite. Moi, les premiers jours de vacances, je suis toujours grincheux.

Vos équipiers vous manquent ?

VORMER (il rit) : Pas mes équipiers mais la routine. J’ai besoin de repères. Je mange à 18 heures puis je prends un yaourt ou un thé. Les Hollandais sont très structurés.

par Peter T’Kint – photos Belgaimage – Christophe Ketels

 » Au départ, il y avait trop de doutes chez les joueurs.  » – Ruud Vormer

 » Ethan Horvath nous a parfois sauvés mais sur certains ballons, il a foiré.  » – Ruud Vormer

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