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Standard : besoin de Sá ?

Pierre Danvoye
Pierre Danvoye Pierre Danvoye est journaliste pour Sport/Foot Magazine.

À Charleroi et contre Bruges, deux matches qu’il fallait gagner, Orlando Sá a eu droit à 38 minutes de jeu. Un bon calcul ?

Deux ans plus tard, Sclessin vit une ambiance de déjà-vu. Fin février 2016, le Standard était à la chasse de la sixième place à deux matches de la fin et préparait la finale de la Coupe. Aujourd’hui, Ricardo Sá Pinto vit le même stress que Yannick Ferrera à l’époque. Avec plus de chances de succès en championnat ?

Le match du week-end prochain, contre Malines, se jouera avec Sá Pinto dans la tribune. Ça aussi, c’est du déjà-vu. Et cette condamnation, à nouveau, il ne la capte pas. Il l’a répété après le nul de dimanche face à Bruges :  » Je ne comprends pas. C’est incroyable. Another joke.  »

En parlant de blague, le sujet de conversation, dimanche, était la nouvelle absence d’ Orlando Sá au coup d’envoi. Comme une semaine plus tôt à Charleroi. La feuille de match a beaucoup fait parler avant même le début des débats. En plateau pour VOO, Frédéric Waseige avouait son étonnement :  » Je ne comprends pas pourquoi Sá n’est pas titulaire. Parce qu’il ne travaille pas assez défensivement ? Parce que Renaud Emond est trop bon pour le moment ? Je rappelle quand même qu’à Charleroi, Sá a marqué quelques minutes après être monté au jeu.  »

Orlando Sá, c’est le meilleur attaquant du Standard, il n’a besoin de personne.  » Alex Teklak

Et donc, un journaliste de la chaîne a questionné Sá Pinto sur le sujet, avant le coup d’envoi. Le coach a botté en touche :  » Je n’explique pas mes choix. Vous ne me demandez pas pourquoi Sébastien Pocognoli et Duje Cop, par exemple, sont aussi sur le banc ?  » Non, on ne lui a pas posé la question parce que Pocognoli et Cop n’ont pas le profil décisif de Sá.

Faut-il aligner un joueur qui a la tête ailleurs ?

On a alors appris que l’attaquant avait la tête ailleurs depuis quelques jours. Des clubs chinois tirent à sa manche. Et Sá Pinto est sorti du bois, sur la question, après le match.  » Quand tu reçois une offre de contrat en millions, ça peut être difficile à gérer. Certains joueurs peuvent vivre avec ça et rester concentrés, d’autres ont plus de mal. J’essaie de l’aider à gérer cette situation mais ce n’est pas simple. Je ne le sens plus focus comme avant cette histoire. Je fais tout pour lui rendre le bon esprit.  »

Pas un mot sur un prétendu conflit personnel entre les deux hommes. Un conflit, vraiment ?  » Je suis persuadé qu’il s’est passé quelque chose entre Ricardo Sá Pinto et Orlando Sá « , lâche Rodrigo Beenkens (souvent bien informé sur les choses du foot portugais) dans son debriefing hebdomadaire de la journée de championnat, dimanche soir en radio.

Sá Pinto a-t-il eu raison de ne pas titulariser un joueur qui a la tête ailleurs ? À Charleroi, Sá a eu une demi-heure en fin de match pour se montrer et il a égalisé. Contre Bruges, il n’a pas pu le faire mais il n’a eu droit qu’à une dizaine de minutes sur la pelouse. Le Portugais n’est pas un véritable buteur en série mais il a quand même scoré 13 fois cette saison (championnat et Coupe), et 18 fois la saison dernière.

Dans une équipe qui rame, ce n’est pas mal. Sa mise à l’écart lors des deux derniers matches s’explique-t-elle surtout par ses envies de départ, un conflit avec le coach ou le retour au premier plan de Renaud Emond ? Clairement, un joueur sur le départ n’est pas nécessairement un poids mort pour son équipe.

Récemment, Sofiane Hanni a buté trois fois à Sclessin alors qu’il se préparait à quitter Anderlecht, quelques heures plus tard. On peut aussi rappeler l’exemple de Laurent Ciman, qui avait offert un clasico aux Rouches, juste avant de prendre l’avion pour le Canada.

Carcela, un problème positif

Et puis, fallait-il vraiment choisir entre Orlando Sá et Renaud Emond ? La réponse est aussi dans les pieds de Mehdi Carcela, au top depuis son retour à Liège en janvier. Si Sá Pinto décide d’aligner Carcela, Paul-José Mpoku et Junior Edmilson, il ne reste plus qu’une place en attaque. Et c’est Emond qui l’a pour le moment.

Après le match contre Bruges, on en parle avec Alex Teklak, qui avoue son incompréhension face au choix de Sá Pinto.  » Orlando Sá, c’est le meilleur, tout simplement. Il est opportuniste, courageux dans le travail défensif, il a une finesse de pieds pour remiser que les autres attaquants n’ont pas, il manque beaucoup quand le Standard a besoin d’un jeu plus ficelé, bien organisé.

Si Sá Pinto aligne Carcela, Mpoku et Edmilson, Sá est tout indiqué pour faire le lien, pour servir de relais. Tu peux à tout moment jouer avec lui, lui passer le ballon et tu sais qu’il pourra le transmettre efficacement à un autre joueur. Emond n’a pas cette qualité, et d’ailleurs, il a joué beaucoup trop bas contre Bruges.  »

Quand on lui fait remarquer que Sá n’est pas non plus synonyme d’un but par match, Alex Teklak nuance :  » S’il n’arrive pas à marquer ou à remiser, il va te provoquer une faute. Il provoque plein de fautes, c’est une autre qualité chez lui. Il peut t’amener des coups francs dangereux. Et il permet de toute façon à toute l’équipe de jouer plus haut, ça aussi c’est important.  »

On en revient au problème positif posé par Carcela, au fait que son niveau actuel lui permette automatiquement d’être dans l’équipe de départ.  » Je pense que si Sá n’a pas ses histoires, Sá Pinto continue à jouer avec deux attaquants, avec lui et Emond « , continue Alex Teklak.  » Et alors, il doit faire un choix sur les côtés, il y a deux postes pour trois joueurs : Carcela, Mpoku et Edmilson.

En 4-4-2, Emond a besoin de Sá. Cop a besoin de Sá. Mais Sá, lui, il n’a besoin de personne. Il sera toujours rentable et efficace, même s’il joue seul devant. Je comprends que ce soit délicat d’enlever Emond. Imagine qu’il soit retourné sur le banc et que Sá s’en aille demain, tu as alors perdu deux gars. Un qui n’est plus là et l’autre qui a perdu confiance.

Laisser Emond dans l’équipe après les matches qu’il vient de faire et les buts qu’il a marqués, c’était une façon de garder l’église au milieu du village. De toute façon, il n’y a que ces deux-là qui entrent en ligne de compte. C’est quoi, la situation au Standard aujourd’hui ? Un attaquant qui se voit ailleurs : Sá. Un qui revient de nulle part : Emond. Un qui revient de blessure et qui n’est pas encore là : Cop. Et un qui n’a jamais été là : Carlinhos.  »

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