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No Hein no party

Hein Vanhaezebrouck a vécu une semaine agitée : défaite contre Gand, licenciement de Van Holsbeeck, rumeurs de départ prématuré le concernant et victoire à Charleroi. Sabrera-t-il tout de même le champagne ?

« La crise ? Non, Chris n’est pas encore ici.  » Ceux qui étaient présents à la conférence de presse de Hein Vanhaezebrouck jeudi dernier n’ont pas dû réfléchir bien longtemps avant de comprendre le clin d’oeil. Chris, c’est Chris Goossens, le médecin du club venu d’Ostende.

Malgré les nombreux coups encaissés cette saison, Vanhaezebrouck ne perd pas sa bonne humeur. De plus, le Flandrien sait s’y prendre avec les médias. Contrairement à ses prédécesseurs, Ariel Jacobs, Franky Vercauteren ou René Weiler, il ne se cambre pas et ne s’énerve pas à la moindre question des journalistes.

De temps en temps, le guerrier refait surface, on retrouve le Vanhaezebrouck qui ne craint pas de dénoncer publiquement ce qui, à ses yeux, est anormal. C’est ainsi qu’une question relative à la fragilité défensive de son équipe a donné lieu à un exposé sur l’utilisation du Video Assistant Referee (VAR). Vanhaezebrouck ne perd jamais le fil de ses idées.

 » Tout le monde a vu qu’il y avait penalty contre Gand « , dit-il.  » À la radio, ils l’ont dit. À la télévision aussi. Dans la presse écrite également. Même le patron des arbitres l’a dit. Le seul qui ne l’a pas vu, c’est le type dans le bus. J’ai trouvé bizarre qu’on ne montre pas immédiatement la répétition de la phase. Le réalisateur ne l’a diffusée que six minutes plus tard. C’est tout de même interpellant…  »

Changement d’attitude

Au sein du club, ils sont tout de même nombreux à estimer qu’au cours des six derniers mois, Vanhaezebrouck a baissé le ton. Au cours des semaines qui ont suivi son arrivée, il n’hésitait pas à pointer l’un ou l’autre joueur du doigt. Maintenant, il critique rarement un de ses hommes dans les médias. Et s’il le fait, c’est à mots couverts. Manifestement, Herman Van Holsbeeck lui a tapé sur les doigts et lui a demandé de soigner sa communication externe.

L’étonnant retour d’ Olivier Deschacht dans le noyau A ne constitue-t-il pas la preuve irréfutable que Vanhaezebrouck a mis son orgueil dans sa poche ? À moins qu’il ne s’agisse d’opportunisme parce qu’il estime avoir besoin d’un défenseur supplémentaire maintenant qu’il sait que Kara Mbodj, son leader charismatique, ne reviendra pas immédiatement.

 » La sanction de Deschacht était à durée indéterminée. Nous n’avions pas l’intention de le laisser chez les Espoirs à vie « , dit Vanhaezebrouck.  » Il a joué ses matches, s’est montré correct envers les jeunes et a fait preuve de professionnalisme. Après en avoir parlé en interne et avec les joueurs, nous avons estimé que c’était le bon moment pour le reprendre.  »

À Gand, cette marche arrière de l’ancien entraîneur en a sans doute surpris plus d’un car on se souvient qu’il pouvait se montrer terriblement dur à l’égard des joueurs et de collaborateurs du club. C’est ainsi qu’il lui arrivait très rarement de complimenter les jardiniers.

Après le match contre Tottenham à Wembley, il avait même dit qu’il y avait un monde de différence entre la pelouse de Wembley et celle de la Ghelamco Arena.  » Notre terrain est bon mais je préfère tout de même celui de Wembley « , aurait-il affirmé, sachant pourtant pertinemment que les moyens n’étaient pas les mêmes.

Compliments à Ferrera

Mais Vanhaezebrouck ne parlait jamais pour ne rien dire : c’était sa façon de motiver et de tenir tout le monde en éveil. C’est un trait de son caractère : il veut tout contrôler et déborde de confiance en lui. Il préfère mourir avec ses idées que trahir sa vision du football. Il est passionné et intéressé par tout ce qui touche de près ou de loin au football.

Il s’est plongé dans le métier d’entraîneur à un point tel qu’il peut tenir une conversation avec tous les spécialistes de l’entraînement. À Neerpede, on savait déjà qu’il était fan des trackers GPS et d’autres nouvelles technologies. Désormais, il lui appartient de convaincre tout le groupe. Tout le monde n’aime pas ses analyses vidéo interminables. Ni ses entraînements à rallonge. Les joueurs préfèrent s’entraîner pendant 90 minutes de façon intensive que pendant trois heures avec de nombreuses interruptions.

Par contre, en lançant des jeunes, Vanhaezebrouck a marqué des points à Anderlecht. La façon dont il les gère est un soulagement par rapport à ce que faisaient René Weiler, John van den Brom et même Besnik Hasi. Vanhaezebrouck manque rarement un match à domicile des Espoirs et il va même parfois les voir en déplacement.

Il ne part jamais avant le coup de sifflet final et discute souvent avec Emilio Ferrera, avec qui il a tissé de solides relations professionnelles au cours des derniers mois. Ce n’est donc pas un hasard si, en décembre, il a accepté de souligner le bon travail de celui-ci, à la demande de Van Holsbeeck. Car à Neerpede, Ferrera suscitait une telle aversion que l’ex-manager général s’était cru obligé de consolider sa position au sein du club.

La carte jeunes, vraiment ?

Indépendamment des raisons qui l’ont poussé à le faire, Vanhaezebrouck a eu le mérite de donner une chance à des jeunes comme Albert Sambi Lokonga, Francis Amuzu, Alexis Saelemaekers, Abdoul Dante, Edo Kayembe et Nelson Azevedo, que Weiler ne trouvait pas suffisamment bons pour s’entraîner avec le noyau A ou être sur le banc.

D’un côté, Vanhaezebrouck n’était pas totalement satisfait de certains joueurs du noyau A. De l’autre, il avait constaté que les jeunes d’Anderlecht étaient bien meilleurs que ceux de Gand ou de Courtrai. On doit donc arrêter de dire que Vanhaezebrouck n’aime pas les jeunes, même si la situation pénible dans laquelle se trouvait Anderlecht – un tout petit noyau, de nombreux blessés, des résultats décevants – ne pouvait que l’inciter à les lancer.

 » Au risque de me répéter, le noyau n’est pas du tout équilibré « , dit-il.  » Et je suis privé d’une demi-équipe. Des joueurs importants, des leaders, des buteurs et des joueurs expérimentés. Chaque équipe disputant les play-offs, y compris le Club Bruges, aurait des problèmes si elle était privée de la moitié de ses joueurs.  »

Comme d’autres clubs belges, Anderlecht n’a pas vraiment de stratégie bien définie en matière d’incorporation des jeunes au noyau A. Il n’est donc pas surprenant que la nouvelle direction ait déjà déclaré plusieurs fois qu’elle voulait revaloriser la formation. À Neerpede, on ne s’enthousiasme cependant pas trop. Il y a quelques années, on disait qu’Anderlecht possédait le meilleur centre de formation d’Europe.

Les U19 avaient éliminé Barcelone et Porto en Youth League avant d’échouer en demi-finale. Mais plus aucun des titulaires de l’époque – Svilar, Lukebakio, Kawaya, Matthys, Bastien, Bourard, Omonga, Faes, Leya Iseka – ne joue à Anderlecht. Ils ont été écartés les uns après les autres alors qu’une partie d’entre eux forme l’épine dorsale de l’équipe nationale U21.

Climat de travail

En s’imposant à Charleroi, Vanhaezebrouck s’est donné un peu de crédit au regard de ses nouveaux patrons. Juste à temps car, dans les couloirs, le nom de Francky Dury commençait à circuler. Et ce n’était pas un hasard. Alors que Van Holsbeeck était un fan absolu de Vanhaezebrouck, Coucke l’est beaucoup moins. Avant le déplacement au Mambour, le tandem Marc Coucke-Luc Devroe a tout de même assuré à Vanhaezebrouck que la collaboration serait prolongée.

 » Je pense qu’il est clair que nous voulons poursuivre le chemin ensemble « , a déclaré Vanhaezebrouck à Sporza.  » Nous construisons déjà en vue de la saison prochaine. Il faut donc ranger les rumeurs au placard : je reste à Anderlecht. En football, on ne sait jamais mais je ne pense pas que cela change.  »

Dans Heimspiel, une émission de la télévision suisse consacrée au football, René Weiler a dressé voici peu une triste image du climat de travail à Anderlecht.  » J’aimerais retrouver du boulot dans le monde du football mais de préférence dans un club où les gens collaborent et où il y a un projet « , a-t-il dit. Dans une semaine exactement, après le choc contre Bruges et le clasico à Sclessin, on saura si Hein Vanhaezebrouck est réellement bien installé dans son fauteuil d’entraîneur.

Par Alain Eliasy

60 % à peine

Le bulletin provisoire de Hein Vanhaezebrouck n’est pas brillant. Depuis son arrivée, en octobre, le Flandrien n’a pris que 60,61 pour cent des points. Il fait moins bien que John van den Brom (65,22%), Besnik Hasi (63,37%) et René Weiler (64,54%). Depuis la saison 1992/93 seuls Arie Haan (53,58 %), René Vandereycken (47,62%) et Herbert Neumann (0%) ont fait pire. Au cours des 25 dernières années, aucun coach d’Anderlecht n’a fait mieux que les 77,78 % de Hugo Broos. C’est 17 % de mieux que Vanhaezebrouck.

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