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Les footballeurs et l’argent

Ils ont entre 18 et 35 ans et ont la réputation de vivre dans un autre monde. Eux, ce sont les footballeurs qui évoluent sur les différentes pelouses du Royaume. Réputés tour à tour millionnaires, flambeurs voire même carrément insouciants, la plupart sont en fait bien loin de l’image d’Épinal qu’ils renvoient.

Tous les premiers du mois, Anthony Vanden Borre reçoit 66.000 euros sur son compte en banque. Le back droit de 28 ans n’a pourtant plus joué la moindre minute pour Anderlecht depuis le 2 août 2015. Son cas ne fait pas figure d’exception. Parce qu’avant d’être un privilégié, le footballeur est un salarié comme les autres. Et si on peut s’étonner des émoluments de Vanden Borre, que doit-on penser des 125.000 euros mensuels de Steven Defour ?

Contrat publicitaire compris, le salaire d’un Cristiano Ronaldo (1,4 M/mois) ou d’un Lionel Messi (1,9M/mois) grimpent encore bien plus haut. Inutile de dire que le décalage avec la Jupiler Pro League est colossal. Il l’est d’autant plus si on considère qu’à l’échelle de notre championnat, Steven Defour et Anthony Vanden Borre restent des exceptions.

De celles qui gagnent très, très bien leur vie. Assez pour s’assurer des lendemains qui chantent et ne pas trop réfléchir à la dépense. Suffisamment en tout cas pour entretenir le mythe du footballeur millionnaire et inconscient. Celui capable de claquer deux fois sa paie en un seul mois.

Sans conteste, le footballeur moyen qui évolue sur les pelouses du Royaume n’a pas grand-chose du dilapidateur de fonds professionnel que certains championnats semblent avoir élevé au rang de référent. Rien de comparable donc avec le rythme de vie de ceux qui constituent le gratin du football belge en dehors de nos frontières.

L’exemple d’un Axel Witsel – qui gagne quelque 3 millions d’euros par an au Zenit Saint-Pétersbourg – est éloquent. Actionnaire à 33% de Lindsky Aviation (société de jet privé), propriétaire d’une ferme à Tongres, à la base d’une école de football et copropriétaire depuis 2008 d’une société (TAWSS) qui construit et loue des appartements, Axel Witsel, a, comme beaucoup de footballeurs de son statut, décidé de placer ses ronds. Intelligemment si possible.

Dans l’intimité de notre Jupiler Pro League, le refrain est le même, avec des moyens différents. Évidemment.

Un salaire moyen faussé par Anderlecht

Revenu cet hiver à Malines, Xavier Chen n’a jamais jonglé dans la même catégorie que Witsel. Il a quand même, lui aussi, connu ses années folles. C’était à Guizhou Renhe, en Chine, entre 2013 et 2015. Un exil vers l’Asie que le joueur n’a aucun mal à justifier : « La raison principale, c’était l’argent. Après, le challenge était chouette et je pouvais retourner en Asie. Mais quitter sa famille, c’est toujours un sacrifice. Les gens qui disent que l’argent n’a qu’un petit rôle à jouer dans ce genre de décision sont des menteurs. On a une carrière assez courte, il faut maximiser son capital. « 

Les mots sont crus, mais sincères. Dans l’extrême sud montagneux de l’Empire du Milieu, l’homme aux 150 matchs de Pro League sait visiblement où il va. Là-bas, il gagne jusqu’à six à sept fois plus que lors de ses meilleures années malinoises. « Et dix fois plus qu’à l’heure actuelle », rigole-t-il. « C’est normal que je gagne moins bien ma vie aujourd’hui. Revenir de Chine, ce n’est pas une plus-value pour un footballeur en Europe et j’ai 32 ans. »

Mais Chen n’est peut-être pas un footballeur comme les autres. Titulaire d’un master en notariat après avoir réussi des études de droit, l’homme se traîne une réputation de gendre idéal dans le milieu. Pourtant, il l’avoue, il lui est arrivé de lâcher les chevaux en Chine. « Le rapport avec l’argent est différent là-bas. J’ai dépensé sans regarder et ça m’est arrivé de ne plus vraiment faire attention.  »

Tout aussi exotique, le périple actuel d’Habib Habibou à Gaziantep, en Turquie, à une petite heure de route seulement de la frontière syrienne. « Ici, je gagne 20 fois ce que je gagnais à mes débuts à Charleroi. » Et le bougre en profite puisqu’il déclare aujourd’hui dépenser entre 10 et 20.000 euros par mois. Une fourchette qui donnerait la nausée à pas mal de grippe-sous, mais qui a au moins le mérite de faire marcher l’économie turque.

Toujours est-il qu’il serait bien difficile pour 85% des footballeurs de D1 de prétendre dépenser des sommes similaires. En Belgique, le salaire moyen tourne autour de 250.000 euros par an soit 20.000 euros par mois. Une moyenne faussée par ce qu’offre un club comme Anderlecht à ses joueurs (600.000 euros par an en moyenne) et qui ne correspond donc pas à la réalité du marché.

« Les gens pensent toujours qu’on gagne énormément d’argent. Mais les footballeurs riches et millionnaires, ils sont au Barça« , pose Sébastien Dewaest. « Bien sûr que dans notre championnat, il y a des joueurs qui touchent des salaires corrects qui permettent de voir venir, mais pas de ne pas travailler après. »

Des revenus pas si exorbitants que ça

Même si le gladiateur de Genk « vit bien » et claque entre 3 et 5000 euros par mois, son message est clair : en Belgique, personne n’est à l’abri sur le long terme. L’appart et l’essence payés par le club, qui met toujours une voiture à disposition, il s’agit alors de savoir mettre à gauche. Surtout quand les salaires ne sont pas si exorbitants qu’imaginés.

« J’ai un salaire inférieur à tous les gardiens de D1. Les autres, ils touchent dans les 10 ou 20.000 », tonne Laurent Henkinet de Waasland Beveren. En janvier, il stoppe un penalty de Sven Kums, avant que celui-ci n’explose le plafond salarial de Gand. « Je suis sûr que certains joueurs de P2 gagnent plus que moi au black. C’est difficile de se dire qu’à 35 ans, on aura assez de côté pour envisager autre chose. Si ça peut déjà me payer ma maison, je serais content. Et quand je dis maison, je ne parle pas d’une villa avec piscine. »

Par Martin Grimberghs et Nicolas Taiana

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