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Les dessous du transfert d’Ezekiel

Jan Hauspie
Jan Hauspie Jan Hauspie is redacteur bij Sport/Voetbalmagazine.

Quels enseignements tirer des amours d’Anderlecht et d’Imoh Ezekiel ? Que les portes ne s’ouvrent pas toujours grandes devant Mogi Bayat, que Dennis Praet et Idrissa Sylla doivent se poser des questions et que le RSCA continue à miser sur la location de grands noms.

Anderlecht l’a appris dans le dossier Ezekiel : il n’est pas toujours bon d’envoyer Mogi Bayat en éclaireur au moment de conclure un transfert. Lorsque le Français Michel Saggese, agent du joueur nigérian, a compris qu’il était un peu court pour faire l’affaire lui-même, il donna mandat à Bayat, pensant ainsi augmenter les chances d’un transfert rapide à Anderlecht. Mais les Qataris d’Al Arabi, à qui Ezekiel appartient, ont leur fierté.

Et l’arrogance de Bayat ne leur a pas plu. C’est alors que Luciano D’Onofrio, toujours très proche du président anderlechtois Roger Vanden Stock, est entré dans la danse. Bayat s’est donc senti dribblé. Toute cette confusion n’a pas du tout plu à Al Arabi et c’est finalement Gafar Liameed, le propriétaire de l’académie nigériane où Ezekiel fut formé, qui a arrangé les bidons.

Beaucoup de bruit, donc, autour d’un joueur qui, de plus, risque de rompre l’équilibre dans l’effectif anderlechtois. Ezekiel est un joueur typique de 4-4-2 et ce n’est pas le système joué par Anderlecht. Du moins pas jusqu’au moment de la préparation au championnat car, soudain, Besnik Hasi s’est mis à expérimenter une autre occupation de terrain.

En pointe dans un 4-3-3, Ezekiel n’est pas bon. C’est un attaquant qui doit tourner autour d’un pivot. Comme il le faisait au Standard. Igor De Camargo effectuait le sale boulot et Ezekiel, avec sa vitesse, jouait en profondeur. Le partenaire du Nigérian est donc primordial pour son rendement. Si Aleksandar Mitrovic était resté, le problème aurait été résolu.

Idrissa Sylla ne semble pas convenir. A Zulte Waregem, il évoluait en pointe ou sur le flanc. Dans le premier cas, il ne travaillait guère défensivement. Or, Ezekiel a besoin, à côté de lui, d’un gars qui effectue sa part de sale boulot. Comme De Camargo, Sylla garde bien le ballon et il remporte beaucoup de duels de la tête. Mais la comparaison s’arrête là.

Et Dennis Praet ? Dans un 4-4-2, il risque d’être déporté sur un flanc, ce qu’il ne manquera pas de considérer comme dégradant. Praet veut être décisif, que ce soit comme ailier ou en 10. Dans un 4-4-2 avec Ezekiel, il n’y a pas de place pour un 10. L’arrivée d’Ezekiel ne semble dès lors pas liée à des choix sportifs.

Et vu le nombre d’erreurs de casting commises ces dernières années au moment de recruter des attaquants, la question se pose. Ezekiel a évidemment une grande qualité : il marque quinze à vingt buts par an. Hormis Mitrovic, Anderlecht n’a personne d’autre qui soit capable de faire cela.

Quid de la détection ?

Autre chose : Anderlecht a voulu louer Ezekiel, comme il l’avait fait l’an dernier avec Marko Marin et Rolando ou, un peu plus tôt, avec Demy de Zeeuw, soit tous les grands noms passés par le Sporting au cours des deux années écoulées. De Zeeuw appartenait au Spartak Moscou. Lors de sa présentation, en janvier 2013, Herman Van Holsbeeck était fier comme un paon.

Selon lui, Anderlecht jouait à nouveau dans la cour des grands. Le fait qu’un type du statut de De Zeeuw – ex-joueur de l’Ajax, finaliste de la Coupe du monde 2010 en Afrique du Sud avec les Pays-Bas – opte pour Anderlecht signifiait que le club bruxellois figurait à nouveau sur la carte du football international.

Rien n’allait s’avérer moins vrai. De Zeeuw était sur la pente descendante et se planta complètement. Anderlecht avait loué un chat dans un sac. Pareil deux ans plus tard avec Marin. International allemand au Mondial 2010, sous contrat pour cinq ans avec Chelsea, on l’avait un jour surnommé Le Messi allemand.

Mais à Anderlecht, on n’a rien vu de tout cela. Quant à Rolando, loué à Porto  » grâce  » à Luciano D’Onofrio (car le défenseur portugais avait, soi-disant, l’embarras du choix entre les grands clubs…), il a démontré au Sporting pourquoi il était en Belgique et pas dans un grand club. De Zeeuw, Marin et Rolando n’ont guère joué et ont disparu comme ils étaient venus, sans renforcer l’équipe. Ils ont juste coûté de l’argent à Anderlecht : location, salaire et commissions des intermédiaires…

Et voilà qu’Anderlecht loue à nouveau Ezekiel, encore un nom, un type qui débarque grâce à ses relations. Pas un joueur qu’il a déniché quelque part grâce au flair de ses recruteurs, une qualité que le club bruxellois semble avoir perdue. Les scouts passent désormais après Bayat.

Pourtant, quand on voit Maxime Colin, Fabrice N’Sakala et David Pollet, on se dit que celui-ci n’a pas amené grand-chose de bon. Sa grande qualité, c’est de pouvoir débarrasser facilement le club de ses joueurs excédentaires. Ce n’est pas pour rien qu’on le surnomme Garbage, l’éboueur.

Même D’Onofrio ne semble pas pouvoir amener de joueur exceptionnel à Anderlecht. Steven Defour a échoué à l’étranger et, avec la vie qu’il mène, c’est tout juste s’il s’en sort en Belgique. Avec Ezekiel, Anderlecht a un grand avantage: le Nigérian veut obtenir un passeport belge pour pouvoir jouer en Angleterre. Pour cela, il faut qu’il joue en Belgique pendant cinq ans.

Sans interruption, en principe, mais là il y a un doute car Ezekiel a joué six mois au Qatar. Si son permis de séjour en Belgique est resté valable pendant cette période, cela ne posera pas de problème. Il doit donc encore jouer un an et demi en Jupiler Pro League, jusqu’en janvier 2017. C’est déjà plus que De Zeeuw, Marin et Rolando.

Par Jan Hauspie

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