Thomas Bricmont

Le Clasico des extrêmes

Dimanche, le Standard reçoit Anderlecht dans un Clasico qui peut paraître déséquilibré sur papier. Mais le Standard finira bien par rebondir et on ne serait pas surpris que la rencontre de dimanche déjoue déjà les pronostics.

Sur papier, cela s’annonce déséquilibré. Même si les forfaits importants d’Ivan Obradovic et de Dennis Praet, l’aile gauche performante des dernières semaines, sont quelque peu venus rétablir la balance. Et pourtant, il y a quelques mois seulement, lors des derniers play-offs, c’est bien le Standard qui avait pris l’ascendant, non pas au classement, mais lors de leur double confrontation (victoire 3-1 à Sclessin et partage au Parc Astrid). En moins de cinq mois, tout est chamboulé. Tout d’abord d’un point de vue sportif, puisque l’opposition de dimanche n’a finalement rien d’un sommet.

L’équipe de Besnik Hasi talonne Gand alors que le Standard navigue à une inquiétante 13e place. Dimanche, ce n’est pas encore David contre Goliath mais bien le surpuissant Stefano Okaka contre le très léger (ces dernières semaines) Adrien Trebel. Un rapport de force à la pesée déséquilibré alors que le dernier Clasico à Sclessin avait mis K-O un Steven Defour lessivé par les crochets déroutants de Mehdi Carcela et les salves d’un virevoltant Imoh Ezekiel.

La rencontre face à Mouscron n’invite toutefois pas à l’excès de confiance ou à toute forme de dikkenek attitude alors que le duel de jeudi à Tottenham sera encore dans les jambes et peut-être dans toutes les têtes. Pas de quoi en faire des tonnes, donc, d’autant qu’Anderlecht prend l’eau régulièrement en bord de Meuse ces dernières années.

Il est loin le temps où Sclessin était devenu forteresse imprenable pour le… Standard et dont les supporters ont dû attendre la délivrance par Almami Moreira, le 27 octobre 2001, après 15 ans de clasíco ardent sans victoire. Désormais, Anderlecht souffre à Liège et peu importe son statut.

Le surpuissant Okaka contre le très léger Trebel. Un rapport de force à la pesée déséquilibré.

Réginal Goreux, qui connaît la cité rouche comme sa poche, évoque avec justesse dans ce numéro (lire pages 6 à 10) les différences culturelles entre ces deux entités, lui dont l’enfance était déjà animée par cette rivalité. « Cette forme d’arrogance, c’est aussi leur point fort. Chez les jeunes, c’était déjà comme ça. Quand tu les voyais débarquer, tu voyais que c’était Anderlecht qui arrivait. Ils étaient sûrs d’eux. Nous aussi, on avait notre style, plus agressif. Anderlecht, c’est la bourgeoisie, nous c’est plus ouvrier. »

L’opposition est tout aussi éclatante dans les gradins et même en tribune présidentielle où l’on retrouve le jeune et inexpérimenté Bruno Venanzi et son contraire, Roger Vanden Stock, qui sera absent dimanche, dont la famille règne sur le football belge depuis près de 45 ans. Un étage plus bas, le combat est aussi inégal entre le vieux briscard, Herman Van Holsbeeck et un Axel Lawarée toujours vert.

Le contraste est aussi saisissant dans les tribunes. Question décibels d’une part où la famille des Rouches a encore plusieurs longueurs d’avance, mais également au niveau de ses fondations. Le Sporting devrait à terme se détourner de son quartier historique et rejoindre Grimbergen afin de regoûter à la modernité au coeur d’un mastodonte appelé Eurostadium.

Le Standard est, lui, très loin de quitter Sclessin, où on s’attend davantage à un relifting qu’à un déménagement. Le probable accord sur une location annuelle à 9,5 millions d’euros a fait grand bruit (et qui renforce encore l’étiquette de club du pouvoir) alors que dans un même temps, le Standard fait discrètement écho de l’arrivée, dans l’organigramme du club, de l’ancien leader des Ultras Inferno en tant qu’interface entre supporters et membres de la direction.

Autant le Standard n’avait pas dix ans d’avance sur le reste du foot belge comme la presse a pu l’écrire après le deuxième titre de rang des Rouches en 2009, autant Anderlecht, malgré ses effets de manche, est très loin d’avoir aujourd’hui largué son rival liégeois qui finira bien par rebondir.

Et on ne serait finalement pas surpris que le Clasico de dimanche déjoue déjà les pronostics. L’histoire est bien loin d’être finie entre deux extrêmes qui s’attirent inévitablement depuis des décennies. « Le Standard est le reflet opposé d’Anderlecht », clame Goreux. Ça n’a jamais été aussi vrai qu’aujourd’hui.

Par Thomas Bricmont

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