Jacques Sys

Kevin De Bruyne, l’anti-Star

Jacques Sys Jacques Sys, rédacteur en chef de Sport/Foot Magazine.

Malgré le statut de vedette internationale que Kevin De Bruyne a acquis depuis son transfert à Manchester City, la simplicité du Diable Rouge fait plaisir à voir.

Dans les airs, dans l’avion entre Bruxelles et Barcelone, Kevin De Bruyne s’est levé et dirigé vers Marc Wilmots. Les Diables Rouges étaient en route pour Andorre et De Bruyne souhaitait dire quelque chose au sélectionneur. Il était le seul international dans ce cas. François De Keersmaecker était assis devant, son habituel sourire de contentement aux lèvres, alors que les autres dirigeants se réjouissaient aussi du voyage: la qualification s’apparentait à une formalité dans cet état-nain.

Le fait que ce soit De Bruyne qui ait discuté avec Wilmots en dit long sur le statut du médian de Manchester City. A l’arrivée de l’équipe à Barcelone, les Espagnols ne voulaient photographier qu’un seul joueur. De Bruyne s’est acquitté de la tâche de bonne grâce. Il a posé à plusieurs reprises, pendant que Radja Nainggolan faisait une petite sieste sur… la bande de dépôt des bagages. La simplicité avec laquelle De Bruyne vit fait plaisir à voir. Les sponsors, qui voyageaient avec l’équipe, en étaient surpris également. De Bruyne a voyagé avec l’insouciance d’un écolier. Pour s’amuser sur le terrain.

Marc Wilmots avait donné pour consigne de passer souvent et rapidement le cuir à Kevin De Bruyne, qui opérait depuis l’entrejeu. Au début, il n’en est rien ressorti. Soucieux d’émerger de sa crise de forme, Eden Hazard a appelé beaucoup de ballons mais il n’empêche: tout ce qu’a entrepris De Bruyne était parfait.

Wilmots ne réussit pas à faire fonctionner Hazard et De Bruyne.

Cette équipe doit être formée autour de De Bruyne, pour l’EURO. Ou mieux, autour de De Bruyne et de Hazard, deux footballeurs d’une valeur additionnée de 150 millions d’euros. Peu de pays peuvent étoffer leur entrejeu avec pareil capital. Mais pour l’heure, Wilmots n’a pas encore réussi à faire fonctionner de manière optimale ses deux stars. Elles ont des éclairs mais pas de continuité. C’est surtout lié au manque de schémas reconnaissables. Wilmots a trop souvent changé de cap et modifié les missions. C’est étrange car le besoin d’automatismes se fait ressentir depuis la Coupe du Monde. Wilmots a déjà annoncé qu’il allait essayer un nouvel entrejeu à la faveur des prochains matches amicaux, contre l’Italie et l’Espagne. Comme s’il ne connaissait pas encore les bons pions. Radja Nainggolan, le guerrier, convoité par tous les clubs italiens, est devenu incontournable dans l’entrejeu, grâce à sa puissance, son dynamisme et sa lecture du jeu. A Andorre, le footballeur de l’AS Rome était bien plus présent qu’un Axel Witsel étonnamment discret, dont les infiltrations furent rares. Il semble ne plus avoir de marge de progression depuis qu’il joue dans un championnat russe assez lent.

Dans quelque sept mois, cette levée en or tant portée aux nues se rendra à l’EURO français. Une cohorte de Belges va la suivre. Le pays va à coup sûr être à nouveau envahi par la fièvre du football. Les attentes sont colossales. Une place en demi-finale constitue le minimum. On peut l’espérer d’une formation de ce statut, aussi bien classée au ranking FIFA, même si celui-ci est très relatif. Ces Diables Rouges n’ont guère signé d’exploits. La Belgique n’était pas vraiment versée dans le groupe le plus difficile dans les qualifications pour le Mondial et ses adversaires sur le chemin de le France étaient encore plus accessibles. Le tirage de la Coupe du Monde a été clément aussi et la Belgique a perdu son premier véritable test, contre l’Argentine.

Marc Wilmots est obligé de prester en France, avec cette génération d’exception. Le sélectionneur n’est pas vraiment le père du succès. Il a certes instauré un climat dans lequel la plupart des internationaux se sentent bien. Ce n’est pas une tâche facile car beaucoup de footballeurs font partie de la  » génération-moi « . Ces dernières semaines, on ne s’est pas moins posé la question de savoir si Wilmots était le bon capitaine.

Willy donne l’impression de laisser glisser les critiques sur sa carapace et de suivre résolument sa propre voie. Mais nous, on ne sait pas encore laquelle.

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