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« Impossible n’est pas Kompany »

Sport/Foot Magazine profite de la rumeur du jour (Vincent Kompany futur président d’Anderlecht ?) pour vous faire découvrir l’univers du capitaine des Diables Rouges, et son clan…

L’histoire de Vincent Kompany aurait pu s’appeler « High fidelity », adaptation cinématographique par Stephan Frears du roman de Nick Hornby. Car si Kompany est un étendard d’un foot mondialisé dont Manchester City en est le symbole, son clan, sa famille au sens large, ses proches, ont une couleur bien plus régionale, un terroir urbain façonné sur le bitume de la capitale, sorte de protectionnisme « fraternel ». Avec Vince, l’expression « un ami pour la vie » prend tout son sens. Car ceux qui ont compté il y a 20, 15, 10 ans, sont toujours là aujourd’hui. Ce sont eux qui forment aujourd’hui sa garde rapprochée.

La famille évidemment avec Pierre, le père, François, le frère, Christelle, la soeur. Les gars du quartier avec le plus fidèle des fidèles, Rodyse Munienge. Son « coach » chez les jeunes, Albert Martens, resté la référence pour lui. Les équipiers de Neerpede, Anthony Vanden Borre, Floribert Ngalula, Trésor Diowo, Michael Lacroix, Pelé Mboyo ou Vadis Odjidja, ceux à son arrivée chez les pros à Anderlecht, Christian Wilhemsson ou Goran Lovre. Sans oublier, la pote des secondaires, Anne-Charlotte Mauroy, qui était encore jusqu’il y a peu son assistante personnelle. Même l’agent des débuts, Jacques Lichtenstein, est toujours là. C’est dire.

« Malgré ma réussite ces derniers mois, j’ai les mêmes amis, la même manière de vivre et la tête toujours sur les épaules. Mes amis savent bien que le jour où je partirai, ce ne sera pas pour les snober. » Cette interview pour la DH date de décembre 2003 ; il y a plus de dix ans, quelques mois après avoir connu des débuts fulgurants et fracassants en D1. Du haut de ses 17 ans, Kompany posait alors avec une doudoune Lacoste ballante devant la basilique de Koekelberg. Aujourd’hui Kompany porte son nom à merveille.

Devenu un des meilleurs défenseurs du monde, le capitane des Diables et des Citizens n’a pas attendu le crépuscule d’une carrière pour faire fructifier son nom : Bonka Circus (société de production et de management), BX Brussels (club de foot), Good Kompany (sports bar), SOS Villages d’Enfants, Elite Limousines VIP Protection Services (transport de luxe) : que ce soit dans la communication, le sport, le divertissement ou le caritatif, « World Kompany » n’a pas traîné en chemin. Et ce ne serait que la partie visible de l’iceberg…

« Chez les Kompany, tout était bien organisé »

Aujourd’hui, businessman averti et sportif mondialement célèbre, le décor qui l’accompagne est souvent moins austère que notre chère basilique et la doudoune a laissé place aux costumes de grands couturiers.

« Je le crois sur parole quand il dit qu’il ne va pas se mettre à planer. Mais qu’il le veuille ou non, il va être amené dans les mois et les années à venir à côtoyer un tout autre monde que celui qu’il a connu dans le quartier Nord. Je dis ça, je dis rien, mais sans football et la gloire, Christian Karembeu n’aurait sans doute pas rencontré Adriana… », déclarait dans nos colonnes sa mère, Joselyne Fraselle, décédée en 2007.

Et pourtant Vince n’a snobé personne. Et certainement pas son meilleur ami de toujours, Rodyse Munienge avec qui il a grandi dans le quartier de l’Héliport à Bruxelles, coincé entre le Canal, les tours du World Trade Center et la Gare du Nord.

« Notre enfance dans le quartier Nord de Bruxelles n’est peut-être pas la meilleure période de notre vie mais ça a été important de passer par là », souligne Rodyse. « On n’avait pas grand-chose, fallait pas rêver des dernières Air Max. Plusieurs de nos potes ont eu une trajectoire totalement différente, certains sont malheureusement morts poignardés. Si on a évité les conneries, c’est grâce à nos familles mais aussi au sport. Quand tu dois enchaîner l’école et le foot, tu n’as pas le temps de traîner dehors. Pour nous, c’était école, football, football, football. L’immeuble dans lequel nous vivions donnait sur l’agora, on était donc sans arrêt tourné vers ce terrain de jeu.

Et puis quand on quittait ce parc, ce n’était plus possible pour nous de « survivre financièrement ». Ma mère travaillait dans un hôpital, elle m’a élevé seule, moi, mes deux frères et mes deux soeurs. Aujourd’hui, tout le monde s’en est bien sorti. Même si chez moi, c’était davantage à la « congolaise » (il rit). Chez Vincent, la famille était mieux gérée, tout était bien organisé. Son père est politisé, sa mère était également engagée, il avait un encadrement très enrichissant et varié. Il s’intéressait à tout. Et c’est le cas encore aujourd’hui. »

« On fait partie de la famille »

Depuis leur rencontre sur fond d’échanges de jeux vidéos dans la tour numéro 35, Rodyse n’a pas lâché son pote d’une semelle. A la tête de la société de sécurité Protection Rapprochée UK, Big Rod a suivi son pote un peu partout, en Afrique, en Asie, à Hambourg où il partageait un appartement quand Vincent y était joueur et désormais à Manchester. « Notre relation n’est plus celle de deux meilleurs amis, c’est aujourd’hui quelque chose de plus fort. Je fais partie de la famille Kompany. Sa femme, Carla, m’appelle d’ailleurs leur troisième enfant… (il rit). Depuis tout petit, on est ensemble. Quand quelqu’un voyait l’un de nous deux, tu pouvais être sûr que l’autre moitié n’était pas loin. On m’appelait d’ailleurs « manager » car je n’avais pas la forme d’un joueur de foot (il rit). Quand on retourne au quartier pendant les vacances, personne n’est étonné de nous voir encore à deux. Il nous arrive même d’encore taper la balle au parc… »

Trésor Diowo est, lui, aussi resté très proche de Vinnie, Vince, Vincenzo, voire Boulbi (en référence au rappeur Booba), les surnoms que ses potes lui affublent. « Il vous dira que je suis le roi des petits ponts, car je lui en ai mis quelques-uns », rigole Trésor qui, après avoir évolué chez les jeunes d’Anderlecht, après avoir goûté aux séries inférieures (Tubize, White Star, etc), a rejoint en début de saison le club de son ami, le BX Brussels.

« Je le connais depuis mes 7 ans. Son père me prenait en voiture et nous conduisait Vincent et moi à Neerpede. Ça fait donc 20 ans qu’on se côtoie, on a eu le temps de tisser des liens très forts. Ce qui nous unit dépasse le cadre de l’amitié, aujourd’hui je suis comme son frère. J’ai été son garçon d’honneur à son mariage, je pars en vacances avec lui, je suis très proche également de son cadet, François.

L’argent et la gloire lui ont amené inévitablement de nouveaux « amis ». Quand on sortait en boîte de nuit, il n’y en avait pas mal qui rôdaient autour de lui. J’étais là pour lui dire de faire attention. Vincent sait qu’il peut compter sur nous, ses amis, sur notre sincérité. Si je vois qu’il se met à faire le malin, je n’hésiterai pas à le remette en place malgré son nom, malgré ce qu’il est devenu. Et s’il veut faire sa vedette, son Cristiano Ronaldo, sa reine d’Angleterre, il est tombé sur la mauvaise personne. Cette franchise, c’est dans ma personnalité, je dis les choses cash, c’est aussi pour ça qu’il me garde à ses côtés.

Evidemment que je l’ai vu évoluer avec le temps. Quand ton statut change, tes habitudes changent, c’est inévitable, mais ça n’a jamais faussé notre relation. Je ne vois pas Vincent comme Kompany, comme mon Président, je le vois comme un frère. »

« Une confiance totale »

« Je ne trouve pas ça étonnant que Vincent ait gardé les mêmes amis. L’amitié c’est quoi sinon avoir une confiance totale dans les gens qui l’entourent », poursuit Junior Ngalula que l’on a notamment connu à Anderlecht, au Standard, à Mons mais qui dut arrêter sa carrière très jeune suite à de multiples blessures au genou. De quatre ans son aîné, lui aussi a Mister Kompany comme président depuis qu’il est directeur technique du BX Brussels. « Vincent a toujours été un passionné. Il a toujours mis du coeur dans tout ce qu’il fait et ce depuis tout petit quand j’allais le voir jouer à Anderlecht dans l’équipe de mon frère Floribert. »

Floribert Ngalula fait également partie de la garde rapprochée. Le pote à Gerard Piqué, qu’il a connu chez les jeunes de Manchester United, a aussi vu, à l’image de son frère Junior, sa carrière barrée par les blessures. Après avoir parcouru le globe (Etats-Unis, Danemark, Finlande) durant sa carrière pro, Flo a lui aussi posé ses valises comme « joueur-entraîneur adjoint » dans le club de son pote.

« Un an avant le lancement du BX, tout était déjà très clair. Il voulait créer un club pour les jeunes de Bruxelles. Quand j’évoluais à l’OHL (saison 2011-2012), cette idée germait déjà. Il était vraiment décidé à ce que je rejoigne le projet ; il est venu me voir à Hambourg où ma femme habite, pour m’en convaincre. Il n’est évidemment pas heureux de la descente du club en P1, son but était le maintien, mais ça n’est pas la chose la plus importante pour lui. Il est très heureux de ce qui a été mis en place au niveau des jeunes dont je m’occuperai en partie la saison prochaine. »

« Vinnie et moi, on se connaît depuis Neerpede, depuis nos 12 ans », poursuit Flo. « Malgré la célébrité, il est resté pour moi la même personne. Je peux continuer à l’ « insulter » quand il se goure sur le pari d’un match, rien n’a changé. Je réalise seulement qui il est quand je marche dans la rue avec lui. Mais, cette célébrité, ce n’est pas ce que je retiens de lui, loin de là. Vincent m’a souvent aidé dans ma carrière. Notamment quand il m’a conseillé de venir à Hambourg pour me soigner d’une énième blessure, cette fois au ménisque externe. J’ai passé 3 mois chez lui. C’est durant cette période que j’ai rencontré ma femme qui est kinésithérapeute.

« Il a davantage confiance en toi, que toi-même »

C’est une bonne chose ce qu’il a dans l’estomac (sic). Il est impossible de lui faire dire que c’est « impossible ». C’est un des seuls avec qui je pouvais parler de mes blessures. Il savait trouver les mots justes pour me remotiver. Quand j’avais raccroché le téléphone, après lui avoir parlé, je me sentais mieux. T’as le sentiment qu’il a davantage confiance en toi, que toi-même.

S’il peut sembler parfois sérieux, il a toujours su s’amuser. Je me rappelle qu’à Hambourg, la veille d’un match de pré-saison face à la Juve, on avait fait un petit foot dans son salon. Comme on déteste tous les deux perdre, ça s’était terminé vers une heure du mat alors qu’on avait commencé vers 20 h. Le lendemain, il a joué son match comme si de rien n’était.

On est devenu adultes, pères, plus ou moins au même moment, on ne parle plus que de foot ou de délires. Cette amitié, c’est l’histoire de la vie, ça ne s’explique pas. »

Tout ne fut pas drôle pour autant, rappelle Rodyse. « Le décès de sa maman, en novembre 2007, l’a profondément marqué. Cela reste à ce jour la période la plus difficile de sa vie. D’autant que le club d’Hambourg ne l’a pas beaucoup soutenu, a manqué de chaleur humaine. Vincent ne montre pas grand-chose quand ça va mal, mais quand tu le connais comme je le connais, tu le sens quand ça va mal. Il a pu compter sur moi, sur Flo, sur Vadis Odjidja. Vincent avait besoin de soutien, il fallait lui changer les idées. En dehors du travail, il n’aime d’ailleurs pas parler foot… »

« Chaque année, il invite son noyau dur d’amis en vacances à ses frais », rappelle Trésor Diowo. « C’est en sorte logique car les endroits qui lui sont accessibles ne le sont peut-être pas pour ses amis. J’espère aussi qu’il ne me fera pas payer les ailes de poulet dans son nouveau bar », conclut Trésor en riant…

Thomas Bricmont

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