Jacques Sys

 » Gand a remis en cause les rapports de force du foot belge. C’est intéressant. « 

Jacques Sys Jacques Sys, rédacteur en chef de Sport/Foot Magazine.

Si le titre a couronné la superbe saison des Buffalos, le travail ne fait pourtant que commencer à Gand.

La Gantoise va bientôt découvrir un autre monde. Le 27 août, à Monaco, lors du tirage au sort de la Ligue des Champions. Là, en ce lieu de décadence, de débauche de luxe, Ivan De Witte et Michel Louwagie vont frayer avec les délégations des grands clubs européens. Sur le Rocher, ils vont pleinement prendre la mesure du mémorable conte de fées que vit La Gantoise.

Une fois la fumée de la fête dissipée, les gueules de bois apaisés et la vie redevenue normale, Gand va devoir se renforcer, afin de ne pas se faire laminer sur la scène européenne. Le club ne veut pas consacrer les revenus du bal des champions- quelque 20 millions d’euros- aux seuls renforts. Il veut en profiter pour croître de manière structurelle. C’est un signe de bonne gestion. Il veut consolider ses fondations, après le titre, pour continuer à progresser.

Naturellement, Gand accuse un retard historique sur des clubs de tradition comme Anderlecht, Standard et Bruges. Le gouffre n’est pas aisé à combler mais les Buffalos n’ont pas l’intention de s’égarer car ils n’ont pas encore oublié les errances du passé. Ils veulent progresser pas à pas. Bien gérer tout ça représente un défi important. Dans le passé gantois, l’aspect commercial n’a jamais été bon. Tout au plus n’a-t-il pas été mal. Maintenant, tout le monde veut s’associer au succès. Le cynisme d’antan a fait place à la fierté.

Gand a sans aucun doute développé le football le plus frais des play-offs. L’équipe n’a cessé de se poser en outsider alors qu’en réalité, après sa victoire 1-2 sur Anderlecht, lors de la dernière journée du championnat régulier, sa confiance n’a cessé de croître. Hein Vanhaezebrouck a mis à profit le stage suivant en Espagne pour affûter l’assurance de ses joueurs, en leur présentant des chiffres concrets pour étayer ses dires.

L’entraîneur est considéré comme l’architecte du succès. Il a mué une équipe dénuée de vedettes en bloc soudé. Le référendum du Footballeur Pro de l’Année montre à quel point La Gantoise s’appuie sur son collectif. Le premier footballeur gantois, Laurent Depoitre, n’est que quatrième et il est le seul dans le top dix. Marc Wilmots n’a sélectionné aucun footballeur de Gand, alors que les Belges en sont les plaques tournantes pour la première fois depuis des lustres.

Tout le monde veut désormais s’associer au succès gantois.

Gand est une équipe sans vedettes, dirigée par un entraîneur qui y a transplanté sa philosophie offensive, sans guère commettre d’erreurs tactiques. Pour Hein Vanhaezebrouck aussi, il s’agit de garder les pieds sur terre, maintenant. Il est têtu, empreint d’assurance, mais d’une manière sympathique, parce qu’il traite les gens avec respect et est très accessible. Comme Ivan De Witte et Michel Louwagie. Ces caractéristiques imprègnent le club. Il doit les conserver.

La deuxième place du Club Bruges fait figure de prix de consolation. C’est étrange, au terme d’une saison marquée par une belle campagne européenne et une victoire en Coupe. La quête du titre a pris une forme si obsessionnelle que le Club a été en proie à une pression constante. Elle peut être encore pire la saison prochaine. Le Club doit réfléchir à ce qui n’a pas marché. Il ne peut pas se réfugier constamment derrière l’excuse de la fatigue car on risque d’entendre la même complainte la saison prochaine s’il réalise à nouveau un beau parcours européen.

Anderlecht aussi a besoin de réfléchir. Besnik Hasi relève un manque de force mentale. Anthony Vanden Borre a déclaré que les leaders du groupe n’avaient pas réussi à hisser les jeunes vers le haut. On ne peut pas faire fi de ces constats.

Le Club Bruges et Anderlecht partent en quête d’un rétablissement de leur honneur, maintenant que Gand a remis en cause les rapports de force au sein de notre football. Cela ne peut que rendre le championnat plus intéressant. En attendant, partout, il y a du pain sur la planche. Pour gagner en stabilité. Comme La Gantoise semble le faire, alors qu’elle avait usé six entraîneurs en deux ans.

Par Jacques Sys

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