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Leekens :  » Quel autre entraîneur, belge ou étranger, peut se vanter d’avoir entraîné cinq fois des sélections ? « 

Pierre Danvoye
Pierre Danvoye Pierre Danvoye est journaliste pour Sport/Foot Magazine.

Dès le lendemain de son départ de Lokeren, Georges Leekens a rejoint l’équipe nationale algérienne. Il s’explique.

Les supporters de Lokeren étaient furieux contre toi lors de tes dernières heures là-bas. Qu’est-ce qui te motive encore à affronter des ambiances pareilles à 67 ans ?

On fait de l’intox quand on dit  » les supporters « . On doit dire  » 15 ou 20 supporters « . C’est dommage mais il y aura toujours des gens qui oublient vite. Il y a un an, Roger Lambrecht m’avait demandé de retourner là-bas pour sauver Lokeren. Je l’ai fait. Est-ce qu’il était possible, cette saison, de faire mieux que ce que j’ai fait, avec plusieurs piliers qui étaient indisponibles au début ? Pas sûr. On ne demande pas non plus à Westerlo de finir dans les cinq premiers. Mais c’est comme ça : dès que c’est Georges Leekens qui entraîne, les attentes sont plus hautes. Ne t’inquiète pas pour moi, j’ai plus de trente ans dans le métier, je ne me tracasse plus pour quelques furieux.

La direction de Lokeren ne parle pas de licenciement mais de départ de commun accord. C’était plus facile d’expliquer les choses comme ça, vu que tu avais déjà trouvé un accord avec la fédé algérienne ?

C’est faux. Je ne négocie pas ailleurs quand je suis sous contrat. Je l’ai fait avec Bruges quand j’entraînais les Diables, j’ai accepté l’offre du Club, ça ne m’a pas réussi, ça m’a servi de bonne leçon… Tu dois simplement savoir que le président de la Fédération algérienne est un ami, que j’ai conservé pas mal de contacts ici depuis mon premier passage, qu’on continuait à s’appeler de temps en temps. Quand ils ont entendu que j’avais quitté Lokeren, ils m’ont téléphoné et tout a été très vite réglé. Et, oui, mon départ de Lokeren s’est fait de commun accord. Les divorces de commun accord, ça existe encore. Mais les gens préfèrent quand on se tape l’un sur l’autre, c’est plus spectaculaire, plus vendeur.

Qu’est-ce qui te fait dire que ça va mieux se passer que lors de ton premier passage à la tête de l’équipe d’Algérie ?

Encore une connerie qu’on avait inventée à l’époque pour vendre du papier ! C’est ça, la petite mentalité belge. Je ne suis quand même pas le premier à mettre le doigt là-dessus ! Jean-Marie Pfaff le disait déjà. Daniel Van Buyten a fait le même constat. Marc Wilmots aussi. Avec eux, je suis bien d’accord sur un point : le Belge est plus apprécié à l’étranger que chez lui. Ça s’était très bien passé quand j’étais venu ici une première fois. J’avais qualifié l’Algérie pour la CAN. Mais je rencontrais de gros problèmes personnels et c’est pour ça que j’avais demandé à la Fédération qu’on mette fin à notre collaboration. Je leur avais dit : -Le jour où je peux revenir, si vous en avez envie, je reviens. Voilà, c’est fait.

Tu as dit :  » Les Algériens me respectent et respectent mon travail.  » C’est beau, mais comme les autres, tu voleras dehors si les résultats ne sont pas bons.

Je sais mais je ne fais pas partie des entraîneurs qui pensent déjà à leur C4 éventuel quand ils signent un contrat. Je n’ai pas peur. J’ai une bonne équipe et on va jouer la CAN avec des ambitions. Ça va être chaud parce qu’il y a la Tunisie et le Sénégal dans notre groupe, mais j’ai des joueurs qui jouent à Leicester, à Porto, en France et aussi en Belgique.

Quand on va sur ta page Wikipedia, tous les employeurs que tu as eus ne tiennent plus sur la même page, il faut faire défiler l’écran pour avoir un aperçu total. C’est étonnant.

Je vais te rappeler un truc encore plus étonnant. Regarde le nombre d’employeurs qui m’ont pris une deuxième fois… Le Cercle de Bruges, le Club, Courtrai, Lokeren, Mouscron, la fédé belge, la fédé algérienne. Ça veut dire qu’on continuait à m’apprécier après mon départ, non ? Il y a des gens qui passent toute leur vie dans la même boîte. Ce n’est pas fait pour moi. Je suis un aventurier. Je bouge pour un oui, pour un non. Quand il y a un tsunami, ça ne sert à rien de rester sur place, il faut se sauver… On m’a parfois licencié, d’autres fois – souvent même – j’ai moi-même décidé de partir. Parce que mon employeur avait des soucis financiers, parce que j’estimais qu’il n’était pas prêt pour mes idées, parce qu’il avait dit des choses fausses sur mon compte, etc. Au bout du compte, je ne me plains pas. Quel autre entraîneur, belge ou étranger, peut se vanter d’avoir entraîné cinq fois des sélections ?

Par Pierre Danvoye

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